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Quand la consommation américaine commence à caler

Les résultats de Gap, tout comme ceux de Macy's, semblent prouver que quelque chose ne tourne plus rond dans la tête du consommateur américain.

Les résultats de Gap, tout comme ceux de Macy's, semblent prouver que quelque chose ne tourne plus rond dans la tête du consommateur américain. - Justin Sullivan - Getty Images North American - AFP

"Malgré une hausse des ventes de détail au mois d’avril aux États-Unis, plusieurs signaux inquiétants à plus long terme commencent à émerger du côté des entreprises américaines."

Le consommateur américain, un des moteurs principaux de l’économie globale, est-il en train de caler? C'est la question que se posent de plus en plus d’économistes, alors que les statistiques en la matière restent pourtant relativement bien orientées, pour l’instant.

Même si, comme beaucoup de chiffres officiels américains, la consommation des ménages est volatile d’un mois sur l’autre, elle reste sur une tendance positive. Après un recul de 0,3% en mars, les ventes de détail ont même signé un bond significatif, +1,3%. Un plus haut d’un an.

Signaux inquiétants chez les détaillants

Mais malgré tout, plusieurs alertes font dire aux observateurs de marché que sur le terrain, quelque chose cloche. Et les signaux viennent des entreprises elles-mêmes.

Le mois de mai a commencé avec les mauvais résultats et perspectives de Macy’s, la fameuse chaîne d’habillement new-yorkaise, la 2ème du pays avec un chiffre d’affaires de 24 milliards de dollars par an.

Gap dans la tourmente

Avec cinq trimestres consécutifs de baisse des ventes, et des bénéfices en baisse de 40%, le signal était jugé comme très mauvais par les analystes et économistes, qui y voient l’effet d’un dollar trop fort, et de la baisse d’achats touristiques.

Signaux amplifiés par les résultats peu encourageants d’une autre grande enseigne, très regardée elle aussi, Gap. 47% de recul sur un an pour les résultats, et des prévisions de résultats qui ne seront tenues qu’avec la fermeture de 75 magasins à travers le monde.

Le naufrage d’Aéropostale

Le groupe doit subir les mêmes déconvenues, mais la situation est rendue difficile par une base de coûts fixes très importante, notamment des achats immobiliers de surface en propre, et une perte de vitesse constante de la marque, une gamme de prix jugée désormais peu compétitive au regard de la qualité.

Mais le coup de froid est venu d’un autre grand nom du textile aux États-Unis, Aéropostale. Peu connue à l’étranger, la marque constitue justement un baromètre intéressant de la consommation intérieure dans le pays.

Les généralistes résistent

Et après des mois voire des années de ventes en baisse, Aéropostale a dû se déclarer en cessation de paiement, placé sous la protection du chapitre 11 de la loi américaine sur les faillites. Un vrai symbole qui en inquiète beaucoup.

Les deux seuls signes positifs du point de vue des entreprises sont venus des supermarchés Walmart, et de Home Depot, le spécialiste du bricolage. Les deux publications du 1er trimestre étaient supérieures aux attentes, et ont été bien accueillies au sein d’un secteur décidément très compliqué ces derniers mois.

L’"Uberisation" de l’emploi en cause?

Ce qui clarifie le paysage pour les observateurs: les Américains sont toujours au rendez-vous sur les dépenses essentielles et prioritaires, mais sont désormais bien plus frileux lorsqu’il s’agit de se faire plaisir.

Et une majorité d’économistes y voit une traduction dans les chiffres d’une reprise économique américaine certes robuste, avec un marché de l’emploi sur un rythme de croissance élevé, mais qui s’alimente de plus en plus d’emplois beaucoup moins stables qu’auparavant. En clair, l’"Uberisation" du marché américain de l’emploi commence à peser sur les données de consommation.

Transformations à venir

Un facteur qui, combiné à une tendance haussière du dollar impulsée par la FED, risque de peser encore longtemps sur les grandes enseignes. Avec peut-être des conséquences en matière de prix, qui pèseront d’autant plus sur la rentabilité.

La distribution américaine va sans doute devoir s’adapter à cette nouvelle donne, et le secteur, selon les analystes, pourrait être le théâtre de bouleversements importants à surveiller de très près, puisque la consommation américaine reste une donnée capitale pour l’économie mondiale.

Antoine Larigaudrie