Alexandre Bompard (La Fnac) : « Nous avons réconcilié le digital et la vente physique »

Quatre ans après son arrivée à la tête de la Fnac, son PDG se réjouit du succès de sa stratégie hybride mêlant e-commerce et ventes en magasin. Tout en s'insurgeant de la liberté laissée à son principal rival Amazon.
Alors que la Fnac est sortie du rouge en renouant avec une croissance positive au troisième trimestre 2014, son PDG, Alexandre Bompard, peut apprécier le chemin parcouru. Invité à s’exprimer aux Assises du droit et de la compétitivité, il a rappelé la situation de l’enseigne à son arrivée, il y a quatre ans.
Avec cette première surprise quand il a débuté par une tournée des magasins. « Quand je demandais aux vendeurs quel était leur principal concurrent ? Darty ? Boulanger ? Saturn ? Ils me répondaient : « non, Fnac.com ! ». Et pour cause. Les produits sur le site étaient de 15 à 20 % moins chers et les vendeurs n’étaient pas intéressés aux ventes en ligne. »

Le nouveau PDG de la Fnac a donc procédé à une transformation complète de l’entreprise afin de réconcilier les deux mondes, physique et digital. Avec une direction commerciale unique et une relation-client omnicale pour « desiloiser » les organisations. « En magasin, les clients ont ainsi accès aux 20 millions de références de nos entrepôt. Il faut laisser au consommateur le choix du canal en tout en le faisant bénéficier de la recommandation d’un vendeur. »
Alexandre Bompard s’est rapidement forgé une conviction forte. « Je n’ai jamais cru que l’e-commerce allait tuer le commerce physique. Ce n’est pas l'un ou l'autre. La Fnac possède, par ailleurs, des atouts forts - une marque, une communauté – et une offre hybride à la fois culturelle et high-tech. »
Le dirigeant prend l’exemple de la tablette Surface Pro de Microsoft, un produit très innovant mais qui a connu des ventes poussives à ses débuts. En cause, selon lui, la volonté de Steve Ballmer, PDG de la firme de Redmond à l’époque, de recourir à une distribution 100 % digitale. « Je lui proposé de tester la vente du produit dans nos magasins. Et ça a marché. L’innovation a besoin d'explication, de pédagogie. Je le dis aux fournisseurs : « donnez-nous des exclusivités, des conditions tarifaires préférentielles et nous ferons ce travail. »
Un électrochoc pour ne pas finir comme Virgin
Pour autant le numérique bouleverse son activité à plusieurs niveaux. La moitié de ses produits sont vendus en ligne et la digitalisation des contenus (streaming, piratage…) a fait chuter les ventes. Enfin, avec les réseaux sociaux, le client est redevenu roi. Il peut évaluer les fournisseurs voire devenir lui-même producteur avec l’économie de partage.
Pour ne pas finir comme Virgin, il a fallu donc soumettre le distributeur à un véritable électrochoc avec un plan d’économies à la clé. La Fnac a, par ailleurs, introduit de nouvelles familles de produits – les objets connectés, le petit électroménager, la papeterie… - qui font désormais 11 % du chiffre d’affaires mais aussi un format de magasin de proximité développé en franchise et de nouveaux services comme, récemment, la livraison à domicile en 3 heures chrono. Le distributeur a aussi initié des partenariats avec des fabricants français des objets connectés dont certains pourraient devenir des leaders mondiaux.
« La Fnac ne se bat avec les mêmes armes qu’Amazon »
Pour autant, Alexandre Bompard estime que la Fnac ne se bat pas avec les mêmes armes que son grand rival, Amazon. Le géant de l’e-commerce peut creuser ses pertes faisant le pari d’une croissance future en investissant lourdement sans que la Bourse ne le sanctionne. Il peut aussi s’installer où il veut, là où la réglementation fiscale, l'impôt sur la société sont les plus favorables. Amazon n’est pas soumis non plus à la même régulation. « Si je veux acheter un concurrent en région parisienne, les autorités de concurrence vous me tombez dessus. Vous faites déjà 22 % de parts de marché sur cette zone, ce rachat créerait une situation défavorable au consommateur. »
Autre exemple de distorsion de concurrence. La fameuse commande en 1-Click d’Amazon qui permet de régler ses achats sans avoir à redonner ses coordonnées bancaires ou à saisir le cryptogramme n'est pas autorisé pour un acteur français. « Et pourtant la concrétisation de l’acte d’achat se joue sur deux secondes sur internet ».
Alexandre Bompard, PDG de la Fnac, sur BFM Business (24/10/2014)
Croissance du chiffre d'affaires: "le groupe... par BFMBUSINESS
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