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2014 ou le grand chambardement à la tête des entreprises du CAC 40

L'exécutif des grandes entreprises françaises a été largement remanié en 2014.

L'exécutif des grandes entreprises françaises a été largement remanié en 2014. - AFP ; montage BFMTV

Une quinzaine de patrons du CAC 40 ont remis en jeu leur mandat en 2014. Simple formalité pour les uns, éviction ou ascension surprise pour les autres, tour d’horizon de ce big bang qui a touché tous les secteurs de l’industrie.

Un jeu de chaises musicales inédit par son ampleur a eu lieu cette année au sommet des grandes entreprises françaises. Disgrâce puis rebond de Proglio, ascension d’Isabelle Kocher et de Jean-Bernard Levy, disparition de Christophe de Margerie: en l’espace d’une semaine, tout a changé dans le secteur très stratégique de l’énergie.

Les autres domaines n'ont pas été épargnés, même si le renouveau a été moins concentré dans le temps. Chez L’Oréal, Axa, RATP, ou Renault, les dirigeants ont vu, au contraire, leur confiance renouvelée. Entre rupture et continuité, voici ce qu’il faut retenir du grand chambardement à la tête du CAC 40 en 2014. (Passez votre souris sur les images pour davantage d'informations sur chacun)

Dans le secteur de l’énergie, de nombreuses têtes sont tombées y compris celles que l’on n’attendait pas. Malgré un bilan plus qu’honorable, Henri Proglio a été évincé de la direction d’EDF au profit de Jean-Bernard Levy. Si sa proximité avec la droite l’a affaibli aux yeux de François Hollande, cela ne l’a pas empêché de rebondir chez Thalès à la place de son successeur chez EDF.

Chez GDF Suez, Jean-François Cirelli, lui, a payé au prix fort ses tensions avec Gérard Mestrallet. Le numéro 2 du groupe, artisan de la fusion avec GDF, se voyait bien accéder au trône mais il a été brutalement démis de ses fonctions sans poste de secours.

C’est également une histoire d’inimitié qui explique, en partie, la chute brutale de Chris Viehbacher. Serge Weinberg n’a jamais apprécié son style de management à l’international depuis Boston. Sous sa présidence, Sanofi avait pourtant vu son cours de bourse atteindre des sommets.

Deux dirigeantes ont pulvérisé le plafond de verre en 2014. Stéphane Pallez, dont le prénom ne révèle pourtant pas son genre, a été choisie par les pouvoirs publics pour diriger la Française des Jeux. A cinquante-cinq ans, cette énarque qui a fait l'essentiel de sa carrière au Trésor, est la première femme à occuper ce poste. 

Isabelle Kocher n'est certes pas encore à la tête de GDF Suez, mais la directrice financière du groupe en est devenue la directrice générale déléguée en octobre. La numéro deux en somme. Une position qui fait d'elle la favorite légitime pour succéder à Gérard Mestrallet, qui rendra son tablier en 2016. A 47 ans, celle qui a connu quasiment tous les services de GDF, depuis son arrivée en 2011, deviendrait ainsi la première femme patronne d'un géant du CAC 40. 

Chez PSA, Carlos Tavares n’a pas eu de mal à endosser son costume de leader, ni à mettre les mains dans le cambouis. Son plan "Back in the Race" produit ses premiers effets: retour à une trésorerie positive et ventes record en Chine. D’ici à trois ans, il vise la rentabilité. Pour réussir dans cette "industrie de guerriers", l’ancien bras droit de Carlos Ghosn s’appuiera sur une méthode claire: à lui le produit et l’industrie qu’il connaît par cœur après 32 ans chez Renault, à Louis Gallois, nommé président du conseil de surveillance, les relations avec l’Etat-actionnaire.

Chez un autre géant industriel, cette fois fleuron de l'énergie, la nomination de Jean-Bernard Levy est sans doute la grande surprise de l’année. Ascension express chez EDF pour ce manager réputé pour ses talents de gestionnaire à la tête de Vivendi, et de pacificateur chez Thalès où il œuvrait depuis à peine deux ans. Des succès qu’il devra mettre à profit chez le numéro 1 français de l’énergie où son principal défi est de récréer une dreamteam du nucléaire.

Ils risquaient la disgrâce, ils ont finalement tenu bon. En février, à quelques semaines de la remise en jeu de son mandat à la tête de Veolia, personne n'aurait donné cher de la peau d'Antoine Frérot. La presse disait l'Etat, actionnaire à 9% du groupe, "agacé" par le dirigeant. Dassault, qui en détient 6%, était soupçonné de manoeuvrer contre le successeur d'Henri Proglio. Mais à la surprise générale, le 24 avril, les actionnaires du groupe approuvent son renouvellement à une écrasante majorité.

Stéphane Richard aussi a senti le vent du boulet. Fin 2013, il est mis en examen pour son rôle présumé dans l'affaire Tapie. En juin 2014, son mandat de PDG d'Orange s'achève. L'Etat, actionnaire à 25% de l'opérateur, est pris entre deux feux: Arnaud Montebourg, alors ministre du Redressement productif, avait réclamé un an plus tôt son départ en cas de mise en examen. Mais tout le groupe est derrière son chef. Le conseil d'administration vote finalement son maintien

Chez l’Oréal, Saint Gobain et Axa, pas de problème de succession: les groupes se portent bien et sont dirigés par des purs produits maisons au profil international. A l’image d'Henri de Castres qui a tissé, ces 25 dernières années, un puissant réseau à travers le monde, ce lui permet de prendre de la hauteur et d’anticiper la transformation numérique d’Axa. 

C’est également la continuité qui prime chez Saint Gobain où la reconduction de Pierre-André de Chalendar, dit "PAC", a été une simple formalité. Il y a commencé sa carrière en 1989 et veut désormais élargir la palette du groupe en mettant la main sur le suisse Sika

Confiance renouvelée également pour Jean-Paul Agon, 36 ans au sein du leader mondial des cosmétiques. Depuis qu’il est aux commandes, l'action a gagné près de 70%, le groupe pèse 30 milliards d’euros et vise 1 milliard de nouveaux clients partout dans le monde, y compris en Afrique, sa nouvelle terre de croissance. Fait marquant de l'année, révélateur de la santé de fer du groupe: L'Oréal a racheté 8% du capital de Nestlé sans même toucher à sa trésorerie. 

Carlos Ghosn, dont le renouvellement a été approuvé à 85% à la tête du Français Renault en avril, a fait de la marque au losange une référence dans le monde. Notamment grâce à la création de la low cost Dacia, qui a accru la notoriété du constructeur en étant commercialisée sous le logo Renault à l'étranger.

Pierre Mongin, reconduit à la tête de la RATP cet été pour un troisième mandat, peut se vanter d'avoir vendu l'expertise du groupe sur tous les continents. Numéro un en Europe, la Régie autonome des transports parisiens gère aussi le tramway de Washington aux Etats-Unis et le métro de Séoul en Corée du Sud. Elle est présente au Maghreb et même en Chine où Pékin lui a confié la gestion du premier tramway opéré par une entreprise étrangère. 

Augustin de Romanet, également maintenu à la présidence d'ADP cet été, a poursuivi le travail de son prédécesseur, Pierre Graff, pour internationaliser l'exploitant des aéroports parisiens. Il réalise en 2014 plus de 24 fois son chiffre d'affaires français en dehors de l'Hexagone. S'il a échoué à décrocher le projet pharaonique d'aéroport d'Istanbul en juin, il reste convaincu qu'il y participera d'une manière ou d'une autre.

La France a perdu en 2014 deux patrons de deux mastodontes de l'énergie à quelques jours d'intervalle. Le 21 octobre, le monde des affaires se réveille hébété par le décès de Christophe de Margerie, patron charismatique de Total, dans un accident d'avion survenu en Russie. 

La veille, le discret patron d'Areva, Luc Oursel, annonce se mettre en retrait de l'entreprise pour raisons de santé. Le fleuron français du nucléaire annoncera sa disparition quelques semaines plus tard, le 3 décembre. 

2015, la stabilité

On n'a pas eu le temps de vous parler de tous les autres: Jean-Paul Herteman, qui a laissé la présidence de Safran à deux successeurs, Ross McInnes et Philippe Petitcolin. Ou de Xavier Huillard, reconduit sans vague chez Vinci, comme Gilles Schnepp chez Legrand, Hubert Sagnières chez Essilor ou encore Benoït Potier chez Air Liquide. Il faut dire qu'ils étaient nombreux. 2015 devrait être plus stable: aucun mandat de PDG de grande entreprise française ne s'achève l'année prochaine. 

Nina Godart, Charlyne Legris et Joseph Sotinel