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Exclusif: France Télévisions prévoit 133 millions d'euros de pertes en 2013

Le budget pluri-annuel a donné lieu à des mois de marchandages entre l'Etat et le PDG Rémy Pflimlin

Le budget pluri-annuel a donné lieu à des mois de marchandages entre l'Etat et le PDG Rémy Pflimlin - -

Le budget pluri-annuel des chaînes publiques table sur de lourdes pertes en 2013 et 2014. Il prévoit des coupes dans le budget des sports et dans les commandes aux producteurs externes.

France Télévisions va vivre deux années noires, avec de lourdes pertes et des coupes claires dans les dépenses. Voilà ce que révèle le budget pluri-annuel des chaînes publiques (disponible ici), enfin adopté cet été après des mois de marchandages. Dans le jargon administratif, ce budget s'appelle un contrat d'objectifs et de moyens (Com).

Précisément, il s'agit d'un avenant à un Com antérieur conclu en 2011 avec le gouvernement précédent. Le nouveau Com doit être définitivement approuvé en novembre.

Concrètement, il détaille les ressources que l'Etat accordera aux chaînes publiques, et les économies que celles-ci devront faire. Revue de détail.

1-l'équilibre des comptes

Le budget prévoit de lourdes pertes en 2013 et 2014, avant un retour à l'équilibre en 2015. Selon le texte, le retour à l'équilibre en 2015 reste "la priorité", mais la direction, cherchant à se couvrir, souligne toutefois qu'il "existe un aléa" sur cet objectif.

Concernant l'exerice 2013, le Com prévoit une perte record de 133 millions d'euros, largement dûe à une provision de 89 millions d'euros dûe au plan de départs volontaires. Sans cela, la perte courante s'élèverait à 44 millions d'euros. Rappelons qu'en avril, Les Echos avaient évoqué une fourchette de 120 à 130 millions d'euros de pertes.

En outre, les recettes opérationnelles seront inférieures "d'une trentaine de millions d'euros" aux prévisions de l'ancien Com, notamment en raison de dépenses non prévues, essentiellement un nouveau site internet destiné aux enfants, qui coûtera 8 millions.

2-les dépenses

Le nouveau Com détaille les différentes coupes qui vont être opérées dans les dépenses.

C'est surtout le sport qui va devoir se réduire la ceinture. En effet, son budget va diminuer de -24 millions d'euros (-12%) entre 2012 et 2015. Pour cela, les chaînes publiques vont "limiter ou partager l'acquisition de certains droits, hors événements majeurs et incontournables, comme le Tour de France et les Jeux olympiques", indique le texte, qui, en revanche, ne dit rien sur Roland Garros...

L'information est préservée, et verra son budget progresser de +0,15% par an.

Le reste des programmes (hors régions) devra baisser de -1,4% par an, soit -27 millions d'euros entre 2012 et 2015. Pour y arriver, le service public va notamment "réviser les moyens consacrés à France 4 et France Ô, et aux programmes diffusés aux heures de très faibles audience".

En outre, les commandes d'oeuvres audiovisuelles aux producteurs extérieurs vont baisser à 400 millions d'euros par an en 2013, 2014 et 2015.

De même, l'investissement dans les films français tombera à 57 millions en 2013, 2014 et 2015, soit -6 millions par rapport à 2012, et -3 millions par rapport à l'ancien Com.

Enfin, le groupe compte "renégocier les prix suite à des audits" des coûts de production des émissions commandées à des producteurs extérieurs. Il va notamment mettre en place des "règles de transparence", qui porteront sur "la réalité des comptes de production et d'exploitation". Des "règles éthiques" seront aussi mises en place pour "prévenir les conflits d'intérêts".

3-les recettes

Selon le nouveau Com, la subvention versée par l'Etat baisser de 16 millions d'euros entre 2013 et 2015, et même de 42 millions d'euros entre 2012 et 2015. Au contraire de l'ancien Com qui tablait sur une hausse régulière de cette subvention...

Concernant la publicité, le nouveau Com est optimiste: il table sur un rebond des recettes, qui, après avoir atteint un point bas cette année, devraient progresser de 2,1% par an.

A lire le nouveau Com, on voit que ces prévisions publicitaires ont visiblement fait l'objet d'un vif débat entre l'actionnaire et France Télévisions, qui trouvent visiblement ces chiffres trop optimistes. En effet, le texte indique: "les recettes publicitaires sont en retrait de 100 millions par rapport aux prévisions [de l'ancien Com] construites en 2011. Cet écart pourrait atteindre 120 millions si n'était pas retenue l'hypothèse volontariste d'un rebond publicitaire. [...] Les dernières tendances observées ne permettent pas de corroborer avec certitude ce rebond du marché. Les recettes publicitaires comportent donc un aléa significatif".

A plusieurs reprises, le texte indique donc qu'il existe un aléa sur les ressources à venir, et que la direction se réserve donc le droit de "remettre en cause des dépenses en cas de recettes inférieures aux perspectives".

Jamal Henni