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Pourquoi EDF peut restreindre le droit de grève dans ses centrales

C'est une décision du Conseil d'État de 2013 qui autorise les dirigeants d'EDF à restreindre le droit de grève sous certaines conditions.

C'est une décision du Conseil d'État de 2013 qui autorise les dirigeants d'EDF à restreindre le droit de grève sous certaines conditions. - Guillaume Souvant-AFP

"Depuis 2013, le Conseil d'État autorise sous certaines conditions la direction d'EDF, en tant que dépositaire du service public de l'électricité, à limiter le droit de grève dans ses centrales nucléaires. "

EDF utilisera-t-il la possibilité qui lui est donnée de limiter les grèves dans ses centrales nucléaires? Alors que les personnels de dix-neuf de ses méga-sites ont voté la grève ce jeudi 26 mai, la direction de l'entreprise serait en mesure de restreindre l'usage de ce droit constitutionnel, sous certaines conditions.

Même si ce n'est pas son intention à l'heure actuelle, l'entreprise a le droit pour elle et n'a pas besoin d'en référer à l'État. Dans les raffineries, la réquisition de salariés grévistes est, au contraire, du ressort direct de l'État et ses représentants, les préfets. Une hypothèse que le Premier ministre a évoquée: "On peut envisager toutes ces solutions. Toutes les possibilités sont sur la table", a répondu le Premier ministre, interrogé sur RMC et BFMTV sur d'éventuelles réquisitions dans les raffineries.

EDF est dépositaire du service public d'électricité

Au regard d'une décision du Conseil d'État de 2013, EDF avait été confirmé dans ses mesures de réquisition de ses salariés, en réaction à des grèves en 2009 qui avaient affecté ses réacteurs nucléaires. Ces mesures avaient été contestées devant le Conseil d’État par plusieurs organisations syndicales.

Le plus haute juridiction administrative française a estimé qu'EDF, contrôlé majoritairement par l’État, était responsable d’un service public de production d’électricité. À ce titre, elle en a conclu que la société était compétente pour déterminer les limitations à apporter au droit de grève de ses agents.

Le Conseil d'État a toutefois énoncé le cadre légal de cette réquisition. En 2009, la direction de l'entreprise avait restreint le droit de grève en vue "d’éviter des conséquences graves dans l’approvisionnement du pays en électricité, et dans la mesure où les solutions alternatives à cette fourniture de courant électrique faisaient défaut", y compris les importations des réseaux d'électricité étrangers, pour faire face à la demande, "avec la marge de sécurité minimale indispensable".

Pour le Conseil d'État, l'atteinte au droit de grève en 2009 était "proportionnée"

Ainsi, toute nouvelle dégradation de la disponibilité du parc de production nucléaire aurait alors directement menacé la garantie de l’approvisionnement en électricité. Le Conseil d'État en a déduit que les mesures prises étaient justifiées.

Enfin, il a aussi jugé que la réquisition des salariés par EDF visait à répondre non à la reprise d'un fonctionnement normal du service mais "à la continuité des fonctions indispensables pour assurer la remise en service des réacteurs arrêtés". La haute juridiction a donc estimé "l’atteinte au droit de grève proportionnée".

À l'heure actuelle, les conditions réunies en 2009 ne semblent pas effectives pour que la réquisition des salariés en grève dans ses 19 centrales nucléaires soit envisagée par EDF. L'entreprise publique a plusieurs moyens à sa disposition pour assurer l'approvisionnement en courant électrique, soit en important du courant, soit en sollicitant ses ressources de production hydrauliques, soit en équilibrant son réseau de production.

En outre, le mouvement social entamé ce jeudi 26 mai ne devrait pour l'instant entraîner que des baisses de charge, mais non l'arrêt des centrales. En 2009, la situation était bien plus tendue pour EDF. Ce sont 17 des 58 réacteurs du parc nucléaire, arrêtés pour la réalisation d’opérations de maintenance et de renouvellement du combustible usagé, qui n'avaient pu reprendre du service en raison de la grève des personnels de l'époque.

Frédéric Bergé