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Comment les métaux de smartphone sont récupérés et reconditionnés

Dans le port du Havre, des carcasses d'ordinateurs et de smartphones arrivent par conteneurs entiers, prêtes à être réduites en pièces afin d'en récupérer les précieux matériaux

Dans le port du Havre, des carcasses d'ordinateurs et de smartphones arrivent par conteneurs entiers, prêtes à être réduites en pièces afin d'en récupérer les précieux matériaux - Charly Triballeau-AFP

Comment récupérer et reconditionner les métaux souvent précieux contenus dans nos mobiles. Une PME normande intègre la chaîne du retraitement des déchets électriques et électroniques. Les opérateurs télécoms s'investissent aussi dans la récupération de téléphones mobiles usagés.

Le constat est simple: les métaux qui servent à fabriquer les téléphones mobiles ne sont pas inépuisables. Or, il y aurait en France, par exemple, plus de 100 millions de téléphones portables inutilisés dormant dans les tiroirs!

"Les industriels sentent la raréfaction du métal", constate Serge Kimbel, le directeur général de Morphosis, la première entreprise à intégrer toute la chaîne du retraitement des déchets électriques et électroniques en France.

"Il y a vraiment une seconde vie. (...) Les matières qui arrivent dans notre usine sont transformées sous forme de sels et permettent la fabrication d'autres objets", explique Serge Kimbel.

"Le métal que l'on produit aujourd'hui est réinjecté principalement chez des industriels français, dans le domaine du solaire par exemple, dans le domaine des contacteurs, dans le domaine des batteries..." ajoute le dirigeant de cette PME.

Morphosis récupère la quarantaine de métaux contenus dans les mobiles : du cuivre, de l'argent, du palladium, du cobalt, de l'étain, du tungstène, du platine, un peu d'or...
Morphosis récupère la quarantaine de métaux contenus dans les mobiles : du cuivre, de l'argent, du palladium, du cobalt, de l'étain, du tungstène, du platine, un peu d'or... © Charly Triballeau-AFP

Morphosis emploie 50 personnes sur deux sites plutôt discrets, près du port du Havre. Le premier, un hangar, sert surtout au tri et aux différents tests. C'est dans le second site, une petite usine sécurisée installée dans les anciens abattoirs de la ville, que l'on récupère la quarantaine de métaux contenus dans les appareils: surtout du cuivre, mais aussi de l'argent, du palladium, du cobalt, de l'étain, du tungstène, du platine, un peu d'or...

On fait concrètement subir aux cartes électroniques une succession de traitements thermiques, chimiques et mécaniques, pour dissocier les métaux, qui seront ensuite fondus et affinés par électrolyse.

"Les industriels ne veulent pas savoir si un métal est recyclé ou pas", ce qui compte pour eux, c'est "qu'il respecte un cahier des charges très précis", relève le patron de la PME normande.

La filière intéresse aussi les opérateurs télécoms, qui sont les principaux vendeurs de mobiles et se veulent responsables en termes environnementaux. Parmi les attentes des clients, "l'environnement (...) est extrêmement important" argumente Christine Albanel, chargée de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) à Orange.

L'opérateur historique veut récupérer d'ici 2020, "par des offres commerciales intéressantes", 30 téléphones usagés pour 100 appareils placés auprès de ses clients français, contre "autour de 20" aujourd'hui.

Morphosis récupère les métaux de téléphones africains

Une partie de ces mobiles est reconditionnée et revendue d'occasion, notamment en Afrique. Orange -très présent sur ce continent- et Emmaüs y ont d'ailleurs lancé en 2010 un système de collecte de vieux appareils en s'appuyant sur Les Ateliers du Bocage. Cette entreprise solidaire de l'Ouest de la France est spécialisée dans la collecte et le réemploi des équipements électroniques et bureautiques.

L'association est présente dans cinq pays (Burkina Faso, Bénin, Niger, Côte d'Ivoire, Cameroun), l'objectif étant d'ajouter un pays par an, sur ce continent où les filières de récupération des déchets sont quasi inexistantes. Morphosis a ainsi récupéré au Havre 21 conteneurs de composants issus de ces portables africains.

Il faudra accélérer la cadence si l'on veut aller plus loin dans l'économie circulaire et arriver un jour à fabriquer des appareils en n'utilisant que des matériaux recyclés, un but que s'est récemment donné le géant informatique américain Apple - sans toutefois se fixer d'échéance.

"C'est tout à fait faisable", s'enthousiasme Serge Kimbel, interrogé par l'AFP. "On essaie de prendre contact avec eux pour voir comment réintégrer les métaux qu'on récupère dans la fabrication de leurs nouveaux appareils!"

BFMBusiness avec AFP (Jean Liou)