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Loi Travail: que reste-t-il du projet initial?

Manuel Valls a du faire modifier la version initiale du projet de loi Travail.

Manuel Valls a du faire modifier la version initiale du projet de loi Travail. - Thomas Samson - AFP

"Le projet de loi de réforme du droit du travail va entamer mardi son marathon parlementaire, avec un premier passage à l'Assemblée. Sous la pression, le gouvernement a largement revu sa copie. Voici les principaux points de la nouvelle mouture."

Le très controversé projet de loi El Khomri va aborder à l'Assemblée, mardi 3 mai, son difficile parcours parlementaire. Le tout dans un contexte relativement hostile puisque outre la contestation lycéenne, étudiante et syndicale, il devrait manquer une quarantaine de voix au PS pour faire adopter le texte en l'état. Pourtant, celui-ci a largement été remanié. 

Voici les principaux points du projet de réforme du droit du travail, censé être une première étape d'une refondation du code du travail dans les deux ans.

Temps de travail

Le projet accorde plus de place à l'accord d'entreprise, qui peut prévaloir sur l'accord de branche. Ainsi seront possibles par simple accord d'entreprise:

> Une journée de travail de 12 heures maximum (contre 10) est toujours possible, mais les critères sont précisés: activité accrue ou motifs liés à l'organisation de l'entreprise.

> La possibilité de passer à une moyenne hebdomadaire de travail de 46 heures (au lieu de 44) sur 12 semaines, qui nécessite actuellement un accord de branche et un décret, est assouplie: un accord d'entreprise suffira.

> Un taux de majoration des heures supplémentaires de 10% seulement au lieu des 25% généralement pratiqués.

> Les dérogations au droit à un repos quotidien de 11 heures consécutives minimum pour tout salarié sont restreintes.

Une mesure polémique a toutefois été supprimée: il s’agit de l'article qui devait permettre aux entreprises de moins de 50 salariés de négocier des forfaits jours de gré à gré avec leur employé, sans passer par un accord collectif.

Licenciement économique

Sont précisés les motifs de licenciement économique: tel pourra être le cas lors d'une "baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires", en comparaison avec la même période de l'année précédente. Il faudra que cette baisse soit d'au moins un trimestre pour une entreprise de moins de 11 salariés, deux trimestres consécutifs pour une entreprise de 11 à moins de 50 salariés, trois trimestres pour une entreprise de 50 à moins de 300 salariés, quatre trimestres pour une entreprise de 300 salariés et plus.

Sur le périmètre d'appréciation des difficultés économiques d'une entreprise (restreint dans le texte aux seules filiales françaises pour un groupe, et non comme aujourd'hui au niveau international), les débats sont renvoyés en séance.

En revanche, la totalité de l'article concernant le plafonnement des indemnités prud'hommales, présent dans la première version du texte, a été supprimé. Il sera remplacé par un simple barème indicatif, non contraignant, qui sera publié ultérieurement par décret.

Référendum d'entreprise

Un accord d'entreprise devra être "majoritaire" : signé par des syndicats représentant plus de 50% des salariés aux élections professionnelles. Faute de majorité, les syndicats minoritaires (plus de 30%) pourront demander un référendum d'entreprise pour valider l'accord.

Accords en faveur de l'emploi

Les accords d'entreprises conclus pour "préserver ou développer l'emploi" s'imposeront aux contrats de travail, sans pouvoir "diminuer la rémunération du salarié". S'il refuse, un salarié pourra être licencié pour motif économique. Les accords devront être conclus pour une durée déterminée, fixée par défaut à cinq ans. 

Mesures pour les PME-TPE

> Les branches professionnelles pourront négocier des accords-types applicables unilatéralement par les employeurs d'entreprises de moins de 50 salariés. Dans les entreprises sans représentation syndicale, les employeurs pourront aussi négocier avec des salariés mandatés par un syndicat sur tout sujet pouvant faire l'objet d'un accord.

> Création d'un "service public de l'accès au droit" pour aider notamment les entreprises de moins de 300 salariés. Une entreprise ayant suivi les procédures prescrites par l'administration pourra attester de sa bonne foi.

> Les entreprises de moins de 50 salariés seront autorisées à constituer une réserve de précaution en vue d'éventuelles procédures aux prud'hommes.

Compte personnel d'activité

Le CPA regroupera, à partir de 2017, le compte personnel de formation (CPF), le compte pénibilité (C3P) et un nouveau "compte engagement citoyen". Le CPF sera ouvert, à partir de 2018, aux indépendants et non-salariés. Les fonctionnaires seront aussi concernés par le CPA.

Les jeunes décrocheurs auront droit à un abondement de leur CPF pour acquérir une première qualification. Quant aux salariés non-diplômés, ils cumuleront jusqu'à 40 heures de formation par an sur leur CPF (au lieu de 24), dans la limite de 400 heures (au lieu de 150).

Garantie jeunes

Pour les jeunes ni en emploi, ni en étude, ni en formation, généralisation dès 2017 du "droit" à la garantie jeunes, sous condition de ressources: un accompagnement renforcé vers l'emploi et une allocation mensuelle de 461 euros, pendant un an.

Moyens syndicaux, déconnexion, convictions religieuses

D'autres dispositions mineures sont comprises dans le projet:

> Les heures accordées aux délégués syndicaux seront augmentées de 20%.

> A partir de 2018, un "droit à la déconnexion" devra être négocié dans les entreprises.

> Il n'y aura plus de visite médicale systématique à l'embauche, sauf pour les postes à risque.

> Le projet de loi affirme la "liberté du salarié de manifester ses convictions, y compris religieuses". Deux restrictions sont possibles, entrave à la liberté d'autrui et au bon fonctionnement de l'entreprise.

> La mesure de l'audience patronale sera pondérée pour tenir compte du nombre d'entreprises adhérentes à hauteur de 20%, et du nombre de salariés à hauteur de 80%.

Y.D. avec AFP