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Comment la BCE pourrait couper le robinet à liquidités

La BCE semble commencer à réfléchir à un arrêt progressif de ses dispositifs de soutien au marché, pour normaliser les conditions de financement de l'économie.

La BCE semble commencer à réfléchir à un arrêt progressif de ses dispositifs de soutien au marché, pour normaliser les conditions de financement de l'économie. - AFP

Après deux années d’existence, le plan de rachat d’actifs de la BCE, le fameux Quantitative Easing est-il sur le point de s’achever? De toute évidence, Mario Draghi y réfléchit. Une option tiendrait la corde: la réduction progressive des montants injectés avant un arrêt total fin 2017.

Le fameux plan de soutien à l’économie européenne de la BCE est-il en train de vivre ses derniers mois? Au vu des révélations de l’agence Bloomberg et du Wall Street Journal, on serait tenté de le croire. Des responsables de la banque centrale sont en tout cas en train de plancher sur l’arrêt progressif du dispositif.

Pour mémoire, il s’agit d’un programme mensuel de rachats d’obligations par la BCE, d’un montant de 60 puis 80 milliards d’euros, consacré à la reprise d’obligations souveraines bien notées et de certains obligations d’entreprises privées. Initiative censée inciter les banques à les revendre, à les dégager de leur bilan, pour consacrer le produit au financement de l’économie, afin de créer de la demande et donc de l’inflation.

Tension sur les taux européens

Le dispositif, à l’origine imaginé pour durer jusqu’à ce mois-ci, a été étendu jusqu’en mars 2017. Et ces dernières révélations tendent à prouver que la BCE, à quelque mois près, n’ira pas beaucoup plus loin. Plusieurs responsables de la banque centrale ont indiqué que les achats d’actifs allaient être réduits mois après mois. De 10 milliards d’euros à chaque fois. L'objectif final étant de couper le robinet à liquidités avant la fin de l’année prochaine.

Un signal qui a tout de suite provoqué des tensions sur les taux des dettes d’État. Le bon du trésor allemand à 10 ans, reste certes négatif mais son équivalent français bon du trésor a vu son taux passer à 0.2%. Preuve que le marché réagit avec, pour le moment, circonspection et sang-froid.

Le marché désormais prêt?

Deux raisons à cette absence d'affolement. D'abord, ces "rumeurs" relayées par la presse sont sans doute distillées à dessein pour préparer les esprits, et surtout pour faire en sorte que les anticipations de marché, qui ont des conséquences sur les conditions de financement, collent au plus près du cap fixé par la BCE. Ensuite, le marché semble prêt à accepter un resserrement des conditions de marché, restées archi-accommodantes depuis des années. Les investisseurs et l’ensemble de la communauté économique sont en train de constater que l’Open Bar organisé par les banques centrales commence à provoquer des déséquilibres très contre-productifs.

Sentiment de stabilisation

Avec en premier lieu les difficultés actuelles du secteur bancaire, incapable de maintenir sa rentabilité et sa capacité à faire son métier correctement dans cet univers de taux proche de zéro voire négatifs. Et partout, il semble qu’un consensus semble aller vers une stabilisation de l’action des banques centrales.

Aussi bien du côté de la Banque du Japon, qui opte pour de nouvelles solutions de pilotage des taux, que de la BCE qui souhaite s’en tenir à ses mesures actuelles pour le moment. Sans compter la Fed qui attend toujours le bon timing pour remonter, elle, ses taux directeurs. Même les banques commerciales en France commencent à mettre un terme à la guerre des taux pour les prêts immobiliers, les observateurs notant qu’on arrive partout à un plancher.

Hausse des monnaies, chute de l’or

Dans ce contexte relativement nouveau, la BCE fait son travail d’anticipation et semble avoir décidé de préparer le terrain pour une extinction progressive de son programme de QE. De quoi faire remonter les anticipations de taux et ainsi accompagner un retour à la normale des conditions de marché, que finalement l’ensemble de la communauté financière souhaite à terme, car elle aurait un effet vertueux, et scellerait enfin une véritable amélioration économique qui tarde encore à se matérialiser.

Cela lèverait une grande part des incertitudes planant encore sur le mode de fonctionnement actuel des grandes économies développées, qui doivent pouvoir fonctionner sans assistance respiratoire. En témoigne la belle hausse du dollar, au plus haut depuis deux mois, imité par l’euro. Mais aussi, la très forte baisse de l’or: 30 dollars de perdus en 24 heures pour l'once d'or qui ne vaut plus que 1.270 dollars.

Antoine Larigaudrie