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Blablacar, la nouvelle "licorne"

Blablacar a levé 200 millions de dollars.

Blablacar a levé 200 millions de dollars. - Kenzo Tribouillard - AFP

Le champion français du covoiturage a levé 200 millions de dollars. Il entre dans le club très fermé des start-up évaluées à plus d'un milliard de dollars. Une bonne nouvelle qui enthousiasme Frédéric Mazella, fondateur de Blablacar, invité sur BFM Business.

Une nouvelle "licorne" est née. Si cet animal mythique n'existe que dans les légendes, les start-up valorisées à plus d'un milliard de dollars, elles, sont bien réelles. Et Blablacar vient de rentrer dans ce cercle très fermé. Le champion français du covoiturage vient de lever 200 millions de dollars (177 millions d'euros), un montant record pour une jeune pousse hexagonale. L'entreprise est valorisée à 1,6 milliard de dollars (1,4 milliard d'euros)

"Ce n'est pas tant la valorisation que le concept de licorne qui est important. Cela signifie que nos investisseurs estiment que nous avons un potentiel dans le digital qui va se réaliser", se félicite Frédéric Mazella, fondateur de Blablacar, invité ce 17 septembre sur BFM Business.

La somme collectée, auprès notamment des fonds d'investissement américains Insight Venture Partners et Lead Edge Capital, dépasse le record de 100 millions d'euros établi par la start-up toulousaine Sigfox en février. Et il ne risque pas de tenir longtemps tant le montant de ses levées de fonds paraissent exponentielles: 10 millions de dollars en 2012, 100 millions de dollars en juillet 2014, et 200 millions aujourd'hui.

Si les investisseurs sont principalement américains aujourd'hui, cela n'a pas toujours été le cas. "Nous avons eu différents types d'investisseurs pour différents stades de croissance de notre société", rappelle Frédéric Mazella.

Mercredi soir, le ministre de l'Economie Emmanuel Macron a salué sur twitter l'opération de Blablacar. "Bienvenue chez les (très) grands. Et bravo!", a-t-il écrit. Un enthousiasme français qui rassure Frédéric Mazella. En effet, il rappelle que Blablacar était, avec d'autres, à l'initiative de "Reviens Léon, on innove à la maison", une initiative pour faire revenir au bercail les talents partis tenter leur chance à l'étranger. "L'environnement français est un atout", précise-t-il.

Et Frédéric Mazella semble toujours un peu étonné de son succès. "Nous sommes partis de France avec un service qui fonctionne très bien, nous avons réussi à dupliquer cela dans d'autres pays". S'il reconnait que Blablacar demande une bonne infrastructure, " c'est très technique, il y a des serveurs partout", c'est à la base "une idée très très simple". 

Poursuivre son expansion

L'arrivée de ces nouveaux capitaux devrait permettre à Blablacar d'appuyer encore plus fort sur l'accélérateur pour poursuivre son expansion à l'international. Créé en 2006 sous le nom de "covoiturage.com", la jeune pousse basée à Paris revendique déjà plus de 20 millions de membres dans 19 pays, "sur trois continents", séduits par ce mode de transport économe et convivial. Son système consiste à mettre en relation des automobilistes proposant un trajet, et des voyageurs, une partie de la somme revenant au site jouant le rôle d'intermédiaire. Les coûts du trajet, essence et péages, sont partagés entre conducteur et passagers.

Parti à la chasse des pays émergents comme la Russie, la Turquie, l'Inde ou le Mexique, après avoir consolidé son règne en Europe, Blablacar vise désormais, dès "début décembre", le Brésil, puis l'ensemble de l'Amérique latine. "A partir de 2016, on va vraiment mettre les voiles vers l'Asie", ambitionne Nicolas Brusson, directeur général et cofondateur de BlablaCar, qui commence à regarder des marchés comme la Chine ("même si c'est compliqué") ou encore le Japon, la Corée du Sud et l'Indonésie. "Aujourd'hui quand on voit comment on marche en Russie, en Turquie, en Inde ou en Europe, je me dis qu'il n'y a pas vraiment de raisons pour que cela ne soit pas le cas en Asie", espère-t-il. 

Pas encore "rentable"

Si l'entreprise n'est pas "encore rentable", elle enregistre une croissance de son chiffre d'affaires qui "double tous les ans depuis 2010" et préfère continuer à investir rapidement pour maintenir son hypercroisance, avec notamment "huit acquisitions réalisée en trois ans". Un succès qui ne doit rien au hasard tant Blablacar a su faire preuve d'audace en avalant un à un ses rivaux à l'image de l'allemand Carpooling.com, du hongrois Autohop ou encore du mexicain Ride, en l'espace d'une semaine.

"Finalement c'est peut-être cette culture qui nous manquait en Europe et particulièrement en France. Si on pense rentabilité rapide, on pense court terme, et on créera des petites sociétés. A l'inverse si on pense long-terme, on créé des Google et des Facebook", souligne Nicolas Brusson. Car à l'instar de Criteo, la perle française de la publicité en ligne, Blablacar s'impose comme l'un des chefs de file d'une "French Tech" de plus en plus ambitieuse et décomplexée.

"On espère que l'on va stimuler d'autres entrepreneurs à lancer leurs business. Que les gens aient l'ambition d'aller loin et de créer des sociétés qui soient vraiment des icônes pour la France et pour l'Europe", espère celui qui a passé sept ans dans la Silicon Valley avant de lancer la start-up avec Frédéric Mazzella.

Bond des investissements en capital-risque

Selon une étude du cabinet EY, les investissements en capital-risque ont progressé de 70% au cours du premier semestre 2015, pour atteindre 759 millions d'euros et hisser la France au deuxième rang des pays européens en nombre d'opérations derrière le Royaume-Uni. "Aujourd'hui on a atteint un écosystème en France et en Europe que l'on a jamais eu. Ce changement est incroyable. Les étudiants les plus talentueux ont envie de faire de l'entrepreneuriat", s'enthousiasme Nicolas Brusson.

Réunie à Bercy mardi par la secrétaire d'Etat au numérique Axelle Lemaire, la première promotion des 48 start-up ayant bénéficié du pass French Tech --dispositif visant à faciliter l'accès aux financements et à simplifier leurs démarches administratives -- savent ce qu'ils leur restent à faire pour imiter leur jeune aînée.

D. L. avec AFP