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Chez SEB, réparer est devenu aussi important que vendre

Le groupe SEB, qui réfléchit à la réparabilité de ses produits depuis 2008, est dirigé depuis 2000 par Thierry de la Tour d'Artaise.

Le groupe SEB, qui réfléchit à la réparabilité de ses produits depuis 2008, est dirigé depuis 2000 par Thierry de la Tour d'Artaise. - Jack Guez-AFP

Pour garantir tous ses produits réparables sur 10 ans, le géant du petit électroménager stocke 5 millions de pièces détachées issues de 40.000 références. Un modèle coûteux et atypique que SEB estime rentable à terme.

SEB combat à sa manière l'obsolescence programmée qui suscite la grogne croissante de nombre de consommateurs. Le spécialiste français du petit électroménager fait le pari qu'un produit facilement réparable hors garantie, sera un puissant vecteur pour fidéliser un client.

"Quand un de nos produits présentait un défaut et qu'il n'était pas réparable, le consommateur rachetait du neuf mais pas forcément chez SEB. En lui garantissant la réparabilité de son produit sur 10 ans, on fait le pari qu'il achètera à terme plus spontanément un appareil d'une de nos marques" explique Alain Pautrot, directeur de la satisfaction client et de l'après-vente pour le groupe SEB.

En ce début 2016, l'industriel s'engage en effet à réparer sur 10 ans tous les produits de ses vingt marques (Calor, Krups, Rowenta, Tefal,...). "Un logo indiquant de manière visible cet engagement va apparaître très bientôt sur les produits" souligne ce directeur.

SEB a baissé de 30% les prix de ses pièces détachées

Pour en arriver là, SEB est désormais prêt à fournir, en amont, plus de 40 000 références de pièces détachées. Le groupe stocke, pour ce faire, 5 millions de pièces dans un gigantesque entrepôt de 15.000 mètres carrés, afin de mieux servir son réseau de réparateurs indépendants.

Cette véritable révolution "industrielle" à rebours de la tendance actuelle suppose un investissement conséquent et un changement complet de l'approche du SAV (service après-vente). Mais un tel revirement est le fruit d'une inflexion stratégique mûrement réfléchie, depuis huit ans maintenant. 

"Il a fallu revoir en amont notre politique d'achat sur les pièces de rechange. On a aussi révisé notre politique tarifaire vis-à-vis des pièces détachées, dont nous avons baissé le prix de 30% en 2013. Grâce à cette baisse, depuis 2013, nous avons constaté une hausse de 25% des réparations effectuées hors garantie " explique Alain Pautrot.

Des imprimantes 3D fabriqueront des pièces à la demande

La garantie de réparation sur 10 ans a un coût que SEB n'a pas voulu communiquer. Elle a aussi une vertu en obligeant à repenser la conception d'un produit pour qu'il devienne réparable alors qu'il ne l'était pas.

"Il a fallu six mois de travail à nos équipes pour remplacer sur une centrale avec générateur de vapeur, une pièce soudée, sertie en force, par une pièce clipsée, aisément démontable" souligne le directeur de la satisfaction client de SEB. Résultat: l'industriel français affirme que 97% des produits vendus sous ses marques en 2015 étaient réparables, soit totalement (67%) soit partiellement (30%).

Le numéro un français du petit électroménager ne compte pas s'arrêter là. SEB est en train de sélectionner des imprimantes 3D qui lui permettraient de fabriquer à la demande des pièces détachées qui n'existent plus car trop vieilles. "Nous avons réussi à fabriquer la pièce disparue d'un hachoir vieux de 25 ans" explique, avec un brin de fierté, Alain Pautrot.

"Le défi le plus important consiste à faire changer les mentalités y compris chez les clients, en démontrant que la consommation responsable faisait désormais partie de notre univers" conclut-il.

Les ventes mondiales de SEB en croissance de 12% en 2015

En dépit d'un environnement économique mondial marqué par une conjoncture dégradée dans les grands pays émergents (Russie et Brésil) et de tensions fortes dans certaines régions du globe, le chiffre d'affaires du groupe SEB a atteint 4,770 milliards d'euros, en hausse de 12,1 % en 2015.

Cette croissance (+ 517 millions d'euros) des ventes se décompose de la façon suivante :

-croissance organique de 8% (+340 millions d'euros) issue des volumes, des prix et du mix-produit.

-effet devises de 3,5% (+149 millions d'euros) résultant d’impacts positifs du dollar et du yuan, notamment, et d’effets négatifs du real, du rouble et du peso colombien, essentiellement.

-effet périmètre de 0,6% (+28 millions d'euros) provenant de l’intégration, depuis le 1er septembre 2015, de la société scandinave nouvellement acquise, OBH Nordica.

Frédéric Bergé
https://twitter.com/BergeFrederic Frédéric Bergé Journaliste BFM Éco