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Un trader a gagné des millions grâce à des malades en phase terminale

Donald Lathen proposait un marché à des patients en fin de vie (image d'illustration)

Donald Lathen proposait un marché à des patients en fin de vie (image d'illustration) - John Moore - Getty Images - AFP

Le gendarme américain de la Bourse a ouvert une enquête pour fraude contre un gérant de hedge fund qui a empoché 9,5 millions de dollars en démarchant des malades proches de la mort pour les utiliser comme prête-noms.

Certains ne reculent devant rien pour gagner facilement des millions. En témoigne cette histoire sordide révélée par la Securities and Exchange Comission (SEC), le gendarme de la Bourse aux États-Unis. L'autorité américaine a ainsi ouvert des poursuites contre un gérant de hedge fund, ces fonds recourant à des stratégies risquées lorsqu'ils spéculent sur les marchés. Donald Lathen, un New Yorkais de 48 ans a, en effet gagné pas moins de 9,5 millions de dollars en mettant au point un montage impliquant des personnes qui se savaient en fin de vie.

Selon l'enquête de la SEC, Donald Lathen s'était constitué un réseau d'informateurs dans le milieu hospitalier. Grâce à des infirmières travaillant dans différents établissements, il repérait les patients qui n'avaient plus que six mois à vivre. Le trader rencontrait ensuite les malades en phase terminale. Il leur proposait alors un marché "gagnant-gagnant", devenir co-signataires d'un compte d'obligations. Les malades devaient ainsi apposer leur nom à celui de Lathen. En échange, ce dernier leur versait 10.000 dollars et leur promettait "un programme d'assistance financière pour la fin de leur vie" via la société EndCare, qu'il avait fondée en 2009 et qui lui servait "d'outil marketing", note la SEC.

Clauses de décès

Entre 2011 et 2015, Donald Lathen recrute pas moins de 60 malades en phase terminale avec qui il ouvre des comptes joints d'investissements sur les marchés.

Le trader va alors user de ses connaissances très poussées en finance. Il achète des obligations ayant une clause de décès dite "death put". En clair, celle-ci permet la revente de ce titre à l'émetteur à son prix d'origine si l'investisseur décède.

Lathen achetait ces obligations sur le marché secondaire à un prix cassé, et faisait une plus-value lorsque l'un des malades dont il se servait de prête-nom décédait. Il suffisait au trader d’envoyer une lettre à l'émetteur de l'obligation et de lui expliquer qu'en tant que co-déteneur du compte (et donc du titre) il souhaitait exercer la clause de décès de son associé. L'émetteur n'avait alors d'autres choix que de payer l’obligation au prix initial (bien plus élevé que celui auquel elle avait été achetée) permettant à Lathen de gagner à tout coup une confortable plus-value.

Une faille dans la ruse

Sauf que la ruse de Donald Lathen avait une faille. Le trader achetait les obligations non pas en son nom propre mais via son hedge fund Eden Arc Capital Management, qui a ainsi acquis ces titres durant près de cinq ans. Les titres étaient ensuite mis sur le compte commun de Lathen et du malade. Cette stratégie a permis à Lathen de faire le fanfaron avec son fonds dont la rentabilité a atteint 75% entre mai 2011 et septembre 2015, selon Reuters.

Mais du coup la SEC lui reproche à juste titre d'avoir menti en écrivant la lettre aux émetteurs, puisque le vrai propriétaire du titre était le hedge funds. Le gendarme de la Bourse estime que non seulement David Lathen a floué les émetteurs d'obligations mais aussi les clients de son hedge fund qui lui faisait confiance en plaçant leur argent.

Évidemment, les avocats de Donald Lathem ne sont pas du même avis." Nous sommes convaincus que sa stratégie d'investissement était complètement légitime et ne violait aucune loi, et nous sommes vigoureusement résolu à le défendre contre les accusations sans mérite de la SEC", ont-ils écrit, selon Bloomberg. Il leur faudra toutefois défendre quelqu'un qui a tout du coupable idéal. En effet, avant de devenir gérant de hedge fund, Donald Lathem travaillait chez…Lehman Brothers, la banque dont la faillite avait précipité la crise de 2008.