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Canal Plus s'attaque à TF1 et M6

Les patrons de TF1 et M6 Gilles Pélisson et Nicolas de Tavernost

Les patrons de TF1 et M6 Gilles Pélisson et Nicolas de Tavernost - Serge Surpin Satellifax

La filiale de Vivendi a déposé un recours devant le Conseil d'État pour contester l'allégement des obligations pesant sur les deux chaînes.

Les relations entre Canal Plus et le tandem TF1-M6 ne s'améliorent pas. La filiale de Vivendi vient d'ouvrir un nouveau front. Elle conteste l'allégement des obligations pesant sur la Une et la Six adopté par le CSA (Conseil supérieur de l'audiovisuel).

Précisément, la chaîne cryptée vient de déposer deux recours devant le Conseil d'État contre les nouvelles conventions passées en juillet entre les chaînes et le gendarme de l'audiovisuel.

De la pub dans les journaux de TF1...

Ces nouvelles conventions allégeaient les contraintes auxquelles sont soumises les deux chaînes.

En particulier, TF1 a été autorisée à interrompre ses journaux télévisés par la publicité. Une possibilité dont Canal Plus ne voulait pas: "Le gain additionnel [de publicité] serait de 50 à 60 millions d'euros par an, selon des estimations de la régie de Canal Plus sur des durées de publicité extrêmement courtes. Ce sont des tranches horaires quotidiennes très fortes avec des parts de marché très conséquentes", avait fustigé Maxime Saada, directeur général de Canal Plus, lors d'une audition devant le CSA le 30 novembre 2016.

Le CSA a aussi supprimé chez TF1 l'obligation de diffuser à une heure de grande écoute un magazine d'information politique -une obligation qui n'était pas respectée en pratique de toutes façons. À noter que le gendarme de l'audiovisuel a supprimé cette obligation-là sans l'annoncer dans son communiqué de presse, contrairement aux autres allégements.

...et moins d'obligations musicales sur M6

Chez M6, le CSA a allégé les obligations en matière de musique. Le montant à consacrer à la production d'émissions musicales a été abaissé de 21,4 à 19 millions d'euros. En outre, cet investissement pourra désormais être réparti entre toutes les chaînes du groupe: M6, W9, 6ter, Paris Première et Teva. En échange, M6 a promis de consacrer au moins quatre prime time par an à des émissions musicales (et au moins 12 prime time sur M6 et W9 confondus), sans compter les télé-crochets comme Nouvelle star. En revanche, la Six doit toujours consacrer 20% de ses programmes aux émissions musicales.

Là encore, Canal Plus s'était opposé à cet allégement: "Industriellement, il y a des intérêts à être plusieurs à soutenir la musique. Moins il y a d'acteurs, plus il y a d'obligations qui pèsent sur C Star [chaîne musicale appartenant à Canal Plus]. Il y a un enjeu d'exposition musicale. Et on ne sait pas par quoi seraient substitués ces programmes musicaux", avait argué Maxime Saada devant le CSA. "Il n'y a pas assez de musique à la télévision en général. La musique est un atout pour M6, la plus jeune des chaînes historiques. C'est son rôle de la défendre. Elle doit garder ses couleurs musicales", avait abondé Gérald-Brice Viret, directeur général des antennes.

Par ailleurs, l'obligation de diffuser "des émissions spécifiques assurant la promotion du cinéma" a disparu. Enfin, le CSA a supprimé les obligations concernant RTL Group (filiale du groupe Bertelsmann), principal actionnaire de M6 avec 48% du capital. Précisément, le plafonnement à 34% des droits de vote de RTL Group a été supprimé. Mais ce point ne suscitait pas d'objections de la part de Canal Plus.

Faire payer les chaînes gratuites

Enfin et non des moindres, Canal Plus avait aussi vivement critiqué le projet de TF1 et M6 d'être désormais payées par leurs distributeurs, à commencer par Canal Plus lui-même via son bouquet CanalSat. La filiale de Vivendi avait demandé -mais en vain- que les conventions entre les chaînes et le CSA interdisent expressément toute rémunération. "Il est impératif d'inscrire dans les conventions le principe de gratuité des chaînes et l'absence de rémunération de la distribution", avait plaidé le secrétaire général de Canal Plus Frédéric Crépin, ajoutant qu'une rémunération de TF1 et M6 était "incompatible" avec la reconduction de leurs autorisations d'émettre. 

À noter que les deux chaînes avaient en outre demandé d'autres allégements, qui ont été refusés par le CSA (cf. encadré ci-dessous).

Interrogé, le CSA n'a pas souhaité faire de commentaires.

Les demandes de M6

Demandes acceptées:
-alignement des stipulations relatives à l’actionnariat de M6 sur celles des conventions en vigueur pour les autres chaînes
-évolution des obligations musicales (en valeur)
-aménagement de l’obligation de promotion du cinéma

Demandes refusées:
-évolution des obligations musicales (en volume)
-évolution des obligations relatives aux programmes destinés à la jeunesse (1% du chiffre d'affaires)

Les demandes de TF1

Demandes acceptées:
-suppression de la stipulation relative à l’interdiction d’interrompre la diffusion des journaux télévisés par de la publicité
-modification de l’obligation de diffuser régulièrement des magazines d’information politique par la suppression de la précision relative aux heures de grande écoute

Demandes refusées:
-suppression de l’obligation de diffuser des magazines d’actualité
-abaissement de l’obligation de diffuser un volume annuel d’au moins 800 heures d’information, hors émissions de service et magazines sportifs
-suppression de l’obligation de réserver un volume annuel d’au moins 750 heures à des émissions destinées à la jeunesse
-suppression de l’interdiction de promouvoir les programmes de LCI
-modification de la durée de validité (jusqu'en avril 2018) et des modalités de réexamen de l’interdiction de promouvoir les programmes de LCI, et de l’engagement de ne pratiquer aucune forme de couplage, de subordination, d’avantage ou de contrepartie entre la commercialisation des espaces publicitaires de TF1 et de LCI

Jamal Henni