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Loi El Khomri: les concessions que Valls est prêt à faire

Le Premier ministre entame ce lundi sa consultation des partenaires sociaux pour amodier le projet de loi réformant le code du Travail. Deux grandes lignes pourraient bouger: le plafond des indemnités aux prud'hommes et la définition du licenciement économique.

Après avoir gagné du temps en repoussant de deux semaines la présentation en Conseil des ministres du projet de loi de réforme du code du Travail, Manuel Valls passe à la phase de consultation.

Le Premier ministre commence ce lundi 7 mars à recevoir les partenaires sociaux. À 10h00, la CGT, FO, la CFDT, la CFTC et la CGPME doivent lui faire part de leurs revendications et de leurs inquiétudes. Mardi, à 19h00 ce sera au tour du Medef.

Manuel Valls va devoir se livrer à un subtil jeu d'équilibriste en tentant de rallier à sa cause les syndicats réformistes (CFDT, CFE-CGC,Unsa) sans pour autant effrayer le patronat qui refuse que la mobilisation populaire contre la loi El Khomri soit un prétexte pour abandonner les principales mesures.

Comme il l'a lui-même indiqué au Journal du Dimanche, Manuel Valls pourrait ainsi changer certains aspects sur deux mesures: le plafonnement des indemnités prud'homales pour licenciement abusif, et la définition du licenciement économique. De quoi satisfaire la CFDT et la CFE-CGC, qui ont néanmoins d'autres doléances.

Le barème aux prud'hommes maintenu

Mais concrètement quelle marge de manœuvre peut actionner le Premier ministre? Sur les indemnités aux prud'hommes, il n'est pas question pour lui de supprimer le barème. C'est ce que nous indiquent à la fois un haut responsable patronal et un conseiller de l'Élysée. C'est l'un des points clés de la réforme. Et le gouvernement y est d'autant plus attaché qu'il avait déjà tenté de faire passer cette mesure dans la loi Macron avant qu'elle ne soit retoquée par le Conseil constitutionnel.

Supprimer cette mesure serait perçu comme un énorme recul. Une seule option est envisagée: relever le plafond, qui est actuellement de 15 mois de salaires pour les employés ayant plus de 20 ans d'ancienneté.

Changer de périmètre sur le licenciement économique

Le débat est plus ouvert sur la question des licenciements économiques. Un point auquel la CFDT est très attachée. La définition du licenciement économique et ses critères (baisse du chiffre d'affaires, pertes d'exploitation, etc…), tels que le prévoit le texte, retiennent uniquement comme périmètre la situation nationale. Le syndicat craint ainsi que les grands groupes européens organisent leurs pertes en France, tout en restant bénéficiaires à l'étranger, pour procéder à des licenciements économiques. La CFDT demande donc à ce que la mesure ne s'applique pas seulement à l'échelle nationale. Cela ne dénaturerait pas foncièrement la réforme, indique-t-on du côté de l'Élysée.

Enfin, selon les Échos, l'exécutif envisagerait également de revenir sur une autre mesure. À l'heure actuelle, le projet de loi permet aux PME de moins de 50 salariés de proposer unilatéralement le forfait-jour, dispositif qui permet de contourner les 35 heures en échange de davantage de RTT pour le salarié. Jusqu'à présent, il faut un accord collectif pour pouvoir mettre en place ce forfait. Or, les PME de moins de 50 salariés ont rarement des représentants syndicaux. Mais ce pouvoir unilatéral donné à l'employeur ne sied guère à la CFDT. Le gouvernement pourrait donc lui faire cette concession.

Reste que tout va encore dépendre des mobilisations des 9 et 31 mars. Tout peut très vite devenir explosif, admet-on au sein du gouvernement. Et, dans ce cas, les lignes pourraient encore bouger davantage.

Julien Marion et Caroline Morisseau