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Exclusif: Amazon perd son procès contre le fisc français

Les inspecteurs du fisc ont débarqué au centre logistique de Saran

Les inspecteurs du fisc ont débarqué au centre logistique de Saran - -

Le fisc avait mené un raid, en décembre 2010, au siège de la filiale française à Paris et au centre logistique de Saran. L'américain a tenté de les faire annuler, mais a perdu devant la Cour de cassation.

Amazon fait visiblement tout pour échapper au fisc français. On savait déjà que Bercy lui avait notifié en septembre un redressement de près de 200 millions d'euros concernant les années 2006 à 2010.

On apprend maintenant qu'Amazon a tenté -en vain- de casser cette procédure, en invoquant un vice de forme. Précisément, on découvre que le fisc a conduit le 9 décembre 2010 des raids au siège de la filiale française à Paris, mais aussi au centre logistique de Saran (Loiret).

L'américain a ensuite tenté d'invalider ces raids, ce qui aurait rendu inutilisables tous les documents saisis ce jour-là. Et il a failli réussir.

En effet, un an plus tard, la cour d'appel d'Orléans a annulé le raid mené à Saran. Mais le fisc a ensuite déposé un pourvoi devant la Cour de cassation, qui lui a récemment donné raison. La haute juridiction a annulé la décision de la cour d'appel d'Orléans, et condamné Amazon à payer 2.500 euros de frais de procédure.

Ne pas lire ce qu'on signe

En pratique, le fisc, avant d'effectuer son raid, avait demandé la permission au juge des libertés et de la détention, qui avait donné son feu vert via une ordonnance.

C'est cette ordonnance qu'Amazon a contesté, avec des arguments qui ont convaincu la cour d'appel d'Orléans. "Le juge des libertés et de la détention s'est borné à signer, sans en changer une virgule, une ordonnance pré-rédigée par l'administration [fiscale]. Il n'a manifestement pas, et en tout cas de manière sérieuse, lu l'ordonnance qu'il a signée, sans quoi il aurait constaté qu'un certain nombre de passages de l'ordonnance avaient trait au [raid] parisien, et étaient donc hors sujet; et que l'ordonnance comportait des inexactitudes et erreurs matérielles -dont Amazon a dressé une liste- qui ne pouvaient pas toutes lui échapper", a estimé la cour d'appel d'Orléans.

Mais la Cour de cassation n'est pas d'accord avec cette analyse. Elle estime que, même si le juge des libertés et de la détention signe une ordonnance pré-rédigée par le fisc, cela "ne fait pas naître de doute légitime sur son impartialité".

Les soupçons du fisc

Rappelons qu'en 2011, Amazon a réalisé dans l'Hexagone un chiffre d'affaires de 889 millions d'euros, mais n'en a déclaré au fisc que 100 millions. Explication: les filiales françaises n'assurent pas la vente des produits, mais n'ont officiellement qu'une fonction de support marketing ou logistique.

Le fisc soupçonne donc l'américain "de disposer sur le territoire français d'un centre décisionnel à partir duquel Amazon développe une activité commerciale, sans souscrire les déclarations d'impôts relatives à cette activité", indique la Cour d'appel.

Interrogé, Amazon n'a pas répondu.

Jamal Henni