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Beaucoup d'étudiants mais peu d'élus pour travailler dans le luxe

Les formations pour travailler dans le luxe se multiplient alors que le secteur est confronté à un fort ralentissement.

Les formations pour travailler dans le luxe se multiplient alors que le secteur est confronté à un fort ralentissement. - Fred Dufour - AFP

Les entreprises du luxe sont confrontées à un ralentissement du marché mondial. Pour autant, les formations se multiplient alors que leurs nombreux étudiants trouvent de moins en moins de débouchés.

Travailler dans le luxe fait rêver et les cursus prolifèrent en France, mais les débouchés pour les jeunes cadres restent limités, d'autant que les entreprises du secteur font face à un ralentissement du marché mondial. Masters, chaires, MBA: une quarantaine de formations ou spécialisations post-baccalauréat proposent dans l'Hexagone des cycles - de quelques mois à plusieurs années - pour apprendre les "codes" du luxe en termes de marketing, management ou distribution.

"C'est une véritable floraison, l'ensemble de ces formations représente par an quelque 2.000 places d'étudiants à Bac+5, alors que dans les très bonnes années on aura 250 postes de cadres junior" à pourvoir dans les métiers du luxe en Europe, déplore Alain-Dominique Perrin, président de l'EDC Paris Business School, école de commerce qui propose depuis 27 ans une spécialisation dans le luxe, la plus ancienne de sa catégorie.

Toute l'industrie du luxe a resserré les boulons

"Mais cette année par exemple, on en aura encore moins car toute l'industrie du luxe a resserré les boulons à cause de la crise", souligne-t-il. L'ancien dirigeant du groupe de luxe Richemont et ex-président de Cartier juge que "moins d'une dizaine" de ces formations sont "sérieuses, avec des gens du métier et des professeurs de qualité".

"Il y a beaucoup de marchands de rêves, qui vendent de la soupe sans scrupule et veulent faire de l'argent, mais c'est de l'escroquerie et de l'abus de confiance, ils roulent les parents qui déboursent des milliers d'euros et les étudiants n'ont pas de job à la sortie", souligne-t-il en ce mois d'octobre, alors que les nouvelles promotions viennent de faire leur rentrée à l'EDC.

LVMH et Kering font de la formation

Ces dernières années, les géants du luxe ont multiplié les partenariats avec les écoles: tel LVMH, numéro un mondial, qui outre une chaire créée dès 1991 avec l'Essec, en a lancé une deuxième en 2015 avec HEC Paris, dédiée au management des maisons de luxe. Le groupe de Bernard Arnault compte en son sein plus de 200 diplômés d'HEC et recrute chaque année une trentaine d'étudiants sortant de la prestigieuse école. En 2014, LVMH a également inauguré son Institut des métiers d'excellence, qui propose des formations diplômantes via des contrats d'alternance au coeur de ses maisons. "La quasi-totalité des diplômés" de l'été dernier "a maintenant un contrat et une bonne partie travaille à l'intérieur du groupe", a indiqué mi-octobre Bernard Arnault, lors de la cérémonie de rentrée de l'institut.

Kering, autre poids lourd du luxe français, a également renouvelé l'an dernier pour cinq ans sa chaire à HEC dédiée au management des marques de luxe. Pour le groupe de François-Henri Pinault, l'objectif est "de contribuer à la formation de futurs cadres de haut niveau et d'identifier parmi eux des talents susceptibles de rejoindre" Kering et sa vingtaine de marques.

Apprendre la création de valeur à partir d'émotions

"Il est vrai que tous les gens qui sont formés au luxe ne peuvent pas être absorbés par l'industrie. Mais ces formations ouvrent des perspectives en-dehors de ce secteur et apportent des éléments différenciants", tient à souligner Patrick Albaladejo, professeur affilié et directeur exécutif de la chaire "Luxury" d'HEC dont Kering est partenaire. Certes, relève celui qui a été directeur général adjoint d'Hermès, "le vivier naturel est le luxe, mais la formation a une applicabilité beaucoup plus large et apporte un plus à un business 'non luxe': quand on suit ce type de formation, on apprend notamment la création de valeur à partir d'émotions".

Selon le cabinet de conseil Bain, dont l'étude annuelle est une référence pour le secteur, le marché mondial des produits de luxe - habitué à la croissance - devrait finir 2016 en baisse de 1%, notamment en raison des variations des taux de change mais aussi des suites des attentats en Europe.

N.G. avec AFP