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Bonus 2016: les banquiers vont se serrer la ceinture

Le Credit Suisse, à lui tout seul, va devoir alléger son enveloppe de primes annuelles de 1,2 milliard de dollars.

Le Credit Suisse, à lui tout seul, va devoir alléger son enveloppe de primes annuelles de 1,2 milliard de dollars. - FABRICE COFFRINI - AFP

Conséquence des très mauvaises performances du secteur bancaire européen depuis le début de l’année, les bonus s’annoncent moindres que les années précédentes pour les banquiers.

2,5 milliards de dollars de moins! L’enveloppe globale des bonus accordés aux banquiers du secteur financier européen s’annonce bien moins juteuse cette année. En cause, la forte baisse des titres en bourse, étant donné que la plupart de ces primes sont libellées en action.

Au milieu d’une vaste et coûteuse restructuration pour garder de la profitabilité, dans cet environnement de taux très bas, sous le coup de milliards de dollars de sanctions dans divers litiges avec les régulateurs, et avec la panique déclenchée par le vote en faveur du Brexit en juin dernier, les baisses sont spectaculaires.

Les Français moins mal lotis

Avec une baisse de 43% depuis le début de l’année, les bonus vont être réduit de 590 millions de dollars chez Deutsche Bank. Et à -42% pour l’action, ceux du Credit Suisse passent littéralement à la moulinette: 1,2 milliard de dollars en moins. Les banquiers ne sont guère mieux lotis chez Barclays ou UBS.

Le bilan est un peu moins douloureux pour les cadres bénéficiaires du côté des grandes banques françaises, dont le recul est moins prononcé (-20% depuis le début de l’année), grâce à une exposition moins forte aux activité de marché. Mais il est clair que là aussi les bonus en seront d’autant réduits. On s’attend sur les marchés à la pire année en la matière depuis 2011.

Raisons structurelles

Du côté des grandes banques britanniques, touchées de plein fouet par les perspectives du Brexit, l’enveloppe sera réduite de 25% au moins, avec des suppressions pures et simples à certains postes précis.

La baisse du cours de bourse n’est pas la seule explication de cette cure d’austérité. Auparavant, les banques pouvaient accorder plus librement une part de leurs bénéfices ou de leur cash aux primes des salariés les plus méritants. Ce qui permettait parfois, malgré de mauvaises performances boursières ou fondamentales, de garder un niveau de bonus intéressant pour les banquiers.

Perte d’attractivité

Mais les nouvelles réglementations à l’échelon mondial concernant le secteur bancaire sont passées par là. "Depuis leur adoption", note Jon Terry, associé au cabinet Price Waterhouse Coopers, "les nouvelles règles bancaires lient de plus en plus le versement des bonus à la performance boursière et aux niveaux de bénéfices." D’où des enveloppes de moins en moins conséquentes.

Risque de se poser un nouveau problème structurel, s’il en était besoin, pour le secteur bancaire. Car après des coupes claires massives dans les effectifs (500.000 suppressions de postes dans l’ensemble de l’industrie selon Bloomberg), et une période de taux d’intérêt plancher ou négatifs qui constitue un casse-tête en termes de rentabilité, va se poser en plus un problème d’attractivité.

Un défi de plus

Comment séduire les nouveaux talents, alors que les bonus et les primes constituent l’essentiel de l’intérêt des métiers de la finance? "La valeur des primes devient de plus en plus volatile et fragile", observe Stéphane Rambossom, associé au cabinet de chasseurs de têtes DHR.

"Et ça devient une raison de plus pour certains candidats potentiels de se tenir à l’écart, car les carrières y sont pareillement volatiles, et financièrement moins intéressantes qu’avant", ajoute-t-il. Un défi vital de plus pour la finance internationale ces prochaines années.

Antoine Larigaudrie