À quand remonte vraiment la dernière interdiction de manifester?
"Jean-Claude Mailly, secrétaire général de Force ouvrière l'affirme sans hésitation: "Depuis 1958, on n'a pas eu d'interdiction de manifestation pour une confédération syndicale". Cette référence à 1958 a été reprise dans la foulée par d'autres opposants à la Loi Travail. A commencer par Christian Paul, député socialiste de la Nièvre et chef de file des "frondeurs": "C'est la première fois depuis 1958 qu'un gouvernement, un Premier ministre, interdit une manifestation organisée par les grandes organisations syndicales". Même son de cloche du côté de Gabriel Gaudy, secrétaire de l'UD-FO 75, qui a affirmé sur Europe 1 que: "C'est la première fois depuis 1958 qu'on empêche une manifestation de se dérouler, qu'il y a une interdiction de cette nature".
Mais quelle manifestation organisée par un syndicat a donc été interdite la première année de l'arrivée à l'Élysée du Général de Gaulle? En fait aucune. "En prenant 1958 pour référence, Jean-Claude Mailly ne suggérait pas qu'il y avait eu alors une manifestation confédérale interdite, mais qu'il y en avait pas eu sous la Ve République", explique Stéphane Sirot, historien spécialiste des grèves et du syndicalisme.
Des manifestations interdites
Cela signifie donc qu'aucune manifestation n'a été interdite depuis 58 ans? Par vraiment. Sous la Vème République, il y a déjà eu des interdictions. De 1954 à 1967, par exemple, les défilés du 1er mai n'étaient pas autorisés. Le 8 février 1962, la manifestation contre la guerre d'Algérie a elle aussi été interdite. Et la CGT, comme la CFDT, ayant maintenu leur appel à manifester, les heurts avec les forces de l'ordre ont été très violents. Neuf personnes ont trouvé la mort dans cette manifestation interdite. Plus récemment, en 2014, des mouvements pro-palestiniens ont été empêchés. Et en novembre, le gouvernement a interdit tous les rassemblements pendant le premier week-end de la Cop 21.
Mais, "il ne s'agissait pas de manifestations accompagnant un mouvement social national appelé par des confédérations syndicales", précise Stéphane Sirot. Et d'ajouter: "De ce point de vue on est largement dans l'inédit, particulièrement sous un gouvernement socialiste".