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Qui est Reworld, le repreneur des magazines de Lagardère?

Reworld est le favori pour le rachat des magazines de Lagardère

Reworld est le favori pour le rachat des magazines de Lagardère - Crédits photo : nom de l'auteur / SOURCE

Le groupe Reworld est en passe de racheter plusieurs magazines vendus par Lagardère. Créé en 2012, le groupe reprend à tour de bras des titres en difficulté comme 'Marie France' ou 'Télé Magazine'. Il les redresse en les développant sur le web.

Retenez ce nom: Reworld Media. C'est le dernier papivore de la presse française. Créé en 2012, ce groupe rachète à tour de bras les vieilles gloires de la presse magazine.

Il y a un an, il a d'abord racheté pour un euro symbolique le vénérable Marie France au groupe Marie Claire. Il y a six mois, il a repris les magazines français de l'allemand Springer (Télé Magazine...) distribués aux caisses des supermarchés. Last but not least, il viendrait de remporter les magazines mis en vente par Lagardère (225 personnes, 40 millions d'euros de chiffre d'affaires), là encore pour une valeur négative.

"La presse n'est pas morte"

"La presse n'est pas morte", répète le PDG de Reworld, Pascal Chevalier. Mais pourquoi diable rachète-t-il des magazines déclinants dont les éditeurs traditionnels ne veulent plus?

L'explication est simple: la marque de ces magazines a toujours une valeur. "Ce qui m'intéresse, c'est la notoriété de la marque. Il est beaucoup plus simple de rajeunir, de valoriser une marque existante, que de la créer", explique Pascal Chevalier dans une interview à Décideurs TV.

Reworld utilise ensuite cette marque pour proposer des services web via quatre canaux: site internet, réseaux sociaux, application mobile, et newsletter envoyée par email. Reworld a d'ailleurs démarré en rachetant une start up espagnole spécialisée dans le marketing par email qui possède 20 millions d'adresses emails qualifiées, dont 5 millions en France.

Fusion entre rédaction et publicité

La recette de Reworld, résumée par la formule "content commerce", comporte un autre ingrédient: l'imbrication étroite entre éditorial et publicité. Comme l'explique Pascal Chevalier, "l'éditorial est totalement fusionné. Je pense même que les régies et la rédaction doivent être fusionnées. C'est plutôt la partie production de contenus, c'est-à-dire l'éditorial, la rédaction, qui est capable de scénariser une marque. [...] La frontière n'existe plus aujourd'hui".

Par exemple, sur les sites féminins de Reworld, "le contenu est fait pour aider la consommatrice à mieux acheter. La consommatrice aime savoir où l'on peut acheter un produit", explique Pascal Chevalier.

Selon lui, "les groupes médias se doivent d'être des marketplaces: on opère pas l'acte d'achat, mais on dit où aller". Les applications mobiles de Reworld proposent ainsi des bons plans en fonction de votre localisation.

Une fortune venue du web

Pascal Chevalier sait de quoi il parle: ingénieur en informatique, c'est l'ancien PDG de Netbooster, une société spécialisée dans le marketing internet. Il en a repris les rennes en 2005, l'a redressée, développée et introduite sur Alternext en 2006. Il a ainsi fait fortune: il avait pris 20% du capital pour une bouchée de pain (70.000 euros), qu'il a ensuite en grande partie revendus pour une somme qu'on peut estimer approximativement autour de 3 millions d'euros (interrogé sur cette estimation, Pascal Chevalier n'a pas répondu).

En 2011, il cède la direction de Netbooster et commence à s'intéresser à la presse. Il étudie un rachat de la Tribune, mais y renonce finalement. Il investit alors dans Reworld, petite société qui détient quelques sites consacrés au développement durable, et qui surtout présente l'avantage d'être côté au marché libre. Il la réoriente vers trois domaines: le feminin, la gastronomie, et le divertissement.

Il lève ensuite 2 millions d'euros auprès des fonds ID Invest et Truffle (qui avait aussi investi dans Netbooster), qui prennent un quart du capital. Le solde reste détenu par les dirigeants: Pascal Chevalier, Gautier Normand (ex-directeur général de la Tribune) et Pablo Nowenstein (dirigeant de la société espagnole d'emailing). Aujourd'hui, Reworld capitalise 20 millions d'euros sur le marché libre. Un transfert vers Alternext est prévu mi-2014.

300 millions d'euros de chiffre d'affaires

A la suite de ses emplettes, Reworld emploie 125 personnes et a déjà réalisé 35 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2013, tout en étant "rentable depuis septembre 2013". L'acquisition des magazines de Lagardère le ferait doubler de taille.

Mais Reworld a des ambitions encore plus grandes: il veut atteindre 300 millions d'euros de chiffre d'affaires d'ici 2016 ou 2017, dont la moitié à l'international.

Car Pascal Chevalier mise beaucoup sur l'Asie. Il vient de lancer des déclinaisons locales de ses magazines. Et il finalise actuellement l'entrée au capital d'un fonds singapourien. Pour atteindre ces objectifs, 30 millions d'euros d'investissements sont prévus.

Jamal Henni