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Bouygues surenchérit sur SFR

Martin Bouygues ne s'avoue pas battu

Martin Bouygues ne s'avoue pas battu - Crédits photo : nom de l'auteur / SOURCE

Le groupe de BTP a relevé jeudi 20 mars de 1,85 milliard d'euros son offre sur l'opérateur mobile, proposant plus que son rival Numericable.

Bouygues a annoncé jeudi 20 mars surenchérir sur Numericable. Le groupe de BTP propose désormais 13,15 milliards d'euros, plus 21,5% du capital du nouvel ensemble SFR-Bouygues Telecom. Bouygues détiendrait 67% du nouvel ensemble. Selon lui, cette offre valorise SFR à 17,4 milliards d'euros.

Il a reçu le soutien de la Caisse des dépôts (qui a dit vouloir prendre 3% du nouvel ensemble pour 300 millions d'euros), de la famille Pinault (qui a longtemps été actionnaire de Bouygues) et de la famille Decaux (actionnaire de Bouygues Telecom).

Un communiqué indique: "Bouygues fédère de grands actionnaires industriels et financiers de long terme qui partagent le sens de l'entrepreneuriat familial. La Caisse des Dépôts (déjà actionnaire du groupe Bouygues), la famille Pinault, et JCDecaux saisissent ainsi l'opportunité de cette nouvelle offre pour rentrer ou se renforcer au capital du nouvel ensemble. D'autres investisseurs pourraient également participer pour proposer à Vivendi l'acquisition du solde de sa participation résiduelle."

Le communiqué ajoute: "Vivendi avait confirmé le caractère pertinent de l'offre de Bouygues mais avait considéré sa part en numéraire insuffisante".

L'offre précédente du groupe de BTP s'élevait à 11,3 milliards d'euros de cash, plus des actions représentant 42% du nouvel ensemble.

Rappelons que Numericable propose 11,75 milliards d'euros en cash, plus des actions représentant 32% du capital de Numericable. Cette offre avait été acceptée par tous les administrateurs de Vivendi, sauf un (Pascal Cagni).

Obstacle technique

Reste un obstacle technique. Numericable bénéficie depuis le 14 mars de trois semaines de négociations exclusives avec Vivendi, qui ne peut donc pas examiner une offre concurrente durant cette période.

Altice rappelle d'ailleurs ce jeudi soir, laconiquement: "comme annoncé vendredi, nous sommes en négociations exclusives avec Vivendi". Même réaction pour Vivendi, quelques instants plus tard: "Le groupe rappelle que le Conseil de surveillance a décidé le 14 mars dernier d’entrer en négociations exclusives avec Altice pour une période de trois semaines".

Toutefois, la maison-mère de SFR pourra prendre langue avec Bouygues ensuite. De plus, l'accord avec le câblo-opérateur permet à Vivendi de se désengager sans indemniser Numericable.

Lundi matin, le directeur général de la Caisse des dépôts Jean-Pierre Jouyet avait déclaré dans les Echos: "la Caisse des Dépôts, qui est actionnaire de Vivendi, pourrait, si l’hypothèse se concrétisait, et sans engager BPI France, accompagner en capital un rapprochement entre Vivendi, SFR et Bouygues".

Une déclaration qui avait été accueillie avec humour par Patrick Drahi, principal actionnaire de Numericable: "je n'ai pas compris la démarche de la Caisse des dépôts. Peut-être n'ont-ils pas lu les journaux? On n'a pas besoin de la Caisse des dépôts, mais si elle veut investir à nouveau dans le câble, elle est la bienvenue. La Caisse des dépôts avait déjà investi dans le câble. J'ai d'ailleurs racheté ses réseaux en dépôt de bilan..."

Mercredi, Numericable a indiqué que les 11,75 milliards d'euros apportés seraient constitués de 8,35 milliards d'euros de dette et 3,4 milliards d'euros de cash.

Bon accueil des marchés

Les analystes financiers avaient considéré le choix de Numericable comme positif pour Vivendi. "C'est le moyen le plus facile, le plus rapide, et le plus sûr de sortir de SFR en créant de la valeur", a estimé Exane. Selon cet analyste, "il n'y a pas d'obstacles réglementaires significatifs" dans un rachat par Numericable, qui présente donc "un risque plus faible du point de vue concurrentiel que l'offre de Bouygues".

De son côté, Moody's avait estimé que, du point de vue de Numericable, un tel rachat "pourrait générer des bénéfices significatifs: économies dans les investissements et le dégroupage, nouvelles opportunitées dans la vente et le marketing..."

En revanche, une vente à Numericable avait été considérée comme une mauvaise nouvelle pour Bouygues, qui "revient à la case départ, avec une position faible et un cash flow négatif", pointait Exane.
Standard & Poor's ajoutait que Bouygues "n'a pas de position solide dans le haut débit fixe, et est donc confronté à trois concurrents qui en ont". Mardi, l'agence a donc placé la note BBB+ du groupe de BTP sous surveillance avec perspectives négatives.
Le 5 mars, Moody's avait déjà abaissé la note de Bouygues de A3 à Baa1.

Jamal Henni