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2016, année de déprime pour le secteur du luxe?

Les signaux négatifs se multiplient autour du secteur du luxe, en particulier la baisse des dépenses en boutiques de détaxe. Les clients chinois et moyen-orientaux sont moins dépensiers.

Les signaux négatifs se multiplient autour du secteur du luxe, en particulier la baisse des dépenses en boutiques de détaxe. Les clients chinois et moyen-orientaux sont moins dépensiers. - Eric Piermont - AFP

"Malgré des chiffres convaincants de la part des géants français LVMH, Hermès ou Kering, les perspectives du luxe commencent à se ternir singulièrement pour 2016. Avec des signes d’inquiétude notamment du côté des clients chinois, mais aussi sur toute la zone des pays du Golfe."

La petite amélioration du début d’année n'a pas fait long feu. Malgré la très belle tenue des champions français LVMH, Hermès et Kering, qui ont publié des chiffres convaincants, tout le reste du secteur du luxe subit une conjoncture de plus en plus problématique.

Il semblerait que le luxe, souvent identifié comme le secteur qui ne connaît jamais la crise, semble bien plier sous le poids de la frilosité de ses meilleurs clients, devant les menaces géopolitiques, la volatilité des taux de change et d’autres facteurs ponctuels.

Inquiétudes sur la clientèle chinoise 

Que ce soit Burberry à Londres, ou la distribution spécialisée américaine chez Tiffany et Macy’s, tous les résultats et perspectives dernièrement ont déçu et inquiètent pour l’ensemble de l’année.

C’est notamment sensible sur les deux principales clientèles des grandes enseignes, à travers les chiffres des ventes dans les magasins duty-free. Il y a une panne des dépenses pour les touristes chinois… et de plus en plus ceux du Moyen-Orient.

Lien entre dépenses et trafic aérien

La dernière enquête du cabinet spécialisé Global Blue confirme un vrai coup de froid qui perdure autour de la clientèle venue de Chine. Après une baisse spectaculaire et historique des achats en détaxe en mars (-23%), les signaux ne sont guère plus encourageants en avril, avec une nouvelle baisse à deux chiffres (-18,5%).

La frilosité de ces clients s’explique aussi par la forte baisse du trafic aérien en provenance d’Asie, qui se lit également dans les chiffres du groupe ADP, acteur et observateur stratégique du marché des boutiques de luxe.

Baisse des ventes dans les aéroports

Le trafic Asie-Pacifique accuse un très fort repli depuis les attentats de Paris en novembre dernier, et signe même un recul de 6,3% sur les trois premiers mois de l’année. Il n'y a pas de signe de retournement pour le moment.

Et cela se traduit par une baisse du chiffre d’affaires par passager dans les boutiques des aéroports parisiens, -5,3% au 1er trimestre et -6,9% rien qu’en duty free.

Les clients du Golfe moins dépensiers

Phénomène amplifié par un autre coup de froid du côté d’une autre clientèle essentielle au marché du luxe, les pays du Golfe. Avec la forte baisse des cours du pétrole entre la fin de l’année dernière et le début de cette année, et les conséquences budgétaires pour ces pays producteurs, les clients dépensent beaucoup moins qu’auparavant.

Une enquête Bain & Co montre que la croissance des dépenses de luxe des clients des pays du Golfe marque un coup d’arrêt très net, passant d’une croissance de 4% en 2014 à … 1% en 2015. Si les tendances se poursuivent, on pourrait même assister à une baisse des ventes cette année, ce qui constituerait du jamais vu.

Effets de changes imprévisibles

Mais cet ensemble de facteurs risque de peser sur le secteur de manière durable. D’autant que la remontée actuelle du dollar, initiée par la volonté de la FED de resserrer sa politique monétaire, va influer sur les taux de change avec les monnaies des pays concernés, et donc sur les capacités d’achat de la clientèle.

Phénomène qui pourrait s’inscrire dans la durée, d’autant que le tourisme, principal vecteur d’achat du secteur du luxe, connaît lui aussi des jours difficiles. Le britannique Thomas Cook notamment a abaissé ses prévisions pour l’année après des chiffres de réservations d’été en forte baisse.

Antoine Larigaudrie