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Carburant: quelles sont les réserves stratégiques de pétrole en France?

Alors que certains dépôts de carburant sont bloqués, le gouvernement a rappelé qu'il n'y avait "pas de risque de pénurie" en France. La situation a néanmoins des petits airs de 2016 quand l'Etat avait dû puiser dans ses stocks stratégiques.

"On n'a pas de pétrole mais on a des idées", expliquait en 1975 un spot TV du gouvernement. En l'occurrence, on a (quand même) un peu de pétrole. Le pays possède en effet des réserves stratégiques pour faire face aux urgences et notamment aux blocages des dépôts de carburant, si ceux-ci devaient s'amplifier.

En quoi consistent ces réserves stratégiques?

Si les réserves stratégiques françaises existent depuis 1925, elles sont devenues obligatoires en vertu d'engagements pris par l'Etat envers l’Agence internationale de l’énergie (AIE) dont la France fait partie depuis 1992 mais aussi envers l'Union européenne depuis 1968. Une directive européenne de 2009 impose ainsi des stocks de pétrole brut et/ou de produits pétroliers à l'ensemble des États membres de l'Union. Ces stocks stratégiques doivent être équivalents à "la plus grande des quantités représentées soit par 90 jours d’importations journalières moyennes nettes, soit par soixante et un jours de consommation intérieure journalière moyenne", précise le texte. Au niveau national, cette directive est complétée par les articles L-142, L-642 et L-671 du Code de l’énergie et l’article D-1336 du Code de la défense.

"Les opérateurs pétroliers assujettis (société distribuant des carburants doivent constituer des stocks stratégiques pétroliers à hauteur de 29,5% de leurs mises à la consommation de l'année précédente", détaillait en 2016 le ministère de l'Environnement dans une réponse à un sénateur

Les produits pétroliers concernés sont: les essences à usage automobile et aéronautique, le gazole, le fioul domestique, le pétrole lampant, le fioul lourd, le carburéacteur (kérosène). 

De combien de stocks la France dispose-t-elle?

Concrètement, environ 18 millions de tonnes, soit 90 jours d'importation nette sont actuellement répartis sur le territoire pour pouvoir être disponible rapidement. Trois acteurs gèrent ces stocks, dont principalement la Société anonyme de gestion des stocks de sécurité (SAGESS), constituée des opérateurs pétroliers, qui gère les trois quarts des réserves. Elle dispose ainsi de 80 dépôts d’importation et dépôts de maillage (environ 38% des stocks), d'un site de stockage souterrain de la société Géosel près de Manosque (environ 42%) et de 8 raffineries pour y entreposer les réserves.

Qui peut y puiser?

Ce sont uniquement les pouvoirs publics qui peuvent demander aux opérateurs de puiser dans les réserves. Ces stocks ne concernent que les usages civils des carburants, ceux destinés à garantir l’approvisionnement de l’armée sont gérés séparément, directement sous l’égide du ministère de la Défense.

En 2016, alors que la contestation contre la loi Travail avait entraîné un blocage (total ou partiel) de certaines raffineries, le gouvernement avait alors décidé de puiser dans ces fameuses réserves pour éviter la pénurie. Ce n'était que la troisième fois, après 2005 et les dégâts de l'ouragan Katrina sur des infrastructures pétrolières puis en 2010 avec des blocages déjà provoqués par une réforme sur les retraites, que la France utilisait ces stocks. Jamais l'enjeu n'a été vital pour l'économie française mais le gouvernement est toujours resté prudent dans sa communication pour éviter une ruée vers les stations-service. En théorie, les réserves sont l'équivalant de 61 jours de consommation intérieure journalière moyenne.

Thomas Leroy