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Pourquoi la bourse s’acharne à ce point sur Volkswagen?

Après deux journées noires, le titre Volkswagen à Francfort a perdu le tiers de sa capitalisation boursière, après révélation du scandale des trucages tes tests antipollution.

Après deux journées noires, le titre Volkswagen à Francfort a perdu le tiers de sa capitalisation boursière, après révélation du scandale des trucages tes tests antipollution. - Daniel Roland - AFP

Le constructeur automobile allemand perd plus d’un tiers de sa capitalisation boursière en 3 jours. Une sanction extrêmement lourde pour Volkswagen, mais qui rappelle à quel point l’automobile reste un secteur capital pour l’ensemble de l’économie mondiale.

Certes l’automobile représente une industrie complexe et imposante, et fait souvent moins rêver que les géants macro-économiques de la high-tech mondiale, comme Apple, Facebook ou Amazon. Mais précisément ce scandale Volkswagen a au moins le mérite de rappeler l’importance stratégique et cruciale de ce secteur.

Si la sanction boursière autour de Volkswagen est aussi forte, c’est que pour l’instant personne n’est en mesure de déterminer ce que risque financièrement le groupe, et pas plus d’indication sur l’impact industriel et conjoncturel que ça va avoir. En ça, le marché navigue totalement à vue.

L’ombre du soupçon sur tout le secteur

Mais dans le sillage, il est évident que l’ensemble des constructeurs européens allaient être touchés par la même forte correction boursière, surtout après une année et demie de forte progression boursière.

Tout le monde est désormais soupçonné de tricheries similaires, et même les déclarations fortes des autres constructeurs en matière de transparence ne peuvent dissiper les doutes à court terme. Elles ont même tendance à aggraver la situation dans un premier temps.

Les équipementiers touchés

L’industrie automobile, avant même d’être un secteur qui produira bientôt 100 millions de véhicules par an, est un eco-système d’importance macro-économique.

Car juste derrière eux on se retrouve avec des sous-traitants de taille souvent très importante, les spécialistes des pièces spécifiques, des éléments de carrosserie, de l’aménagement intérieur, des pneus… C’est le grand segment des équipementiers, représenté en France par Faurecia, Valeo, Plastic Omnium, Michelin, et des acteurs de taille plus réduite comme MGI Coutier ou Montupet.

Métallurgie, électronique…

Mais derrière, l’automobile, c’est très concrètement de l’acier, de l’aluminium, de l’inox, des matériaux composites, des plastiques… c’est pourquoi la tourmente boursière de ces derniers jours a aussi emporté les grands noms de la métallurgie, comme Arcelor Mittal, Aperam et autres. Sans compter qu’on a assisté à une vraie pression sur les grands groupes miniers, grands fournisseurs des minerais de base. Autre grand secteur mis à mal, l’électronique.

Elle prend une part croissante dans la conception des automobiles via les systèmes de sécurité, de gestion et de paramétrage du moteur, tout le côté divertissement multimédia embarqué, l’instrumentation… Sans même compter la montée en puissance de la voiture connectée. Tout ceci fait tanguer et à juste titre, des groupes comme STMicroelectronics, un des principaux fournisseurs de composants à l’industrie auto.

… jusqu’au secteur bancaire!

Si on veut aller plus loin, il est évident que de tels dégagements boursiers vont aussi avoir des conséquences sérieuses sur l’ensemble des prêteurs à l’industrie automobile, le secteur bancaire dans son ensemble.

Secteur qui en plus est partie prenante dans les systèmes de financement de véhicules professionnels ou aux particuliers. Peugeot dernièrement avec la banque espagnole Santander venait à peine de relancer la titrisation des prêts automobiles…

Une hypothèque parmi les plus lourdes du moment

Enfin un autre secteur qui pourrait en pâtir, la publicité : l’automobile fait partie des budgets les plus importants pour les acteurs du secteur, avec la high-tech, la distribution et les vins et spiritueux.

Bref on là de quoi mettre en véritable danger à moyen terme un eco-système qui brasse plusieurs milliers de milliards d’euros par an. Si la crise n’est pas rapidement stoppée, cela aura un impact négatif durable sur les indices, de nature à faire passer au second plan les problématiques de banques centrales, les inquiétudes sur la Chine ou la croissance mondiale en général.

Un quart du CAC40 touché

Car si on fait le compte des secteurs et des titres touchés directement ou indirectement par le scandale Volkswagen, c’est déjà au moins 10 entreprises du CAC40 qui sont atteintes.

Mais en filigrane de cette onde de choc industrielle et boursière, il est question de confiance. Et là on touche à un point crucial pour les marchés. L’histoire a montré à différentes reprises que c’est le capital à la fois le plus fragile et le plus précieux, avant même une capitalisation ou une valorisation boursière.

Quand la confiance est brisée

Le secteur bancaire a dû faire face à cette défiance après la crise des sub-primes et la crise bancaire de 2008, après la faillite de Lehman Brothers. Beaucoup ayant menti sur leur situation ou leur exposition à tel ou tel risque, pendant une période prolongée, plus personne ne leur faisait confiance. Perte de confiance qui a en plus touché les acteurs du secteur eux-mêmes, tout le monde se méfiant de tout le monde !

Ce qui a provoqué pendant des semaines un grippage persistant du circuit de financement mondial, grippage qui n’a réussi à être surmonté que par l’action concertée des banques centrales… qui dure encore et qui n’a même jamais été aussi forte !

Le marché ne pardonne pas

Là il s’agit d’une vraie problématique industrielle, il est question de mensonges et de trucages délibérés en vue de profits.

Et quand une entreprise parmi les plus importantes de son secteur, aussi réputée que Volkswagen, se livre à ces pratiques alors qu’elle a justement fait grand cas du développement des technologies automobiles propres, la confiance est totalement brisée. Et ça le marché ne le pardonne jamais.

Antoine Larigaudrie