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Vinci victime d'une arnaque: que s'est-il passé mardi?

Faux communiqué de presse, chute de 18% du cours de bourse, puis faux démenti qui fait remonter l'action. Le feuilleton Vinci a estomaqué les investisseurs mardi. Récit d'une arnaque romanesque.

Au lendemain d'une affaire digne d'un roman, Vinci étudie la possibilité de poursuites judiciaires et va saisir l'Autorité des marchés financiers. Mardi, un faux communiqué de presse envoyé en son nom a entraîné un flash crash sur son titre. En quelques secondes, l'action a perdu près de 20% mardi, avant de remonter pour terminer en baisse de près de 4%.

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L'histoire commence avec un faux communiqué de presse publié à 16h05 et envoyé à différentes rédactions. Le texte explique que Vinci a découvert d'énormes irrégularités comptables, pour 3,5 milliards d'euros, et que le groupe de BTP révise ses comptes 2015 et 2016 à la baisse. Au passage, le communiqué indique que le directeur financier, Christian Labeyrie, a été licencié par la compagnie.

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Jamais Vinci n'aurait publié de telles informations aux heures de cotation: les règles boursières interdisent de publier quelconques informations pouvant influencer les cours lorsque la Bourse est ouverte. Mais tout est très bien ficelé. Dans le communiqué, un lien renvoie vers une copie du site officiel du groupe, une sorte de site miroir qui reprend les codes du vrai site internet de Vinci. Sur cette page figure le nom du vrai responsable de la communication, mais accompagné d'un faux numéro de téléphone. Si bien que quand les journalistes appellent, ils tombent sur un faux porte-parole qui leur confirme l'information. Une vraie personne physique, qui a vraisemblablement utilisé une carte prépayée et qui n’est donc pas identifiable.

Un démenti... faux lui aussi

Plusieurs médias publient donc les informations du faux communiqué de presse. L'impact sur les marchés est immédiat: le cours dévisse de 18%. Et là, l'histoire se corse encore. Un démenti est publié à 16h30, le cours remonte. Problème: c'est un faux! Dans ce second courrier, une phrase est troublante: "Des personnes malveillantes ont porté atteinte à notre groupe en détournant des informations ayant fui de nos bureaux". Une phrase qui pouvait laisser entendre, en quelque sorte, qu'il n'y avait pas de fumée sans feu.

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C'est juste avant la clôture de la Bourse, aux alentours de 17h, qu'arrive le vrai démenti, émanant cette fois bien du service communication de Vinci. Le groupe nie tout en bloc. "Nous avons été victime d'un piratage, tout est faux, le groupe se porte très bien", a expliqué un porte-parole. Pour le groupe, il s'agit bien d'un coup boursier. "Tout a été soigneusement pensé pour faire artificiellement chuter puis remonter le cours de bourse", a-t-il indiqué.

Mais alors qui a orchestré ce coup boursier? Pour le moment, nul ne le sait. L'opération a été revendiquée par mail.

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Les pirates se félicitent de la dégringolade boursière de Vinci, et mettent en cause Vinci sur toutes sortes de projets, notamment l'aéroport Notre Dame des Landes, dont la forêt "sent déjà le béton reculer", et "les coups que cette entreprise assène quotidiennement aux Népalais et aux Indiens qui meurent chaque jour sur leurs chantiers au Qatar". Une nouvelle manière de noyer le poisson? Impossible à dire à l'heure qu'il est.

Vinci a saisi l'autorité des marchés financiers et étudie tous les recours juridiques possibles. Sans gros espoir, dit le porte-parole, d'identifier les auteurs.

Caroline Morisseau, édité par N.G.