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Exclusif: SFR réclame 50 millions d'euros à Orange

SFR a porté plainte en parallèle devant le gendarme de la concurrence

SFR a porté plainte en parallèle devant le gendarme de la concurrence - -

La filiale de Vivendi porte plainte devant le tribunal de commerce contre son rival, accusé de pratiques anti-concurrentielles auprès des collectivités locales.

Les contentieux entre opérateurs se multiplient. Après Bouygues qui réclame 400 millions d'euros à Orange, c'est au tour de SFR de saisir la justice. La filiale de Vivendi réclame 50 millions d'euros de dommages à Orange. Elle a récemment déposé une "action indemnitaire" en ce sens devant le tribunal de commerce de Paris. Un autre opérateur, Altitude Infrastructure, réclame en outre 51.000 euros de dommages pour les mêmes motifs.

Le conflit porte sur la couverture en haut débit des zones rurales. Ces zones ne sont pas assez rentables pour que les opérateurs y déploient spontanément un réseau ADSL. Dès lors, les collectivités sont souvent prêtes à mettre la main à la poche pour subventionner l'installation d'un tel réseau.

Appels d'offres pipés

En pratique, la collectivité lance alors un appel d'offres ouvert à tous les opérateurs. Mais SFR juge que ces appels sont pipés en faveur d'Orange. En effet, c'est l'ex-France Télécom qui a construit le réseau téléphonique en cuivre qui supporte l'ADSL. Il en connaît donc précisément les caractéristiques: topographie, distance entre les abonnés et les centraux téléphoniques... Autant d'informations indispensables pour déployer un réseau ADSL.

Certes, Orange accepte de fournir une partie de ces informations à ses concurrents, mais contre rémunération et en prenant un certain temps. Selon SFR, les conditions dans lesquelles Orange répond à ces appels d'offres sont donc anti-concurrentielles.

En outre, les opérateurs concurrents ne disposent pas toujours de leur propre réseau dans ces zones, et sont alors obligés de louer des capacités en gros à l'opérateur historique. Là encore, SFR estime que les délais et les tarifs de l'offre de gros d'Orange sont anti-concurrentiels.

Indemniser les victimes

Deux plaintes sur le même sujet avaient déjà été déposées en 2009 par SFR et Altitude Infrastructure devant l'Autorité de la concurrence.

Ces deux procédures sont complémentaires. En effet, si ces pratiques sont avérées, l'Autorité de la concurrence infligera à Orange une amende qui ira dans les caisses de l'Etat, mais n'indemnisera pas pour autant les "victimes", à savoir SFR et Altitude. Une telle indemnistation peut donc être obtenue via le tribunal de commerce, une fois que le gendarme de la concurrence aura rendu son verdict. Ce dernier avance très lentement: quatre ans après la plainte, il n'a toujours pas bouclé son enquête.

Mais SFR a tenu à saisir dès maintenant le tribunal de commerce de peur que l'affaire soit prescrite. En effet, le délai de prescription des affaires commerciales vient de passer de 10 à 5 ans, en application d'une loi votée au début du quinquennant de Nicolas Sarkozy. C'est pour la même raison que Bouygues vient aussi de déposer des demandes d'indemnités...

Toutefois, Orange semble peu inquiet des demandes de SFR qu'il juge plutôt disproportionnées par rapport à la taille du marché des zones rurales, qui est très réduit.

Interrogés, ni Orange ni SFR n'ont souhaité faire de commentaires.

Jamal Henni