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Que reste-t-il de la loi Florange ?

François Hollande, lors de sa visite à Florange en février 2012.

François Hollande, lors de sa visite à Florange en février 2012. - Jean-Christophe Verhaegen - AFP

Promise par François Hollande lors de la campagne présidentielle, cette mesure symbolique concernant la cession des sites rentables a connu sa première application la semaine dernière. Mais de nombreux rebondissements ont conduit l’exécutif à revenir sur ses ambitions initiales.

24 février 2012: du haut d'une camionnette de l’intersyndicale, François Hollande s’adresse aux 2.800 salariés du site ArcelorMittal de Florange. En pleine campagne présidentielle, le candidat socialiste promet qu'en cas d’élection, une grande loi sera votée pour "obliger" une entreprise souhaitant délocaliser à céder ses unités de production rentables. Le tout afin qu’elle ne soit pas "démantelée". L'image, qui fait le tour des médias, restera.

Pour les ouvriers lorrains, tous les espoirs sont permis. Mais deux ans et demi plus tard, ces derniers déchantent. Car la loi Florange, adoptée en février 2014, a été vidée de sa substance et ne possède pas la force dissuasive imaginée au départ. De plus, elle n’a pas empêché la fermeture des hauts-fourneaux de Florange, même si l’Etat peut se targuer d’avoir empêché tout licenciement.

Une première version édulcorée

La proposition de loi initiale, déposée en avril 2013, avait déjà marqué un recul des ambitions gouvernementales. Confronté à un risque d’inconstitutionnalité, le texte avait en effet exclu la notion d’obligation de cession pour les entreprises sur le départ, lui préférant des pénalités financières allant jusqu’à 20 fois le smic par emploi supprimé.

En outre, seules les entreprises de plus de 1.000 salariés sont concernées alors que, selon les syndicats, 85% des plans de sauvegarde de l’emploi concernent des sociétés situées en dessous de ce seuil. Mieux que rien, assurent les défenseurs du texte, qui a pour vocation d’éviter la multiplication des cas similaires à celui de Florange.

Le Conseil constitutionnel s'en mêle

C’était sans compter sur la ténacité de l’opposition, soutenue par le patronat qui voit dans la loi Florange un signal négatif envoyé aux potentiels investisseurs.

En mars 2014, saisi par les députés UMP, le Conseil constitutionnel censure le texte, jugeant les potentielles pénalités financières "contraires à la liberté d’entreprendre et au droit de propriété". Contraints de le remanier à coups d’amendements, les députés de la majorité font donc adopter, dans le cadre du projet de loi sur l’économie solidaire, une version édulcorée de la désormais symbolique loi Florange. Au lieu des pénalités financières, les entreprises pourront se voir demander le remboursement des aides publiques versées les deux années précédant la fermeture du site. Et la recherche d’un repreneur ne sera plus obligatoire que dans le cadre d’un plan de sauvegarde pour l’emploi.

La version définitive de la loi Florange a ainsi connu sa première application concrète, le 18 novembre dernier à Saint-Auvent (Haute-Vienne). L’entreprise Panavi, filiale du Belge Vandemoortele spécialisé dans la pâtisserie industrielle, avait en effet décidé de redéployer ses activités près de Lyon. Une décision qui menaçait les 69 emplois du site situé à quelques kilomètres de Limoges. Grâce à la loi Florange, ce dernier a pu être racheté par l’entreprise Gelpat, à la faveur d’une convention tripartite entre le cédant, le repreneur et l’Etat. Avec, à terme, la sauvegarde d’une cinquantaine d’emplois.

Yann Duvert