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Quand Wall Street n’arrive pas à calmer ses excès

Malgré l'activation de la "Règle 48", la Bourse de New York a bien du mal a calmer les turbulences boursières du moment, alimentant un vif débat chez les traders.

Malgré l'activation de la "Règle 48", la Bourse de New York a bien du mal a calmer les turbulences boursières du moment, alimentant un vif débat chez les traders. - Mario Tama - Getty Images North America - AFP

Pour la 4ème fois en quelques jours, la Bourse de New York a activé hier la "Règle 48", un dispositif censé éviter des mouvements trop brutaux sur les marchés actions. Sans succès. Du coup, les investisseurs se demandent si ce genre de dispositif n’est pas plus contre-productif qu’autre chose.

Moins 3% pour les principaux indices et un indice VIX, baromètre de la volatilité, qui repasse le cap des 30 points, signe de marché sensiblement instable. Il est clair que le New York Stock Exchange commence à avoir toutes les peines du monde à ramener le calme, face à une tourmente boursière qui s’amplifie.

Hier, pour la 4ème fois en un peu plus d’une semaine, elle a activé le dispositif de la "Règle 48". Un procédé utilisable à discrétion, au sein de l’arsenal dont dispose le NYSE pour répondre aux situations d’urgence, permettant d’interrompre la diffusion des prix des actions avant l’ouverture officielle de la séance.

Eviter des débuts de séance agités

Ces cours diffusés en avance permettent aux traders d’anticiper les cours d’ouverture et de prendre des dispositions en fonction, avec des ordres d’achat ou de vente lancés dès l’ouverture. En cas de marché turbulent, cela occasionne souvent des débuts de séance très mouvementés.

Grâce à cette décision, la Bourse de New York espérait ramener un peu de calme. Peine perdue. Craintes autour de la Chine, incertitudes quant à la politique de taux de la FED, tous les prétextes ont été bons pour vendre en masse encore hier, avec à la clé une baisse de près de 3% pour l’ensemble des indices.

Une volatilité toujours plus forte

Plus préoccupant, la forte hausse des indicateurs de volatilité, qui mesurent les écarts de cours et par conséquent "l’état de stress" des marchés. Il est remonté au-delà des 30 points hier, niveau qui témoigne d’une nervosité sensible, à peu près équivalent à celui enregistré pendant la crise des dettes souveraines européennes en 2011.

On est encore loin des près de 90 points atteints lors de la faillite de Lehman Brothers en 2008, mais il est clair qu’on est sur un marché qui témoigne, par le biais de ces indices, d’une grande fragilité et d’une tendance à la panique.

Efficacité en question

Du coup à Wall Street, cette "Règle 48" est au centre d’un vrai débat. Serait-elle finalement plus contre-productive que réellement utile pour anticiper ou mieux encaisser les chocs de marché ?

Déjà, interrompre la diffusion des prix en avant-marché n’est pas très efficace fondamentalement, les investisseurs pouvant consulter le même type de données du côté des plates-formes alternatives, BATS, Chi-X, et même chez les courtiers professionnels ou les banques d’affaires.

Arsenal préventif

Ensuite la mise en place de mesures d’urgence… à tendance à matérialiser les situations d’urgence ! Le dispositif préventif du NYSE peut en effet être renforcé par d’autres mesures, comme celle des "freins" aux cotations.

Quand un mouvement de forte baisse est enclenché sur le marché et que les indices perdent plusieurs centaines de points d’un coup, le NYSE peut décider de ralentir la cadence d’exécution des ordres, de manière à atténuer une tendance baissière trop forte.

Un remède pire que le mal ?

Mais si on regarde l’ensemble de ce genre d’outils dont dispose la bourse de New York, leur mise en place, et parallèlement la capacité de réaction des marchés, on se rend compte rapidement que sur ces dernières semaines les conséquences sont négatives en définitive.

Le déclenchement de ces mesures d’urgence accroît donc l’atmosphère de panique chez les investisseurs. Et du coup ils redoublent de prudence, en se protégeant contre les turbulences en achetant en masse des instruments de couverture contre la volatilité, en premier lieu le fameux indice VIX.

Stratégies en vogue

Du coup, la volatilité en elle-même redouble, et les mouvements de marché sont finalement encore plus violents. Phénomène amplifié par le trading à haute fréquence, ainsi que certaines stratégies de marché actuelles qui consistent à jouer coûte que coûte sur une hausse de la volatilité.

Un jeu dangereux mais très lucratif, que le NYSE rend encore plus intéressant à son corps défendant, en tentant de remédier à l’instabilité chronique des marchés en ce moment.

Antoine Larigaudrie