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Pourquoi l’Euro résiste à la crise grecque ?

L'Euro signe sur le 2ème trimestre 2015 sa meilleure performance en 4 ans face au billet vert.

L'Euro signe sur le 2ème trimestre 2015 sa meilleure performance en 4 ans face au billet vert. - Philippe Huguen - AFP

La zone euro, déjà sous le coup d’un programme d’aide massif de la Banque Centrale Européenne, est désormais entrée dans une partie des plus délicates de la crise de la dette grecque. Ce qui n’empêche pourtant pas l’euro de réaliser une performance hors du commun sur le 2e trimestre.

+4% par rapport au dollar! L’euro signe contre la devise américaine sa meilleure performance trimestrielle en quatre ans. Une résilience impressionnante de la monnaie unique, pourtant au centre de la zone monétaire la plus instable du moment. Car il ne faut pas oublier que la zone euro reste sur béquilles et sous perfusion.

La BCE continue de soutenir le marché et le système financier européen via son système de quantitative easing, à savoir des rachats aux banques d’emprunts d’Etat. 60 milliards d’euros tous les mois, et même un peu plus ces prochaines semaines, les gouverneurs souhaitant éviter tout problème de liquidité du marché face à des volumes d’été traditionnellement faibles.

La BCE, garante de la stabilité de l’Euro

Cela permet aux banques de retirer les obligations de leur bilan, d’avoir du risque en moins, et de pouvoir en prendre plus en accordant des crédits de nature à stimuler l’activité de crédit en cherchant des rendements attractifs. La BCE espère ainsi générer, du côté des emprunteurs, davantage de volonté d’investir, davantage de demande de manière générale, et, in fine, plus d’inflation.

Mais voilà, la Banque centrale est aussi là pour garantir la stabilité du système financier européen. Et quand on est à pied d’œuvre au milieu de la crise grecque, et qu’on est le dernier recours pour alimenter en liquidités, la tâche devient forcément plus compliquée.

Circuits de financement

La BCE gère en particulier le système ELA, qui octroie des fonds directement aux banques d’un pays en difficulté pour éviter une rupture en règle de l’ensemble du système financier, comme ce fut le cas en 2008 pendant la crise consécutive à la faillite de Lehman Brothers. Ce programme ELA est en particulier celui qui permet aux banques grecques de survivre. Programme ELA qui pour l’instant est maintenu en l’état, malgré la fermeture du système bancaire grec, exception faite de la distribution des pensions de retraite.

Ces circuits de financement, un instrument parmi les très nombreux que contient la boîte à outil de la BCE, est d’autant plus important dans un contexte de contrôle des capitaux, comme c’est le cas en Grèce, pour trouver le bon équilibre entre besoin de cash et maintien d’un niveau de solvabilité acceptable dans un contexte hautement instable.

Un coup de chapeau à Mario Draghi

Malgré ces menaces d’un poids colossal, l’euro reste stable et ferme face au dollar, autour de 1,11/1,22 dollar, et des bandes d’évolution très minces qui montrent que la monnaie unique bénéficie d’un soutien entier des marchés, d’un point de vue fondamental, mais aussi d’une vraie conviction, d’un vrai sentiment de marché positif.

Le signe d'une confiance entière accordée à Mario Draghi, stratège de plus en plus convaincant en matière de mécanique monétaire. Grâce à un travail technique sophistiqué, il a réussi à tenir son pari, malgré plusieurs phases de crise des dettes souveraines et de crise grecque spécifique, à savoir mettre tout en œuvre pour soutenir l’euro et maintenir la cohésion de la zone.

Les hésitations américaines

Autre aspect qui joue: l’équilibre des risques qui pèsent d'un côté sur la zone euro et de l'autre sur l'Amérique du Nord. L'Europe est encore très instable certes. Mais la volatilité des indicateurs de reprise aux Etats-Unis persiste. La Réserve Fédérale a bien prévu de relever ses taux, mais elle va devoir tenir compte de l’ensemble de ces catalyseurs, et peut-être adopter un rythme un peu plus lent pour durcir sa politique monétaire. Sans compter un autre facteur technique de court terme: la Banque Nationale Suisse intervient ponctuellement sur les marchés en ce moment pour tenter d'endiguer la montée du franc. Et pour ce faire, elle achète des euros... 

Un équilibre des forces qui, une nouvelle fois, va un peu à l’encontre de ce que prévoyaient les marchés à la fin de l’année dernière, mais qui permettent à l’Euro de trouver des niveaux d’équilibre et de robustesse satisfaisants. Même si les grands exportateurs et industriels feront grise mine tant que la situation perdurera.

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Antoine Larigaudrie