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Ces dirigeants politiques qui laissent les marques exploiter leur image

Angela Merkel, dessinée en sous-vêtement sur une affiche de 100 mètres carré placardée en plein Berlin, ne moufte pas.

Angela Merkel, dessinée en sous-vêtement sur une affiche de 100 mètres carré placardée en plein Berlin, ne moufte pas. - Bruno Banani

Arnaud Montebourg, Angela Merkel, François Hollande... Ils ont accepté sans broncher d'être au centre de campagnes de pub décalées. Sans toucher aucun cachet. Evidemment.

"Les hommes politiques, avec leurs avantages et leurs inconvénients, ont finalement quelque utilité: ils servent à promouvoir des entreprises naissantes et innovantes". Ainsi relativisait ce mercredi 21 janvier Arnaud Montebourg, quelques mois après que son image a été utilisé dans une publicité. Souvenez-vous, à l'automne dernier, l'application de recherche d'emploi, JobAroundMe publiait cette annonce dans la presse. 

L'ex-ministre fraîchement limogé n'a "pas donné d'autorisation" à l'utilisation de son image. Mais il se refuse à exiger quoi que ce soit de l'annonceur et de l'agence de communication à l'origine de la campagne: "cela ne m'a causé aucun préjudice, je n'ai aucune raison de l'empêcher".

Cela fait des années que les publicitaires sont tentés d'utiliser l'image des stars de la politique pour attirer le regard du consommateur. Parfois avec leur accord, le plus souvent sans, ils convainquent les annonceurs de surfer ainsi, avec humour, sur l'actualité. Certains dirigeants portent plainte, et obtiennent parfois réparations, comme les 60.000 euros de dommages et intérêt qu'a versé Ryanair à Carla Bruni pour avoir utilisé une photo d'elle et de Nicolas Sarkozy en 2008. D'autres n'en font pas grand cas, quand bien même la violation de leur image à des fins commerciales leur garantirait une victoire en cas de procès. Quelques cas marquants.

> François Hollande et ses soucis de transports

L'affaire Hollande-Gayet, du pain béni pour les agences de comm'! Nombre de marques liées à l'univers du transport s'étaient délectées de l'histoire du président en deux roues shooté par des paparazzis. Comme l'agence de location de berlines Sixt et son "monsieur le président, la prochaine fois, évitez le scooter". Le président français ne fera pas davantage de vague autour de cette histoire, et restera coi. 

Déjà, la précédente publicité de l'agence de location récidiviste, lancée à l'été 2013, n'avait suscité aucune réaction de sa part. Pourtant cette fois, la marque allait au-delà de l'allusion pour détourner son image.

> Nicolas Sarkozy proche de ses ennemis

S'il n'a pas apprécié l'humour de Ryanair, l'ex-président français a su se montrer plus tolérant avec d'autres campagnes. En 2006, lorsque RTL lance sa désormais célèbre campagne "Vivre ensemble", placardant le pas encore candidat déclaré pour 2007, hilare, aux côtés du Premier ministre Dominique de Villepin, en pleine affaire Clearstream.

Nicoals Sarkozy était alors ministre de l'Intérieur et il avait alors confié que, même s'il aurait préféré qu'on lui demande son avis, il aurait donné son accord à la radio: "Je trouve la photographie assez sympa, la campagne assez sympa", avait-il déclaré sur Canal Plus. 

Nicolas Sarkozy n'avait pas non plus porté plainte lorsque la marque Benetton avait lancé sa campagne "unhate", des photos de deux personnalités politiques que tout oppose s'embrassant goulument. Mahmoud Abbas et Benjamin Natanyahu, le Pape Benoît XVI et l'imam du Caire, ou encore Angela Merkel et Nicolas Sarkozy, donc. Le Vatican, en revanche, avait fait pression sur la marque qui avait finalement retiré son photomontage avec le Saint-Père. 

> Angela Merkel en sous-vêtements

Dans une campagne publicitaire de 2009, la marque de lingerie allemande Bruno Banani placarde un dessin de la chancelière en culotte et soutien-gorge, et de plusieurs politiciens, sur un encart de 100 mètres carré en plein Berlin. La marque, qui offre 5 euros de réduction sur tous ses produits pour lutter contre la baisse du pouvoir d'achat, y appose comme slogan: "nous donnons tout pour relancer la croissance". Aucune plainte ou demande de retrait de l'affiche ne sera formulée. Angela Merkel ne fera aucun commentaire. Pourtant, la femme la plus puissante du monde, qui est fille de pasteur et peu portée sur la mode, n'a certainement pas dû goûter le clin d'œil. 

Des marques qui prennent des risques

"En tant que personnalité publique, les politiciens sont habitués à être critiqués, caricaturé", explique Bertrand Chovet, directeur général d'Interbrand. Et ils n’ont pas vraiment intérêt à s'offusquer d'apparaître dans des publicités. Notamment, parce que porter plainte contre une utilisation jugée dégradante de leur image risque de donner encore plus de visibilité à l'annonce en question. Une sorte d'"effet Streisand".

Le procès n'est en fait pas le risque majeur auquel se confrontent les marques tentées par cette stratégie publicitaire: "Prendre une icône politique peut-être très segmentant", souligne le dirigeant du cabinet. "C'est pourquoi les seules à user de ce procédé sont généralement des acteurs alternatifs, qui ont peu de moyens, et créent ainsi du buzz à faible coût". 

N.G.