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Le 13ème Colloque Médecine et Recherche de la Fondation Ipsen dans la série Endocrinologie : «Cerveau, adolescence et puberté»

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Nous connaissons tous les perturbations de l'adolescence : les modifications physiques, psychologiques et sociales impliquées dans la phase de transition essentielle entre l'enfance et l'âge adulte. Le cerveau humain su

Nous connaissons tous les perturbations de l'adolescence : les modifications physiques, psychologiques et sociales impliquées dans la phase de transition essentielle entre l'enfance et l'âge adulte. Le cerveau humain subit des modifications structurelles et fonctionnelles considérables pendant l'adolescence, générées par les modifications hormonales associées à la maturation du système reproducteur pendant la puberté. Les mécanismes associant ces modifications et leurs implications dans le bien-être au cours de l'adolescence ont fait l'objet d'un débat entre treize experts reconnus au niveau international lors du 13ème Colloque Médecine et Recherche de la série Endocrinologie organisé par la Fondation IPSEN à Paris, le lundi 2 décembre. Les organisateurs étaient Jean-Pierre Bourguignon (Université de Liège, Belgique), Jean-Claude Carel (Hôpital Robert Debré, Paris, France), Jacques Young (Université Paris Sud and Assistance Publique Hôpitaux de Paris, Hôpital Bicêtre, Inserm U693, Paris, France) et Yves Christen (Fondation Ipsen, Paris, France).

Cette réunion a permis de compléter les connaissances sur les perturbations survenant à l'adolescence et sur la manière dont les modifications complexes et délicates déclenchées par la puberté peuvent être perturbées, entraînant de graves problèmes de comportement et de santé mentale et d'envisager des méthodes concrètes pour faciliter la transition difficile entre l'enfance et l'âge adulte.

La puberté, l'événement qui définit l'adolescence, correspond au processus biologique qui met en place la compétence reproductive. Tandis que s'accroit la production des hormones par les gonades, les développements physiques, psychologiques et comportementaux associés à l'adolescence apparaissent. Dans le cerveau, l'interaction complexe entre les hormones gonadiques et les structures cérébrales génère une réorganisation structurelle et fonctionnelle, particulièrement dans les régions associées au comportement social, au traitement des émotions, au plaisir et à la récompense, ainsi qu'au processus décisionnel et à l'action (Cheryl Sisk, Michigan State University, East Lansing, USA). Les modifications structurelles, détectées par l'imagerie à résonance magnétique (IRM), sont corrélées à l'âge chronologique et au statut pubertaire (Anne-Lise Goddings, UCL Institute of Child Health, Londres, RU). L'IRM fonctionnelle montre que le taux de développement diffère entre les diverses structures, apportant ainsi des éléments permettant de comprendre le développement cognitif au cours de l'adolescence. Pendant le développement du cerveau adolescent, non seulement la taille du cerveau augmente, mais, plus important encore, ses interconnexions se multiplient ; les modifications peuvent être corrélées au sexe, à la santé et à la maladie, ainsi qu'à la cognition et au comportement (Jay Giedd, National Institute of Mental Health, Bethesda, USA). La consommation de drogue, une conséquence fréquente de la tendance des adolescents à faire des expériences et à prendre des risques, peut affecter le développement du cerveau : des souris recevant de la cocaïne montrent un développement anormal des structures du cerveau social et une augmentation de l'activité locomotrice ; les effets étaient plus importants lorsque la cocaïne était administrée à des souris adolescentes que lorsqu'il s'agissait de jeunes adultes (Paul Frankland, Hospital for Sick Children, Toronto, Canada).

L'âge auquel commence la puberté a un impact considérable sur le développement psychologique et comportemental, ainsi que sur la capacité à s'adapter, et peut influencer l'émergence de problèmes dépendant du sexe, tels que les troubles alimentaires, l'automutilation et la dépression chez les filles et les problèmes de comportement chez les garçons (Sisk; Pierre-André Michaud, Université de Lausanne, Suisse ; Russell Viner, UCL Institute of Child Health, Londres, RU). Les travaux menés sur des rats et des souris montrent que les effets des hormones gonadiques sur le cerveau diminuent avec le temps, ce qui signifie que l'âge à laquelle commence la puberté contribue au risque du développement de tels problèmes (Sisk). Les individus ayant eu une puberté précoce ou tardive sont plus attirés par l'exploration et le risque que ceux dont la puberté commence à un âge normal, mais l'impact est différent entre les garçons et les filles (Michaud). La variation du début de la puberté pourrait être liée à des problèmes dans l'enfance, tels que la pauvreté, la négligence, la maltraitance, ainsi qu'à une mauvaise image de soi (Michaud ; Viner). Les études de population indiquent qu'une puberté précoce peut constituer une réponse évolutionniste à l'adversité, induite par le stress (Viner).

Des facteurs tels que l'état métabolique de l'organisme sont également impliqués : la reproduction nécessitant une grande quantité d'énergie, surtout chez les femelles, la fertilité est réduite lorsque la nourriture est insuffisante ; à l'inverse, l'obésité peut être à l'origine d'une puberté de plus en plus précoce (Manuel Tena-Sempere, Universidad de Córdoba, Espagne). Entre le milieu du dix-neuvième et le milieu du vingtième siècle, l'âge de début de la puberté a diminué d'environ quatre ans avant de se stabiliser. Depuis l'an 2000, les différents aspects du développement reproductif changent à des rythmes différents, par exemple la poitrine des filles se développe plus tôt, mais l'âge de début des règles n'a pratiquement pas changé (Bourguignon). Les perturbateurs endocriniens présents dans l'environnement peuvent en être en partie responsables.

Les signaux de l'état métabolique sont liés à la production de GnRH et d'autres régulateurs de la puberté par l'implication des kisspeptines et d'autres molécules récemment identifiées qui pourraient participer au contrôle métabolique du début de la puberté (Tena-Sempere; Nicolas de Roux, Inserm U676, Hôpital Robert Debré, Paris, France). Les signaux de faim et de satiété convergent sur les noyaux de l'hypothalamus où des neuropeptides sont libérés qui régulent l'équilibre énergétique et le comportement alimentaire (de Roux). Les composants de ce "portail" métabolique sont en cours d'identification au niveau cellulaire (Tena-Sempere), tout comme les protéines synaptiques impliquées dans l'intégration des signaux métaboliques dans le contrôle de la production des hormones sexuelles (de Roux).

Les périodes au cours desquelles la différenciation sexuelle du cerveau est particulièrement sensible aux hormones sexuelles stéroïdiennes sont celles qui précèdent et suivent la naissance, ainsi que la puberté. Des niveaux hormonaux atypiques dans la période périnatale peuvent être à l'origine de troubles de l'identité sexuelle, défini comme le sentiment, chez certains enfants, de ne pas être nés avec le "bon" sexe (Julie Bakker, Université de Liège, Belgique). Les effets des hormones sexuelles pendant la puberté sur l'identité sexuelle ainsi que sur la cognition et le développement social sont en cours d'examen chez des jeunes gens traités avec une hormone de libération des gonadotrophines (GnRH). Il s'agit de l'hormone qui régule la production d'hormones sexuelles par les gonades ; elle est utilisée chez certains enfants présentant un trouble de l'identité sexuelle pour faciliter les interventions chirurgicales de réattribution sexuelle.

Le début de la puberté, notamment la production de GnRH, implique une régulation épigénétique complexe : un réseau de gènes contrôle la transcription de gènes particuliers et la production des protéines (Sergio Ojeda, Oregon Health Sciences University, Beaverton, USA; Vincent Prévot, Inserm U837, Université de Lille 2, France). Les processus développementaux clés sont initiés et maintenus par des activateurs mais dominés par des répresseurs et des répresseurs de répresseurs : certains de ces gènes régulateurs sont identifiés et leurs actions décrites (Ojeda). La production de GnRH par les neurones de l'hypothalamus est adaptée aux différents stades de la puberté chez les souris par des groupes spécifiques de micro-ARN - un type spécial de molécule de régulation - présents dans ces neurones (Prévot). D'autres informations émergent également concernant les mécanismes cellulaires sous-jacents aux modifications pubertaires dans le cerveau. Chez les souris, la GnRH semble réguler la migration et la connectivité prénatales des neurones produisant la GnRH dans l'hypothalamus (Prévot), alors que chez les rats en période de puberté, la GnRH modifie la production de nouveaux neurones et de cellules gliales de support dans certains noyaux du cerveau impliqués dans la reproduction (Sisk).

Chez les jeunes hommes souffrant de maladies génétiques rares chez lesquels la voie de la GnRH est insuffisante et les hormones sexuelles ne sont pas produites (hypogonadisme hypogonadotrope congénital et syndrome de Kallmann), les testicules ne se développent pas et la puberté ne commence pas. Un programme de traitement des patients souffrant de ces pathologies, tenant compte de ses effets sur la personnalité et les interactions sociales a été décrit (Carel et Young).

La Fondation Ipsen

Créée en 1983 sous l'égide de la Fondation de France, la Fondation Ipsen a pour vocation de contribuer au développement et à la diffusion des connaissances scientifiques. Inscrite dans la durée, l'action de la Fondation Ipsen vise à favoriser les interactions entre chercheurs et cliniciens, échanges indispensables en raison de l'extrême spécialisation de ces professions. L'ambition de la Fondation Ipsen est d'initier une réflexion sur les grands enjeux scientifiques des années à venir. La Fondation a développé un important réseau international d'experts scientifiques qu'elle réunit régulièrement dans le cadre de Colloques Médecine et Recherche, consacrés à six grands thèmes: la maladie d'Alzheimer, les neurosciences, la longévité, l'endocrinologie, l'arbre vasculaire et le cancer. Par ailleurs, la Fondation Ipsen a initié, à partir de 2007, plusieurs séries de réunions en partenariat avec le Salk Institute, le Karolinska Institutet, le Massachusetts General Hospital, les Days of Molecular Medicine Global Foundation, ainsi qu'avec les revues Nature, Cell et Science. La Fondation Ipsen a publié plus d'une centaine d'ouvrages et a attribué plus de 250 prix et bourses.

Isabelle de Segonzac, Image Sept
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