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Achèteriez-vous des produits de luxe sur Amazon? Ce patron de LVMH n'y croit pas

Des sacs Vuitton sur Amazon? Pas demain la veille, selon le responsable du digital chez LVMH.

Des sacs Vuitton sur Amazon? Pas demain la veille, selon le responsable du digital chez LVMH. - Amazon - LVMH

Bien que fan d'Amazon, le responsable du numérique chez LVMH estime dans une interview que les consommateurs n'iront jamais chercher du luxe sur Amazon.

Après les livres, les jouets, les produits électroniques, l'alimentaire, Amazon va-t-il s'attaquer sérieusement au luxe? Si l'appétit du géant du e-commerce semble insatiable, peut-il pour autant vendre de tout? Ian Rogers, le patron du numérique de LVMH a sa petite idée. Dans une interview au Journal du Net, l'ancien patron de Beats Music passé chez Apple avant de rejoindre le numéro 1 mondial du luxe en 2015 assure qu'Amazon ne rimera jamais avec luxe. 

"Personnellement, je n'irai jamais acheter quelque chose sur Amazon qui puisse représenter mon individualité, comme c'est le cas d'un produit de luxe, confie-t-il dans cette interview. Je pense que les consommateurs du luxe cherchent à vivre une vraie expérience lorsqu'ils achètent l'un de ces produits".

"Amazon c'est incroyable, mais..."

Et pourtant, ce cadre de LVMH assure qu'il est un grand fan du e-commerçant américain. "Je suis un bon client d'Amazon. J'ai par exemple installé un bouton Amazon Dash dans ma salle de bain, ce qui me permet de commander mes lames de rasoir simplement en appuyant dessus. C'est incroyable! Pour autant, ce n'est pas de cette manière que j'achèterai une nouvelle paire de chaussures. Ce n'est pas au luxe de s'adapter au business distribuant des produits de commodités mais plutôt à lui de proposer une expérience supérieure. D'une manière générale, je ne voudrais pas faire quelque chose qui risquerait de standardiser notre marque".

Et le passé d'Amazon semble lui donner raison. Au milieu des années 2000, le site américain avait tenté de déranger le monde feutré de la joaillerie en lançant sa propre gamme de bijoux en diamant. Son idée était de casser les règles du secteur en comprimant les marges habituelles du secteur. "Il imaginait des clients acheter un bracelet à 1200 dollars sur le site puis le faire estimer par le bijoutier local et découvrir qu'il avait une valeur de 2000 dollars", explique Brad Stone, auteur de Amazon: La boutique à tout vendre. La firme mobilisa d'importantes ressources, signa un contrat avec Paris Hilton, passa des mois à concevoir une boîte en bois pour accueillir les bijoux et lança même une fonction "recherche de diamant" qui permettait aux clients de rechercher des pierres précieuses individuelles. Bilan des courses: un flop. Les clients ne se bousculèrent pas pour acheter leur bague de fiançailles sur Amazon et le site abandonna rapidement la recherche de diamant.

Aujourd'hui, le site propose essentiellement des bijoux fantaisie vendus par des tiers sur sa place de marché.

"Expérience impersonnelle et marges sacrifiées"

Dans le prêt-à-porter aussi, le géant américain tente en vain des approches vers le luxe depuis des années. La marque se paie régulièrement des pages de pub dans de prestigieux magazines de mode américains et sponsorise des événements huppés comme le gala de la mode Met Ball organisé à New York par Anna Wintour, la patronne de Vogue. Les grandes griffes de luxe refusent pourtant toujours de frayer avec l'américain, jugeant que l'expérience d'achat est impersonnelle et surtout que les marges sont sacrifiées sur Amazon. Bref, acheter un sac Vuitton ou une bouteille de Chanel N°5 entre deux paquets de couche et une boîte de lames Gillette, ce n'est pas pour demain. 

Frédéric Bianchi
https://twitter.com/FredericBianchi Frédéric Bianchi Journaliste BFM Éco