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L'histoire tragique d'un étudiant qui plonge le "Google chinois" dans la tourmente

Désormais sous étroite surveillance, Baidu pourrait devoir affronter bientôt l'entrée forcée de l'Etat à son capital, après son implication un nouveau scandale dans le domaine de la santé

Désormais sous étroite surveillance, Baidu pourrait devoir affronter bientôt l'entrée forcée de l'Etat à son capital, après son implication un nouveau scandale dans le domaine de la santé - Liu Jin - AFP

"Passe difficile pour le moteur de recherche Baidu: le gouvernement de Pékin réfléchit à une entrée à son capital pour mieux contrôler certaines dérives commerciales, après un nouveau scandale de santé retentissant."

Baidu est-il responsable ou complice du décès d’un étudiant chinois le mois dernier? C’est ce qu’essaye de déterminer le gouvernement chinois, qui souhaite désormais mieux contrôler certaines pratiques du moteur de recherche, après un scandale qui agite les réseaux sociaux et la presse du pays. Le titre côté au Nasdaq perd quasiment 10% en une semaine.

Il y a quelques mois, Wei Zexi, un étudiant de 21 ans, apprend qu’il est atteint d’une forme rare de cancer, difficilement curable. Sans solution de traitement à proximité de chez lui, il tente d’entrer en contact avec un hôpital qui sera en mesure de le prendre en charge.

Hôpital réputé "de pointe" 

Il se met en quête d’un établissement via une recherche sur Baidu, qui lui fournit ses résultats. Il va contacter le premier hôpital désigné par le moteur de recherche, et tombe effectivement sur une équipe médicale qui, lui assure-t-on, est compétente pour le soigner.

Rattaché aux services de sécurité, police et armée chinoise, l’établissement se targue d’être l’établissement de pointe dans le domaine de la recherche en oncologie.

Traitement coûteux et inefficace

L’hôpital est privé, et les frais de traitement son très élevés, 200.000 yuans, l’équivalent de 27.000 euros. L’étudiant décide toutefois de payer pour être soigné correctement.

Mais l’intéressé, qui va raconter son histoire sur un forum de discussion locale, va se rendre compte qu’il a été dupé: le traitement, expérimental, se révèle inefficient, et l’équipe médicale visiblement peu compétente.

Pire: il accuse l’établissement d’avoir acheté directement à la régie publicitaire de Baidu sa place de leader dans les résultats de recherche. Et malheureusement, après quelques semaines, il décède des suites de sa maladie. Depuis, l’affaire provoque la fureur de l’opinion publique, et surtout les foudres du gouvernement de Pékin, d’une rare violence vis-à-vis du géant de l’internet.

"Baidu a fait preuve d’un manque d’attention inacceptable concernant la crédibilité de ses annonceurs", déclare le journal d’Etat Global Times, avant d’ajouter: "Le groupe doit recevoir un traitement disciplinaire pour ses activités sans scrupules, auxquelles l’a mené se cupidité et sa soif de profits".

Déclarations sans équivoque qui ont précédé de peu l’ouverture d’une enquête formelle pour vérifier les faits, et la convocation du directeur général de Baidu devant les autorités de régulations chinoises.

Possible entrée au capital

Le gouvernement qui, du coup, étudie la possibilité d’entrer au capital de Baidu, et d’exiger d’avoir un représentant au conseil pour surveiller au plus près les activités d’annonces ciblées, de manière à éviter tout comportement abusif.

Le moteur de recherche de son côté assure les autorités de sa pleine collaboration, et assure avoir déjà épuré dernièrement sa base de données, pour en chasser les annonces frauduleuses.

Baidu déjà sanctionné

Mais la méfiance des autorités est d’autant plus forte que Baidu a déjà eu des problèmes avec sa conception de la pub en ligne, et que c’est la deuxième fois en quelques mois que le groupe est pris en flagrant délit sur le même genre de dossier.

En janvier dernier, le moteur de recherche avait déjà été critiqué pour avoir fait paraître dans certains forums de discussion internet, des messages de promotions de traitements médicaux, sans avertir qu’il s’agissait de contenus publicitaires.

Antoine Larigaudrie