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À Wall Street, les bonus en baisse mais les emplois en hausse en 2015

Des bonus au régime sec... mais au profit des salaires fixes et des créations d'emplois. Les chiffres 2015 de Wall Street témoignent d'une réelle mutation.

Des bonus au régime sec... mais au profit des salaires fixes et des créations d'emplois. Les chiffres 2015 de Wall Street témoignent d'une réelle mutation. - Spencer Platt - Getty Images North America - AFP

"L’année 2015 aura été l’occasion d’une nouvelle mise au régime des traders et banquiers. Les rémunérations sont en nette baisse sur un an, mais au bénéfice des créations de postes."

2015 aura été une année difficile pour les professionnels des marchés, et notamment pour les plus emblématiques d’entre eux: les banquiers et traders de Wall Street.

Volatilité des marchés, très forte baisse à l’été, plongeon des taux d’intérêt, mouvements sur les monnaies… Tout a contribué à rendre le métier plus compliqué qu’auparavant pour les grandes enseignes new yorkaises.

Les bonus en recul… les salaires un peu moins

Résultat, les chiffres du Contrôleur Général de l’état de New York sont sans appel, et correspondent à ce que les banques elles-mêmes ont révélé au travers de leurs résultats.

Les bénéfices globaux du secteur bancaire à Wall Street sont en baisse de 10,5% en moyenne, les rémunérations globales (incluant le salaire net) sont en repli de 6%, et la part variable (bonus) accuse un recul de 9%.

Un baromètre indispensable

En un an, l’enveloppe moyenne de bonus d’un trader est passée de 160.000 à 146.000 dollars. Un recul qui peut paraître limité, au vu du climat très pesant et très négatif qui a régné sur les marchés notamment sur le second semestre.

Mais le niveau des bonus de Wall Street, véritable baromètre économique américain, est un indice capital pour mesurer l’état d’esprit de la communauté financière de la ville, ainsi que ses priorités d’investissement et de consommation.

Conséquences budgétaires pour la ville et l’état

"L’année 2015 aura été un véritable défi", a commenté hier le Contrôleur Général Tomas DiNapoli en publiant cette étude. "Certes, le poids des frais de justice dans l’ensemble des litiges financiers commence à s’alléger, mais pas l’incertitude du côté de l’économie et des marchés mondiaux. Cela augure d’une année 2016 sans doute difficile également" a-t-il ajouté.

"Le budget de la ville et de l’état dépendent en grande partie des revenus de l’activité des banques de marché, et si ce climat persiste, cela voudra dire moins de rentrées fiscales, moins de créations d’emplois industriels locaux liés aux investissements bancaires, et donc des conséquences budgétaires importantes pour New York", déplore Thomas DiNapoli.

L’emploi financier redémarre

Un facteur important à la lecture de ces chiffres: la baisse la plus importante est liée véritablement aux bonus. Les salaires moyens, eux, ont tendance à moins chuter, et même à augmenter, notamment sur les hauts niveaux de salaire.

Et parallèlement, l'autre chiffre important du rapport est celui de l’emploi. Wall Street a créé à nouveau des postes, pour la 2ème année de suite depuis la crise de 2008: 4.500 nouveaux emplois sur l'année passée.

Une ébauche d’auto-réforme?

L'effectif des banques d'affaires new yorkaises atteint 172.400 salariés. On est toujours sur des effectifs en baisse de 8% par rapport à la période d'avant-crise, mais la tendance s'améliore nettement.

Du coup, le géant financier new yorkais n’est-il pas en train de purger ses propres excès, et se soumettre de lui-même à la diète forcée que voulaient lui infliger les autorités de régulation? À savoir modérer les bonus jugés extravagants dans certains cas, quitte à augmenter la part fixe des salaires et miser sur l’emploi?

Un métier en pleine mutation

Car il est clair que Wall Street est en plein changement, et que les banques ont besoin de fortifier ou de créer de nouveaux segments pourvoyeurs d’emplois, comme celui de la high-tech bancaire.

Face à l’émergence des Fintech, des sociétés de crédit et de financement non-bancaires, dont l’activité tourne en majorité autour du savoir-faire technologique, les besoins et les tendances sont en train d’évoluer aussi bien du côté de la clientèle que du métier lui-même. Et en cela, ces chiffres vont dans le sens de ce que Barack Obama veut mettre au crédit de son bilan économique: celui d’un début de réforme du secteur financier américain.

Enjeu électoral

Une forme de succès que le futur ex-président veut transmettre au camp Clinton, dans le cadre des primaires de la campagne présidentielle américaine.

Car face à un Bernie Sanders extrêmement critique face au monde de la finance new yorkaise, Hillary Clinton souhaite mettre en avant un monde bancaire en train de se transformer et de digérer de lui-même ses excès passés, pour mettre à profit sa propre transformation.

Antoine Larigaudrie