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Arnaud Montebourg se réconcilie avec TF1

L'élu avait traité TF1 de "chaîne délinquante"

L'élu avait traité TF1 de "chaîne délinquante" - -

Le ministre était invité du journal de la Une pour la première fois depuis ses violentes critiques émises en 2010.

Samedi 1er décembre, Arnaud Montebourg était l'invité du JT de 20 heures de TF1. Rien d'exceptionnel pour un ministre en exercice? Pas tout à fait. En effet, le futur ministre du Redressement productif avait été en conflit violent avec la Une en 2010, et n'avait pas été invité dans les journaux de la chaîne depuis. Le journal lui avait quand-même consacré un sujet lors de sa nomination au gouvernement...

Le conflit était parti de propos tenus par le flamboyant socialiste en marge d'une interview pour le documentaire Fin de concession de Pierre Carles, un brûlot anti-TF1. L'élu déclarait: "C'est le moment de taper sur TF1. Il faut leur mettre la tête sous l’eau! TF1, c'est la télé de la droite, la télévision des idées qui détruisent la France, la télévision de l'individualisme, la télévision du fric, du matraquage sur la sécurité..."

Des propos qui avaient suscité la fureur du PDG de TF1, lequel avait exigé des excuses publiques. "Savez-vous que TF1 reçoit chaque année depuis sa privatisation un satisfecit du CSA pour le respect de ses obligations et de son cahier des charges? Savez-vous que, depuis sa privatisation, TF1 a investi plus de cinq milliards d'euros dans la création française et 650 millions dans le cinéma français? Qu'en 15 ans, ce sont deux milliards d'euros de taxes en tous genres qui ont été acquittées par TF1?", avait écrit Nonce Paolini au député Montebourg.

A l'époque, le trublion socialiste avait refusé de s'excuser et en avait au contraire remis une couche dans une lettre publiée sur son blog, où il dénonçait "la grossièreté des violations, la lourdeur des sanctions et la répétition des infractions depuis 15 ans". Sur Europe 1, il fustige même "la tradition délinquante" de la Une.

TF1 était allé jusqu'à parler d'une plainte en justice contre l'homme politique, mais interrogée ce lundi 3 décembre, la chaîne n'a pas indiqué ce qu'il en était advenu.

Dialogue de sourds

De toutes façons, le débat ne pouvait tourner qu'au dialogue de sourds car la question du respect des engagements pris par TF1 ne peut être tranchée de façon binaire. TF1 souligne -à juste titre- recevoir un nombre très faibles de rappels à l'odre de la part du Conseil supérieur de l'audiovisuel (cf. ci-contre). Il s'agit pour l'essentiel d'erreurs dans les JT, de déséquilibres dans les temps de parole, et plus rarement de publicité clandestine ou de critiques contre des émissions de télé-réalité un peu trop trash...

Toutefois, si certaines obligations sont formellement respectées, leur esprit ne l'est pas vraiment. Ainsi, la chaîne doit diffuser chaque année 10 heures de concerts et 12 spectacles vivants (opéra, danse, théâtre). Mais elle s'acquitte de cette obligation en diffusant ces spectacles essentiellement au beau milieu de la nuit.

Enfin, certaines promesses faites en 1987 lors de la privatisation n'ont pas été ensuite retranscrites dans les obligations, et n'ont pas vraiment été respectées. Interrogé sur les émissions culturelles, Patrick Le Lay avait assuré: "Une chaîne de télévision, qui prétend être la première en France, ne peut pas le rester uniquement sur la diffusion de programmes les plus simples à absorber. Sa réputation et sa place dépendent de la qualité des grands programmes. Elle doit savoir faire des sacrifices financiers si la recette n'est pas à la hauteur du coût. [...] Faire absorber au public français des séries américaines n'est pas une fatalité".

Toujours lors de l'audition devant le gendarme de l'audiovisuel, Bernard Tapie, qui faisait partie du consortium aux côtés de Bouygues, abondait: "On doit pouvoir traiter l'année Ravel, ou l'anniversaire d'Olivier Messiaen".

Autre membre de l'équipe, Antoine de Clermont-Tonnerre assurait: "Il est extrêmement facile de faire une programmation pour enfants, il existe des kilomètres de dessins animés venant de toutes origines, et notamment d'Extrême-Orient, dessins animés extrêmement violents pour la plupart. Notre ambition, c'est de faire appel aux auteurs français..."

L'équipe Bouygues promettait aussi des "films de ciné-club art et essai", un "magazine scientifique", bref, d'être "une chaîne de culture"...

Le titre de l'encadré ici

|||Julien Dray à demi blacklisté

En 2002, après l'accession de Jean-Marie Le Pen au second tour, Julien Dray s'en était vivement pris à TF1, qu'il avait rebaptisé "TFN". Depuis, le socialiste n'a pas été invité dans les JT de la Une, mais l'a été en revanche sur LCI (filiale de TF1), indique son entourage.

De son côté, François Bayrou, qui, en 2006, avait critiqué les liens entre Martin Bouygues et Nicolas Sarkozy en direct dans le journal de Claire Chazal, a été ensuite réinvité par la Une.

Jamal Henni