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Dialogue social: pourquoi les négociations ont-elles échoué?

Le patronat et les syndicats se retrouvaient au siège du Medef pour négocier. Les syndicats préfèrent se rendre en terrain neutre la prochaine fois.

Le patronat et les syndicats se retrouvaient au siège du Medef pour négocier. Les syndicats préfèrent se rendre en terrain neutre la prochaine fois. - Charles Platiau - Reuters

Patronats et syndicats ne sont pas parvenus à trouver un compromis lors de leur ultime séance de négociation sur la modernisation du dialogue social.

Le dialogue social au point mort. Malgré la pression du chef de l'Etat, syndicats et patronat se sont quittés sur un constat d'échec, jeudi 23 janvier. C'est désormais le gouvernement qui va reprendre la main sur le sujet. Plusieurs points ont bloqué côté syndicats, notamment la fusion des instances de représentation des salariés, voulue par le patronat, qui aurait mené à la disparition du Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT).

Un impact impossible à chiffrer

Plus globalement, l'éventuelle remise en question du rôle et du pouvoir des syndicats dans l'entreprise a inquiété les organisations syndicales. Elles estiment qu'elles auraient été perdantes. Elles redoutaient des milliers d'élus du personnel en moins, certaines ont même parlé de plan social syndical. Une crainte fondée? Il est difficile d'obtenir des chiffres. Même le Medef reconnaît qu'il est quasiment impossible de quantifier l'impact de son projet. Combien de réunions en moins ? Combien d'élus et d'heures de délégation - ces heures dévolues aux représentants sur leur temps de travail ? Tout dépendrait de la taille de l'entreprise et de son fonctionnement.

Mais les syndicats ont fait leurs propres calculs. Par exemple dans des petits établissements il n'y aurait plus eu de délégués du personnel. Les estimations de certains laissent présager la disparition de la moitié des effectifs! "Inacceptable", s'emportait jeudi Carole Couvert de la CFE-CGC sur BFM Business.

La méthode a gêné

C'était effectivement bien l'objectif du patronat qui avec ce projet demandait moins de réunions, moins d'interlocuteurs pour plus d'efficacité. Simplifier le millefeuille du dialogue social en entreprise, pourquoi pas. Mais pas question de brader le rôle des syndicats. Au-delà de la défense de l'intérêt des salariés, c'était bien de leur survie aussi dont il était question.

Pendant toute la négociation, les syndicats se sont également inquiétés du sort du CHSCT, qui devait devenir une simple commission, optionnelle de 50 à 300 salariés et obligatoire au-delà. La CFE-CGC a bataillé en vain pour que cette commission conserve la "personnalité morale" permettant de mener seule des actions en justice.

Le patronat voulait pouvoir assouplir le rythme des négociations obligatoires par accord. Par exemple, négocier sur les salaires tous les trois ans au lieu de chaque année. Tous les syndicats s'y opposaient.

La méthode, enfin, a gêné. Pour les syndicats, cette négociation a été l'une des pires. Négociation de nuit, discussions parallèles prenant le pas sur les séances collectives, textes remis sur table par le Medef, propositions alternatives écartées... la coupe est pleine. A l'instar du numéro un de FO Jean-Claude Mailly, plusieurs organisations ont réclamé que le patronat n'ait plus la plume et que les débats se déroulent en terrain "neutre", le Conseil économique et social (Cese) par exemple. "Force est aujourd'hui de constater que la méthode de négociation retenue aboutit finalement à un échec", a aussi noté la CGPME, qui "souscrit" à la demande de FO.

Alexandre Saubot, le négociateur Medef sur le dialogue social, était dans Good Morning Business ce vendredi. Il regrette qu'aucun accord n'ait été trouvé, ce qui donne la main au gouvernement pour imposer sa réforme. 

Isabelle Gollentz avec AFP