BFM Patrimoine
Placements

Brexit: les salariés de la City partagés entre rage et angoisse

Les traders de la City, qui s'étaient préparé à une nuit blanche face à toute éventualité, n'ont pas été déçus.

Les traders de la City, qui s'étaient préparé à une nuit blanche face à toute éventualité, n'ont pas été déçus. - AFP - Léon Neal

"Désastre", "folie", "traumatisant"... Ce vendredi matin, les employés du quartier financier de Londres ne décoléraient pas contre les électeurs britanniques qui ont décidé de sortir leur pays de l'Union européenne.

"C'est un putain de désastre!". David, un employé de la City, maudit les Britanniques qui ont voté pour quitter l'Union européenne, plongeant la place financière de Londres dans la tourmente.

Leurs patrons avaient prévenu avant le référendum que la City avait beaucoup à perdre en cas de départ du Royaume Uni de l'Union européenne. Non seulement du fait de la tempête financière généré par le Brexit, mais, à plus long terme, parce que les banques britanniques risquent de perdre un certain nombre de droits d'accès au marché européen de la finance.

"C'est un désastre absolu. Le majorité des Britanniques n'avaient aucune idée de ce pour quoi ils votaient. Maintenant tous ceux qui ont une maison, une retraite ou qui prévoyaient de partir en vacances à l'étranger sont beaucoup plus pauvres", peste David, un employé de la City âgé d'une quarantaine d'années.

Nuit blanche et café noir

La livre sterling a plongé de près de 12% face au dollar et de 8% face à l'euro après les premières informations faisant état d'une victoire du Brexit. La Bourse de Londres chutait pour sa part de plus de 7% dans les premiers échanges vendredi matin. 

Les traders de la City et de Canary Wharf, l'autre quartier d'affaires plus moderne de Londres, qui s'étaient préparé à une nuit blanche face à toute éventualité, n'ont pas été déçus. En costume ou parfois simplement en jean et baskets, ils ont passé la nuit devant leur écran géant, à hurler des ordres de ventes au téléphone, tenant le coup à grand renfort de café noir.

"C'est la folie ici, c'est un bain de sang, un carnage", raconte à l'AFP David Papier, 34 ans, chef d'une salle de marché chez ETX Capital, qui reconnaît toutefois une forme d'"excitation" à vivre "un moment historique".

Le marché avait dans l'ensemble anticipé un maintien du Royaume-Uni dans l'UE, aussi les employés rencontrés vendredi matin avaient-ils la gueule de bois. "C'est une très très mauvaise nouvelle", expliquait Mike Thomson, un employé d'une cinquantaine d'années rencontré dans les rues encore peu fréquentées des premières heures de la journée. "Un grand bazar va ressortir de tout ça, je suis très inquiet. En plus l'Écosse pourrait maintenant prendre son indépendance dans les deux ans", a-t-il ajouté.

Au petit matin, la plupart des travailleurs du quartier d'affaires étaient pressés d'aller au bureau où les attendaient une très longue journée, plusieurs d'entre eux répondant simplement "Pardon, pas le temps !" aux sollicitations.

"C'est bizarre, traumatisant"

Wendy, une avocate, prend toutefois une minute pour confier son inquiétude en s'extirpant d'un "black cab", les traditionnels grands taxis noirs qui sillonnent les rues londoniennes. "Il va y avoir certains dommages financiers auxquels les gens ne sont pas préparés. Les services financiers mènent l'économie de Londres et l'économie de Londres mène l'économie britannique donc malheureusement cela va affecter tout le monde", craint-elle. Elle redoute aussi que Bruxelles veuille faire "payer le prix" de sa sécession au Royaume-Uni.

Un sentiment de vertige prévalait aussi, comme si l'on espérait sortir d'un mauvais rêve. "C'est bizarre, traumatisant. C'est dingue de se réveiller avec ça. Ca soulève plein de questions sur l'Écosse et l'économie", glisse Philip, un employé quadragénaire d'un cabinet juridique. "On ne sait pas ce qui va se passer lors des dix ans à venir".

Et, au-delà, la City pourrait perdre jusqu'à 40.000 emplois selon le cabinet KBW, 

A.R. avec AFP