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Des géants de la Tech courtisent les femmes au foyer

"IBM, PayPal, Google mettent en oeuvre des programmes et stages pour attirer les femmes souhaitant reprendre une activité professionnelle après avoir élevé leurs enfants."

"La guerre des talents est si intense que nous rencontrons des PDG qui se demandent: qui n’avons-nous pas encore sollicité? Peut-être devons-nous aller chercher les femmes au foyer?", raconte au Wall Street Journal Valérie Frederickson, qui dirige un cabinet de recrutement prestataire de géants comme Yahoo ou Facebook.

Dans la Silicon Valley, les entreprises de la Tech se livrent bataille pour parvenir à recruter les meilleurs. Depuis quelques temps, elles sont de plus en plus nombreuses à s’intéresser à un nouveau profil de candidats: les femmes reprenant une activité après avoir cessé de travailler pour élever leurs enfants.

Perte de savoir-faire

IBM, PayPal, Google (Alphabet), certaines start-up… Autant d’entreprises qui organisent des programmes et stages pour attirer les femmes souhaitant reprendre une activité professionnelle, et elles sont légion. D’après les statistiques de l’ONG The Center for Talent Innovation, 90% des femmes ayant mis leur carrière en suspens pour élever leurs enfants souhaitent reprendre une activité. Toutefois, seules 40% d’entre elles retrouvent un emploi à temps plein, 25% trouvent des emplois à temps partiel et 10% se mettent à leur compte.

Cette difficulté à retrouver un emploi stable s’explique notamment par un éloignement de l’entreprise pendant plusieurs années, ayant entraîné une certaine perte de savoir-faire. La personne n’est parfois plus au fait des technologies en vigueur, par exemple. Pour pallier cela, des sociétés pilotent des sessions de formation de quelques semaines à quelques mois, dans l’objectif de former ces femmes puis d’en employer certaines.

Les exemples ne manquent pas. IBM a lancé un programme en 2012, à la suite duquel il a embauché une douzaine de femmes. Une structure d’accompagnement de retour à l’emploi s’est créée: le Reboot Career Accelerator for Women. Il dispense une formation de deux mois autour de thématiques en vogue comme le cloud computing. D’autres secteurs proposent aussi des formations aux femmes au foyer, dont les banques Goldman Sachs, Morgan Stanley et JP Morgan, ainsi que le cabinet de conseil McKinsey.

Un "avantage compétitif"

Embaucher des femmes qui reprennent une activité "est une source d’avantage compétitif", juge John Donahoe, l’un des membres du conseil d’administration de Paypal. Il considère qu’il y a moins de concurrence sur ces profils, et qu’il est plus facile de convaincre ces femmes de venir dans leurs entreprises que d’autres professionnels, courtisés de toutes parts.

En développant ces formations, les entreprises de la Tech apportent aussi une réponse à des critiques récemment formulées. Le peu de présence féminine dans ces entreprises leur est souvent reproché. Pire, certaines sont considérées comme machistes.

Pour recenser leurs écarts, Romy Newman et Georgene Huang, qui ont tenu des postes à responsabilités en Californie chez ChartBeat et Dow Jones, ont créé le site de recueil de témoignages FairyGodboss. Un classement des entreprises high-tech selon l’équité constatée dans le traitement des hommes et des femmes y a été publié il y a quelques semaines. Résultat: 59% de témoignages selon lesquels les femmes sont heureuses chez Google, 58% chez Microsoft, mais seulement 37% chez Hewlett-Packard et même 30% chez Oracle. Parmi les salariés interrogés, 90% affirment avoir été témoins de comportements clairement machistes.

Si elles ont un intérêt compétitif, ces formations à destination des mères au foyer peuvent aussi redorer l’image de certaines entreprises. De quoi améliorer leur marque employeur. La boucle est bouclée.

Adeline Raynal