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Cette étude sur les prix du bio qui met en rage la grande distribution

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Une étude de l'UFC-Que Choisir assure que les prix plus élevés des produits bio seraient notamment de la faute des grandes surfaces qui prendraient une plus grande marge que sur les produits conventionnels. Vent debout, la grande distribution dément. Lidl et Système U en tête.

Le bio est-il la vache à lait de la grande distribution? Une étude de l'UFC-Que Choisir est venue jeter un pavé dans la mare. Selon l'association de consommateurs, la marge des grandes enseignes serait plus que juteuse sur les fruits et légumes issus de l'agriculture biologique. "77% des Français jugent que les produits biologiques sont trop chers, assure Alain Bazot, le président de l'association. Sauf que les Français pensent que si les produits bio sont si chers c'est à cause du surcoût de la production, ce qui n'est pas tout à fait vrai."

L'UFC-Que Choisir s'appuie sur une enquête réalisée entre mai 2016 et mai 2017 en France tant chez les agriculteurs que dans 1541 grandes surfaces. Elle a notamment réalisé un panier moyen annuel de fruits et légumes conventionnels et bio. Le conventionnel est à 368 euros, le bio ressort lui à 660 euros, soit 292 euros de plus (+79%).

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Mais ces 292 euros vont-ils dans la poche des agriculteurs? Pas vraiment. La production bio est plus coûteuse (il faut désherber à la main par exemple) et les rendements à l'hectare sont inférieurs. Sauf que selon l'association de consommateurs, sur les 292 euros du surcoût du panier, moins de la moitié, soit 141 euros iraient dans la poche du producteur. Le solde serait constitué du surcoût de la TVA (de 19 euros sur le panier conventionnel, elle passe à 35 euros) et surtout de la marge du distributeur bien plus juteuse (135 euros).

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Or selon l'UFC-Que Choisir, rien ne justifierait de tels surcoûts. Elle explique en substance que si le bio est plus coûteux à produire, il n'est pas plus cher à vendre. Et les écarts de marge varient fortement selon les produits. La surmarge (l'écart entre la marge du produit conventionnel et du produit bio) atteint ainsi 191% pour le poireau (de 1,07 euro le kilo à 3,13 euros pour du bio), 163% pour la pomme (de 0,77 euro à 2,02 euros) ou encore 145% pour la tomate (de 1,27 euro à 3,12 euros). "En baissant ces surmarges de moitié, on pourrait enclencher un cercle vertueux, permettre à plus de consommateurs d'accéder au bio et permettre aux producteurs d'avoir plus de débouchés", explique Alain Bazot.

Car outre les marges élevées, les grandes surfaces n'auraient pas une gestion très rigoureuse du rayon bio, assure l'association. L'enquête de l'UFC-que Choisir semble en effet montrer que ce rayon est bien moins achalandé que les autres. 43% des magasins visités ne proposeraient pas de tomates ou de pommes bio par exemple, les deux produits pourtant les plus consommés par les Français. Et c'est Système U, Intermarché et Monoprix qui seraient les pires élèves en la matière.

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En résumé, selon l'association de consommateurs, le bio ne serait qu'un argument marketing pour la distribution qui en profiterait pour se servir de copieuses marges au passage.

"Notre marge est même plus faible sur le bio!"

Évidemment, cette étude ne plaît pas du tout aux enseignes. À commencer par Lidl dont le patron Michel Biero émet des doutes sur le sérieux de l'enquête. "Elle donne l'impression d'avoir été réalisée par des bobos parisiens qui sont allés chez Monoprix et Carrefour City pour relever leurs prix, s'agace le patron du discounter. Ce ne sont pas du tout les marges que nous pratiquons chez Lidl. Sur la banane bio par exemple: nous l'achetons 28% plus cher mais nous ne la vendons que 20% de plus que la conventionnelle. Sur le concombre bio c'est pareil: nous l'achetons 28% plus cher et nous le vendons que 15% plus cher". L'enseigne assure qu'elle ne pratique par de surmarge sur le bio et que cette étude sème le trouble dans la tête des clients en mettant toutes les enseignes dans le même panier.

"Le vrai problème du bio c'est qu'il n'y a pas assez d'offres, explique Michel Biero. Seule 7% de la production française est en bio, c'est trop peu. On aide à convertir des exploitations conventionnelles en bio mais ça prend du temps. Il faut trois ans par exemple pour qu'un hectare d'endives commence à produire".

80% des produits bio sont importés

Même agacement chez Système U qui dénonce une étude "effarante". "Pour l'UFC-Que Choisir, on est toujours dans le camp du méchant, dénonce Thierry Desouches, le responsable des relations extérieures de l'enseigne. Il n'y a pas de surmarge sur les produits bio, c'est faux. D'abord il faut savoir que les produits bio doivent être emballés, il y a peut-être un peu plus de perte et surtout il n'y a pas de promos sur ces produits car nous ne disposons pas assez d'offres. Il faut savoir que 80% des produits bio vendus en France sont importés, c'est cela le vrai problème du bio dans notre pays." Par ailleurs, les pertes sont aussi fatalement plus coûteuses que pour des produits conventionnels plus chers.

En ce qui concerne les enseignes spécialisées comme Biocoop, Naturalia et les autres, l'UFC-Que Choisir assure que les marges sont moins importantes que dans la grande distribution. Ce qui fait sourire Thierry Desouches de Système U: "Mais bien sûr! Nous vendons notre litre de lait 0,99 euro quand Biocoop le vend 1,30 euro. Ils l'achètent peut-être un peu plus cher que nous mais pas dans ces proportions!"

Frédéric Bianchi
https://twitter.com/FredericBianchi Frédéric Bianchi Journaliste BFM Éco