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Quand l’État-actionnaire multiplie les déboires

Avec 38% de baisse en 5 mois, EDF est le principal responsable de la forte dégradation du portefeuille de l’Agence des Participations de l’État sur la période.

Avec 38% de baisse en 5 mois, EDF est le principal responsable de la forte dégradation du portefeuille de l’Agence des Participations de l’État sur la période. - Eric Piermont - AFP

Après un exercice 2014-2015 déjà difficile, le bilan de l’Agence des Participations de l’État (APE) s’annonce d’ores et déjà mauvais pour l’exercice en cours. En 5 mois, le capital de l’agence a encore fondu de plus de 13%.

-13,2% alors que le CAC40 n’aura perdu que 2% dans le même temps! Le bilan périodique de l’Agence des Participations de l’État s’annonce encore particulièrement négatif pour cette année (exercice décalé 2015-2016 se terminant au 30 avril).

Sur l’ensemble des actions détenues par l’agence, c’est donc un total d'un peu plus de 16 milliards d'euros de capitalisation qui s’est envolé en quelques mois, sur un portefeuille évalué à peu près à 70 milliards d’euros désormais.

Le poids de l’énergie

Si on regarde dans le détail, le bilan est extrêmement contrasté. Sur les 13 gros blocs d'actions détenus par l'agence, 7 signent des performances négatives. Certes la tourmente boursière de l’été est passée par là. Mais elle n’explique pas tout.

C’est en effet le secteur de l’énergie qui pose problème. Complexité du processus de fixation des tarifs, gros endettement, gros investissements, contraintes réglementaires… le secteur est en berne depuis plusieurs années, et peine à fournir de la performance boursière pure. La priorité est donnée au rendement, aux dividendes fournis à l’État.

EDF mauvais élève

Le fait qu’EDF signe la plus mauvaise performance n’est donc pas une surprise, mais le groupe pèse lourd dans ce médiocre bilan. Le titre EDF sur les 5 derniers mois perd en effet 38%, avec en plus l’impact des incertitudes liées à la gestion de l’alliance avec Areva.

Et EDF pèse très lourd dans le portefeuille de l’État, vu que l’agence dispose d’un peu plus de 80% du capital du groupe.

Engie et Renault, dossiers chauds

Mêmes considérations autour d’Engie, l’ancien GDF Suez. La perte est bien moins spectaculaire, -9% sur la même période, mais là aussi cela pèse lourd sur le bilan de l’agence, qui en possède 34%.

L'APE peut compter sur quelques investissements plus stables. Renault progresse d’un peu plus de 1% sur 5 mois, avec toutes les spéculations autour du rôle de l’État et de la guerre des pouvoirs avec Nissan au sein de l’alliance autour des droits de vote.

Safran: performances honorables

Il y a également ADP, Aéroport de Paris, qui reste un investissement relativement stable, avec une baisse de 0,5%, malgré une prime de risque géopolitique en hausse.

À noter aussi, la performance honorable du motoriste aéronautique Safran, +4,5%, Safran dont l’État vient précisément de vendre 2,6% du capital pour 750 millions d’euros, mais dont il reste largement actionnaire majeur à 15,4% du capital et 23,9% des droits de vote.

Orange frappe encore fort

Et tout cela ne doit pas faire oublier quelques brillantes réussites, avec Thalès qui rend 29,5% sur 5 mois, et dont le cours devrait continuer à profiter ces prochains mois des tensions géopolitiques. Airbus signe aussi une hausse de 8,5%, sans compter une performance spectaculaire encore d’Orange, +69,2 !

Mais pas de quoi compenser les contre-performances du secteur de l'énergie. Du coup, la stratégie d'investisseur de long terme, doublé du poids du secteur énergétique dans son portefeuille, garantit que le contexte va rester difficile pendant des mois encore pour l'APE. Du moins en termes de performance pure.

Style d’investissement et maturité

Car tout est question de stratégie d’investissement. L’agence est avant tout l’investisseur de long terme, le garant du patrimoine capitalistique d’État. D’autres organes d’investissement nationaux se distinguent par une approche plus dynamique dans leur gestion.

Le meilleur exemple est donné par Bpifrance, qui vient d’annoncer sa sortie du capital de l’équipementier automobile Valeo. La banque publique d’investissement était entrée au capital en 2009 au beau milieu de la crise extrêmement sérieuse que connaissait le secteur automobile à l’époque.

Bpifrance: une stratégie proactive et gagnante 

À l'époque, Bpifrance était venu en soutien en prenant un peu plus de 5% du capital de Valeo. Le titre à ce moment-là tournait autour des 15-20 euros. Après des années de redressement en continu, cet investissement pour le coup vertueux est récompensé, puisque l’action cote désormais à 144 euros… ce qui donne environ 750% de gains pondérés!

Une bonne opération pour Bpifrance qui, en plus, a revendu l’essentiel de ses parts ces derniers mois sur les deux records historiques, hier et fin mai! Une stratégie plus dynamique, qui doit aussi rappeler que l’État-actionnaire signe aussi de bonnes affaires. Mais comme pour n’importe quel investisseur boursier, tout dépend de la stratégie et de la dynamique d’investissement.

Antoine Larigaudrie