BFM Business
Culture loisirs

Disney+ débarque en France à un moment idéal mais sur un marché au bord de la saturation

Confinement qui se prolonge, fréquentation des cinémas proche de zéro, le service du géant américain a toutes les chances de cartonner malgré une concurrence féroce.

C'est le grand jour pour les fans de la Reine des Neiges, de Star Wars et des Avengers. Le service de streaming Disney+ débarque aujourd'hui en France et donne accès à plus de 500 films et des milliers d'épisodes de séries, dont une trentaine de créations inédites.

Fort de 29 millions d'abonnés dans les premiers pays où il a été lancé (Etats-Unis, Canada, Pays-Bas, Australie, Nouvelle-Zélande et Porto Rico), le service a généré 5 millions de téléchargements dans les boutiques d'applications européennes le 24 mars, selon le spécialiste de l'analyse des données des applications mobiles App Annie.

Positionnement familial

L'adhésion devrait être massive tant le moment est idéal pour le géant américain. Avec les écoles fermées et les enfants à la maison, la période est propice au streaming et particulièrement à un service familial, comprenant de nombreux dessins animés et donnant la possibilité de créer des profils réservés aux moins de sept ans, et de regarder jusqu'à 4 contenus différents simultanément.

D'autant plus que les cinémas sont fermés et que personne ne sait quand ils pourront rouvrir. Les prévisions du secteur sont d'ailleurs catastrophiques. Selon le CNC (le Centre national du cinéma et de l’image animée), après 13 millions d’entrées perdues en mars, soit une chute annuelle de 68,3%, et un premier trimestre 2020 à son plus bas niveau depuis 1997 (36,35 millions d’entrées), avril et mai devraient être du même acabit.

Le secteur prévoit un manque à gagner compris entre 36 et 48 millions d’entrées au global cette année, selon le scénario optimiste ou pessimiste de réouvertures des salles (avril, mai, voire juin). Au total, les entrées devraient se situer entre 56 et 68 millions, contre 104 millions en 2019.

Soit un véritable boulevard pour Disney+ mais aussi ses concurrents historiques comme Netflix, qui domine le marché français avec 6,7 millions d'abonnés au dernier comptage, Amazon Prime Video ou encore OCS (3,3 millions de clients en juin 2019). Il y aussi l'acteur historique: Canal +. La chaîne cryptée comptait 8,416 millions d'abonnés en France en 2019 (toutes offres confondues), soit 195.000 abonnés de moins sur un an. Mais Canal + s'est associé avec Disney + pour être le distributeur exclusif de ce nouveau service dans l'Hexagone. Il pourrait donc lui aussi profiter de ce lancement. 

Globalement, 18 millions de Français ont utilisé un service de SVOD en 2019 en France selon Médiamétrie pour un chiffre d'affaires global de 365 millions d'euros (selon Statista), soit 39 euros par utilisateur et par an contre 81 euros aux Etats-Unis.

Le mieux placé pour l'après

Reste que le marché est bien encombré et la crise actuelle n'incite pas vraiment aux dépenses supplémentaires. D'ailleurs, pour le moment, seuls 9% des foyers français ayant souscrit une offre de streaming sont abonnés à 2 services, et 3% à 3 services, selon une étude NPA Conseil publiée le 18 mars dernier.

"Même si le contexte est morose, même si les foyers hésitent à augmenter leurs niveaux de dépenses pour ce type de services, Disney+ profite d'une valeur suffisamment attractive car il répond à une demande un peu différente, plus familiale qu'individuelle. C'est un super moment pour se lancer", nous explique Renaud Kayanakis, managing director en charge des activités Médias au sein du cabinet SIA.

Disney+ aurait donc toutes les chances d'être utilisé en plus d'autres abonnements de streaming. D'autant plus qu'avec un prix fixé à 6,99 euros par mois (5,99 livres au Royaume-Uni), la plateforme a un positionnement meilleur marché que Netflix (de 7,99 à 15,99 euros par mois en France).

"On sent qu'il y a beaucoup d'attente en Europe et nous sommes très confiants", avait indiqué à l'AFP le directeur de la division "Direct-to-consumer & International" de Disney Kevin Mayer, quelques jours avant cette phase d'expansion. "Nous espérons que le succès sera aussi grand qu'aux Etats-Unis et que le lancement se passera aussi bien, voire mieux car nous avons pu tester la technologie", avait-il ajouté.

Une fois le confinement levé, l'attractivité de Disney sera-t-elle toujours au rendez-vous? "Le vrai enjeu sera de retenir ceux qui ont été séduits aujourd'hui. Mais une chose est sûre, l'après coronavirus sera différent en termes d'usages. Nous pensons que les plates-formes globales, familiales seront les mieux placées", ajoute Renaud Kayanakis. Du pain béni pour Mickey.

Olivier Chicheportiche avec AFP