Ecoutes judiciaires: la guerre est déclarée entre les PME et l'Etat
Le torchon brûle entre l'Etat et les PME spécialisées dans les écoutes judiciaires. Sur ce marché cinq entreprises couvrent 90% des demandes émanant de la justice.
Quatre d'entre elles, à savoir Foretec, Elektron, Midi System et SGME avaient, vendredi 21 novembre, menacé de ne plus répondre aux demandes envoyées par la justice dès ce mardi 25 novembre, comme l'avait indiqué Les Echos.
Lundi soir, elles ont décidé de passer à l'acte, annonçant qu'elles ne répondraient plus aux nouvelles demandes à partir de lundi minuit, et estimant ne pas avoir reçu de véritables garanties de la chancellerie sur leur avenir.
Mardi matin, le ministère a réagi. Il va ainsi demander "à tous les parquets" de "poursuivre systématiquement" les sociétés qui refuseraient de répondre aux demandes de la justice. C'est ce qu'a indiqué le porte-parole du ministère Pierre Rancé.
Ces entreprises reçoivent les données envoyées par les opérateurs et les enregistrent. Les enquêteurs ont un code pour ensuite accéder aux enregistrements des conversations, sms ou listes d'appels téléphoniques.
Une importante incertitude
Ces PME font actuellement face à une importante incertitude pesant sur leur avenir. L'Etat a, en effet, décidé en 2006 par décret de centraliser toutes les demandes sur une seule plateforme nationale confiée à Thales.
Cette dernière, appelée Plateforme nationale des interceptions judiciaires (PNIJ) doit mettre fin au système en place et acter la mort de ces PME.
Problème: ce nouveau dispositif prend du retard. Il aurait dû être opérationnel dès avril dernier. Or les PME, qui s'occupent donc toujours des écoutes juridiques, doivent actuellement faire face au renouvellement de leur matériel, notamment leurs serveurs.
Et l'incertitude entourant le déploiement de la nouvelle plateforme les empêche d'avoir une vision claire sur leur activité. "Il me faut un minimum de deux ans et demi d'engagement pour que les banquiers me suivent", expliquait ainsi Michel Besnier, le PDG d'Elektron, à BFMTV, vendredi dernier.
Un contrat en bonne et due forme
En conséquence, les quatre PME réclament à la chancellerie un contrat en bonne et due forme, le temps que cette nouvelle plateforme soit opérationnelle. Elles ont ainsi donné quinze jours à l'Etat pour arriver à "une lettre d'engagement fixant les grandes lignes du contrat pour une période transitoire" avec un engagement sur trente mois.
Au-delà de cet ultimatum, ces quatre PME contestent depuis deux ans le contrat passé entre l'Etat et Thalès pour la création de cette plateforme. Elles ont ainsi saisi la justice administrative. La Cour d'appel de Paris avait d'ailleurs reconnu que ces entreprises ont été "écartées irrégulièrement" de l'appel d'offres confidentiel lancé par la chancellerie, explique les Echos. Ces quatre PME ont récemment saisi la Commission européenne d'une plainte pour "violation des règles de la concurrence".