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Cette autoroute des télécoms reliera l'Europe à l'Asie par l'Arctique

Le premier tronçon du projet Arctic Fibre fera 1.850 km, le long des côtes nord et ouest de l’Alaska.

Le premier tronçon du projet Arctic Fibre fera 1.850 km, le long des côtes nord et ouest de l’Alaska. - PO3 Rachel French-US Coast Guard-AFP

"Le projet Arctic Fibre de câble sous-marin reliera à très haut débit le Royaume-Uni au Japon via l’océan Arctique. Cette voie télécom sous la banquise que le réchauffement climatique rend possible, débute en 2016 par l'Alaska."

Si l'Internet mondial tisse sa toile grâce à des câbles télécoms tirés sous les océans, il n'a encore jamais osé passer sous la banquise. C'est le défi qu'entend relever le projet baptisé est mené par un opérateur basé en Alaska, Quintillon Networks et Cooper Investment Partners, une firme d'investissement basée à New York.

Tous ces acteurs parient sur les conséquences du réchauffement climatique qui fait reculer la banquise l'été, période durant laquelle les travaux de pose d'un tel câble au fond de l'océan peuvent avoir lieu.

Ce projet consiste à déployer un câble en fibre optique ultra haut débit au fond de l'océan arctique en passant par le nord du Canada et l'Alaska pour relier Londres à Tokyo.

Le futur câble sera long de 15.700 kilomètres

C'est la route maritime la plus directe entre ces deux mégalopoles d'Asie et d'Europe. Elle offre aussi une voie alternative aux câbles sous-marins existants, a priori moins sujette aux conséquences des déplacements des plaques terrestres sous l'océan.

Par cette route maritime, le projet de câble aurait un coût total estimé entre 650 et 700 millions de dollars, pour une longueur de "seulement" 15.700 kilomètres entre le Royaume-Uni et le Japon. Ce gain est de 30% par rapport aux 21.000 kilomètres des câbles déployés entre les deux destinations. Ils ont aujourd'hui à traverser soit l'Atlantique et le Pacifique ou passent par le Moyen-Orient et l'Océan Indien. 

Arctic Fibre reliera le Royaume-Uni au Japon via l’océan Arctique, soit une route directe d'environ 15.000 kilomètres.
Arctic Fibre reliera le Royaume-Uni au Japon via l’océan Arctique, soit une route directe d'environ 15.000 kilomètres. © ArticFibre

Cette distance raccourcie induit logiquement des communications transportées un peu plus rapidement. Entre Londres et Tokyo, ce gain est d'une centaine de millisecondes pour le trafic acheminé à la vitesse de la lumière par ce type de câble, formé de fibres optiques de dernière génération.

S'il est infinitésimal et insensible (à l'oreille humaine) pour des échanges téléphoniques, ce délai gagné peut rapporter gros au trading haute fréquence qui a besoin de réseau de données très performants. Ces traders jouent sur l'exécution à très grande vitesse de transactions informatiques financières. Ils forment une demande très solvable de services à très haut débit qui justifie, à elle seule, la viabilité économique du projet .

Le grand départ a été donné il y a 8 mois. En plein été 2015, l'opérateur Quintillon Networks, partenaire du projet, a passé un contrat avec Alcatel Submarine Networks (intégré désormais au groupe Nokia) pour la pose d'une première portion du câble sous-marin. Ses promoteurs qualifient de phase 1 du projet, ce déploiement qui va avoir lieu en Alaska.

En Alaska, le réchauffement climatique favorise la pose du câble

Ce premier segment de 1.850 kilomètres longera toutes les côtes nord et ouest de cet État américain septentrional. Le câble sera posé au fond de l'eau à quelques dizaines de kilomètres du rivage. Cette artère télécoms a aussi vocation à desservir des zones habitables n'ayant que très peu accès, aujourd'hui, à un réseau internet très haut débit. Le câble aura, pour ce faire, des "bretelles" qui desserviront physiquement les villes côtières

La pose doit démarrer en juin 2016 et se terminer avant l'automne, pour profiter des quelques mois où l’océan est libre de glace. "Nous proposerons des services très haut débit à un coût abordable sur ces zones de l'Alaska, en profitant des conditions climatiques nouvelles qui offrent des opportunités opérationnelles uniques" a commenté Elizabeth Pierce, PDG de l'opérateur à la signature du contrat avec Alcatel-Lucent, à l'été 2015. Une allusion directe au climat moins rigoureux qui règne sur cette partie du globe. Le réchauffement climatique rend plus aisés la pose d'un câble dans une mer dégagée d'iceberg ainsi que les travaux d'atterrissage du câble sur les côtes.

En attendant que la banquise fonde un peu plus sur les zones du nord du Canada que devra traverser le câble, le "dégel" du projet de liaison sous-marine par la voie du grand Nord est devenu réalité en Alaska.

Frédéric Bergé
https://twitter.com/BergeFrederic Frédéric Bergé Journaliste BFM Éco