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CVAE, C3S... Ces impôts de production qui continuent de peser lourdement sur la compétitivité française

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Critiquées par les industriels, ces multiples taxes restent un frein pour la relance, indique le Conseil d'analyse économique dans une nouvelle note. En réalité, le sujet est toujours aussi sensible et le gouvernement peine à réduire les 77 milliards d'euros qu'elles rapportent.

"Les impôts les plus imbéciles au monde", "un monstre fiscal…" Les critiques contre les impôts de production, lancés par les industriels, sont désormais devenues une habitude. Alors que la France tente depuis des années de réindustrialiser le territoire, ces impôts aussi multiples que variés continuent de plomber la compétitivité française, rappelle le Conseil d'analyse économique (CAE) dans une récente note publiée début juillet.

"En 2018, ils représentent 0,7% de la valeur ajoutée des entreprises en Allemagne et 3,7 % en France, le plus haut niveau en Europe hormis la Grèce" indiquent les auteurs. "En Europe, seule la Grèce prélève plus avec des impôts représentant 2,4% du PIB et 6,7% de la valeur ajoutée des entreprises."

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S'il est difficile d'être compétitif face à des pays dont le coût du travail est inférieur, la comparaison avec l'Allemagne reste toujours défavorable à la France, malgré les augmentations de salaires outre-Rhin au cours des dernières années.

Pour le CAE, les impôts de production restent clairement "les plus nocifs en raison des distorsions qu’ils engendrent tout au long de la chaîne de production". D'autant que ces taxes peuvent mettre en jeu la survie de certaines entreprises.

La Contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) est particulièrement visée puisqu'elle s'applique sur le chiffre d'affaires, quel que soit le résultat de l'entreprise. "La probabilité qu’une entreprise disparaisse à horizon de deux ans a été significativement augmentée du fait de la C3S" assurent les auteurs de la note. Cette affirmation est d'autant plus vraie dans cette période de crise, où les industriels peinent encore à sortir la tête de l'eau.

77 milliards d'impôts

Même avant la crise du coronavirus, le gouvernement avait parfaitement conscience du handicap que représentent ces impôts de production. Mais les revenus qu'ils génèrent seront difficile à combler: 77 milliards d’euros en 2018 contre 72 milliards d'euros en 2016. Une manne bienvenue pour les finances publiques lorsque l'équilibre budgétaire se jouaient encore à quelques milliards près, l'année dernière. Depuis la crise du Covid-19 et l'explosion du déficit, le gouvernement n'entend pas, non plus, se priver de revenus.

Ces impôts de production pèsent de fait pratiquement trois fois plus lourdement dans les comptes des entreprises que l'impôt sur les sociétés (IS), qui avait rapporté à l'Etat 28,4 milliards d'euros en 2018, selon les données de l'Insee.

Reste que la nouvelle ministre déléguée à l'Industrie Agnès Pannier-Runacher devra trancher. En février, le sort de la C3S semblait scellé. Elle devait être supprimée sur plusieurs années. Depuis, le discours a changé. "Baisser les impôts pour baisser les impôts, ça n'a pas de sens" expliquait en mai dernier celle qui était encore secrétaire d'Etat à l'Economie, avant le remaniement. "Baisser les impôts pour dire: 'je suis capable de relocaliser des productions et donc ça va donner de l'argent supplémentaire aux collectivités locales sous d'autres formes', alors ça commence à se regarder".

Le 15 juillet, Bruno Le Maire a finalement confirmé une baisse de 20 milliards d'euros, sur deux ans, de ces impôts de production, sans donner précisément le détails de cette coupe. Une réduction de la CVAE semble tenir la corde mais cela nécessitera de trouver un accord avec les régions qui bénéficient de ces revenus fiscaux. 

Quels sont les principaux impôts de production?

Contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) : destinée à financer l'assurance vieillesse, cette taxe s'applique au chiffre d'affaires global annuel hors taxes. De fait, qu’une entreprise gagne ou perde de l'argent, elle paie la C3S. Elle rapporte environ 3,8 milliards d'euros par an à l'Etat. C'est l'impôt de production le plus décrié.

Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) : impôt local destiné à abonder le budget des régions, la CVAE s'applique donc sur la valeur ajoutée et n'a donc pas le défaut de la C3S. Il n'empêche, sa progressivité en fonction du chiffre d'affaire peut conduire à des distorsions. La CVAE rapporte 14 milliards d'euros par an.

Taxe foncière sur le bâti : elle vise tous les propriétaires d'un bien immobilier et représente 12,9 milliards d'euros de recettes fiscales pour l'Etat.

Thomas Leroy