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Culture loisirs

Canal Plus et SFR s'affrontent devant la filière cinéma

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- - Le directeur général de Canal Plus, Maxime Saada, a répondu aux piques de SFR

La chaîne cryptée et l'opérateur télécoms se sont livrés à un duel à fleurets mouchetés devant les professionnels du secteur réunis à Dijon.

Pour la première fois, SFR était invité aux Rencontres cinématographiques de Dijon organisé par la société des Auteurs Réalisateurs Producteurs (ARP). Intervenant samedi 22 octobre, le PDG Michel Combes y a rappelé ses premiers pas dans les contenus: achat des droits du championnat anglais de football, puis de la série italienne les Médicis, lancement d'un service de vidéo-à-la-demande illimitée par abonnement (Zive rebaptisé SFR Play). "Nous essayons de nous positionner comme un compétiteur de Netflix", a-t-il expliqué. 

Surtout, il a annoncé les étapes suivantes: "je suis prêt à financer le développement des oeuvres, à mettre de l'argent sur la table" pour "contribuer au cinéma français". "Je parle de lancer des chaînes linéaires", a-t-il ajouté. Sa stratégie est de répliquer en France ce qui a été fait en Israël, où "nous co-produisons des films et avons dix chaînes de cinéma".

Bref, l'opérateur télécoms (qui détient 49% de ce site web) se pose de plus en plus en concurrent de Canal Plus. Pour Michel Combes, "SFR est complémentaire de Canal Plus. Rééquilibrer les choses est nécessaire". Cela peut même apporter de la stabilité au secteur quand la chaîne cryptée tangue, a-t-il argué. 

Contre attaque

Un discours qu'a peu apprécié le directeur général de Canal Plus, Maxime Saada, lui aussi invité à Dijon. "Que fais-tu contre le piratage?", a-t-il lancé à Michel Combes. Il a aussi accusé Zive de "ne pas être localisé en France et de proposer seulement 6% de films français". Un chiffre démenti par le patron de SFR: "nous sommes aujourd'hui à 30% et espérons être bientôt à 50%".

Michel Combes a contre-attaqué en criquant les offres à prix cassés proposées par CanalSat chez Free et Orange: "c'est très mauvais de réduire le prix des chaînes. Commercialiser les chaînes pour quasiment rien est suicidaire et dangereux, cela donne l'impression que c'est gratuit. Aux Etats-Unis, le triple play est vendu 150 dollars, dont 75 ou 80 dollars sont redonnés aux fournisseurs de contenu, ce qui permet de financer une industrie puissante. Personne ne se plaint, ce qui permet de continuer à augmenter régulièrement les prix".

Réplique du patron de Canal Plus: inclure dans les abonnements de SFR la chaîne diffusant le championnat anglais, ou un bouquet de journaux et de magazines, donne aussi une impression de gratuité. Il a aussi critiqué la promotion de SFR proposant deux films pour un euro en vidéo-à-la-demande. 

"Faire péter la chronologie des médias"

Dernière pique de Maxime Saada: "SFR veut faire péter la chronologie des médias", c'est-à-dire les accords fixant les dates de sortie d'un film selon les différents supports (salle, DVD, télévision...). 

Précisant sa position, Michel Combes s'est montré plus nuancé: "la chronologie des médias a un impact déterminant sur le piratage. Car la meilleure défense contre le piratage est une offre légale attractive et facile d'accès. Il est donc risqué de renvoyer le non linéaire sur le très très long terme". En effet, les films ne sont disponibles en la vidéo-à-la-demande illimitée que trois ans après leur sortie en salles. "Il faut donc faire évoluer la chronologie des médias. Si je souhaite financer une oeuvre, je devrais avoir plus de flexibilité sur le vecteur de diffusion. Pourquoi ne pourrais-je pas la présenter d'abord en vidéo-à-la-demande illimitée par abonnement?"

Bref, l'affrontement entre les deux mastodontes n'en est sans doute qu'à son début...

Jamal Henni, à Dijon