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Comment le fisc contribue sans le vouloir aux tarifs imbattables d'Airbnb

Airbnb concurrence les hôtels traditionnels grâce à des avantages fiscaux.

Airbnb concurrence les hôtels traditionnels grâce à des avantages fiscaux. - D Dipasupil / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP

Selon une enquête du Financial Times, un tiers des économies réalisées par les clients Airbnb serait dû à la fiscalité quasiment inexistante qui pèsent sur les revenus générés par la plateforme. De quoi fixer des prix défiant toute concurrence et gagner en compétitivité face aux hôtels traditionnels.

C’est une enquête qui pourrait raviver la discorde entre les hôtels traditionnels et la plateforme de réservation de logements entre particuliers, Airbnb. Selon le Financial Times, qui se base sur la ville de Londres, environ un tiers des économies réalisées par un client d’Airbnb sur le prix moyen d’une chambre d’hôtel dans la capitale britannique est dû aux avantages fiscaux. A ce titre, le quotidien d’outre-Manche ajoute que “49% des utilisateurs d’Airbnb aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, en France et en Allemagne ont déjà remplacé un séjour à l’hôtel par un séjour réservé sur la plateforme en ligne”.

La différence de prix est d’autant plus criante au Royaume-Uni, pays où les hôtels traditionnels sont soumis à un impôt foncier et une TVA particulièrement élevés, tandis que les propriétaires qui louent leurs biens sur Airbnb bénéficient de leur côté d’importantes exonérations fiscales. Si bien qu’en 2015, le prix moyen payé par les clients pour une nuit dans une chambre d’hôtel londonienne atteignait l'équivalent de 252 euros, TVA comprise, contre 157 euros pour Airbnb, selon le rapport Hotelschool cité par le Financial Times. Les écarts liés à l’imposition sont évalués à plusieurs dizaines de millions de livres dans la capitale britannique où les réservations Airbnb auraient représenté environ 600 millions de dollars (574 millions d’euros) en 2016.

De son côté, Airbnb se défend en invoquant une comparaison trompeuse qui met au même niveau un individu prêt à louer occasionnellement l'un de ses biens immobiliers et un hôtel qui aurait un taux d’occupation élevé. En d’autres termes, la firme californienne estime que la fiscalité est correctement proportionnée au niveau d’activité prévue.

Des règles de plus en plus strictes

Toutefois, le géant de la réservation de logements entre particuliers voit ses marges de manœuvre réduites à mesure que son activité se développe. Peu à peu, dans plusieurs grandes villes du monde, une réglementation accrue se met en place pour mettre un terme, ou du moins limiter, la concurrence déloyale tant décriée par les hôteliers qui reprochent régulièrement aux propriétaires inscrits sur Airbnb de ne pas payer de TVA, de charges sociales ou de taxes de séjour.

À Paris, depuis le 1er octobre 2015, Airbnb collecte une taxe de séjour pour le compte des propriétaires. Celle-ci est fixée à 83 centimes d’euros par nuit. Par ailleurs, un loueur est censé déclarer l'intégralité des revenus qu'il perçoit. Ces derniers sont soumis à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) s'ils sont inférieurs à 32.900 euros. Auquel cas, l'administration fiscale appliquera un abattement fiscal de 50% et seule la moitié des loyers perçus sera imposée. Au-delà de ce seuil, les propriétaires doivent effectuer une déclaration professionnelle.

Mais dans les faits, peu de revenus sont déclarés à l'État dont les contrôles restent très limités. Ce dernier se montrera pourtant moins clément à compter de 2019 puisque les revenus tirés des locations seront automatiquement transmis aux services fiscaux. Enfin, un dernier article inclus dans le budget de la Sécurité sociale pour 2017 dispose que les particuliers louant un bien sur Airbnb ou tout autre plateforme collaborative devra s'affilier au Régime social des indépendants (RSI), en cas de revenus supérieurs à 23.000 euros par an, et payer, de fait, des cotisations sociales. De quoi inciter les propriétaires adeptes d'Airbnb à augmenter leur tarif et donc à réduire leur avantage compétitif sur l'hôtellerie.

P.Louis