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"Est-ce que, pour 3,21 euros par mois, les Français sont prêts à sauver les agriculteurs?"

À la veille de l'ouverture du Salon de l'Agriculture, la présidente de la FNSEA, Christiane Lambert, a posé les lignes rouges des agriculteurs face au gouvernement, et taclé "les mensonges" et le "système pervers" de Leclerc.

À la veille de l'ouverture du salon de l'Agriculture 2018, et alors que le président Macron doit s'y rendre pour faire annonces aux agriculteurs, la présidente de la FNSEA a posé les lignes rouges de la Fédération et mis en garde le chef de l'État: "Il va être accueilli poliment et respectueusement mais de manière très directe", a indiqué Christiane Lambert sur RMC-BFMTV.

Premier sujet d'achoppement, déjà été largement évoqué jeudi à l'Élysée où 800 jeunes agriculteurs étaient reçus: le projet d'accord entre l'Union européenne et le Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay et Uruguay). "La FNSEA se prononce contre tout accord, Macron veut cet accord", a expliqué la dirigeante de la plus grosse fédération des agriculteurs français. "C'est un sujet de désaccord profond".

Des viandes qui ne respectent aucune norme

La fédération estime que 20.000 à 25.000 exploitations françaises pourraient disparaître s'il était signé. Sa présidente pointe le "scandale sanitaire sans précédent à cause de viande avariée, avec de la corruption" que vient de vivre le Brésil. Et le fait qu'"on laisse venir ces produits d'animaux dont on sait qu'on leur donne des antibiotiques toute leur vie, qui mangent des farines animales, qui n'ont pas de traçabilité". En outre, "ces viandes auront un prix inférieur de 30% à nos viandes, elles vont faire s'effondrer tout le secteur", a-t-elle ajouté.

Autre sujet: le bio, auquel le gouvernement enjoint les agriculteurs de se convertir. '"Aujourd'hui nous produisons 70% du bio dont nous avons besoin. C'est vrai que c'est idiot d'en importer 30% alors que nous pouvons le faire sur notre territoire. Donc il faut que les distributeurs et les industriels se tournent vers les agriculteurs et contractualisent dans la durée", a-t-elle estimé. Sur le modèle "des agriculteurs de porc qui se convertissent au bio, c'est une garantie pour le banquier, parce qu'il faut reconstruire tous les bâtiments et réorganiser l'exploitation", souligne Christiane Lambert.

Le système Leclerc "pervers"

Dernier point: la guerre des prix menés par les industriels et les agriculteurs, à laquelle les états généraux de l'alimentation n'ont pas mis un terme, d'après la présidente de la FNSEA. "La confrontation est terrible" avec la grande distribution. C'est encore des "-2, -3 voire -4% qui nous sont demandés, sauf sur certains produits parce qu'ils se sont tellement ridiculisés à manquer de beurre dans les rayons (...) qu'aujourd'hui, ils sont prêts à payer.

En ligne de mire, tout particulièrement, Michel-Édouard Leclerc, dont Christiane Lambert fustige les méthodes. "Son système de prix le plus bas est pervers. Aujourd'hui, les consommateurs sont prêts à payer plus cher sur certains produits, et d'ailleurs, souvent, ils vont les chercher en dehors des grandes surfaces", affirme Christiane Lambert.

Elle dénonce le "mensonge" du patron des supermarchés Leclerc qui prétendait que les nouvelles règles adoptées après les états généraux de l'alimentation allaient coûter 5 milliards. "C'est faux, la hausse, pour un ménage français moyen, atteindra 3,21 euros par mois. Est-ce que, pour cette somme, les ménages français sont prêts à sauver les agriculteurs? C'est cela qui est sur la table, pas du tout les chiffres pharaoniques que donne monsieur Leclerc. Ne croyez pas ces oiseaux de mauvaise augure", conclut-elle.

N.G. avec AFP