BFM Business
Services

EXCLUSIF - Vers un rapprochement a minima entre le CSA et l'Arcep

Ce rapport confidentiel du gouvernement propose de créer une instance commune, composée à parité de membres du CSA et de l'Arcep

Ce rapport confidentiel du gouvernement propose de créer une instance commune, composée à parité de membres du CSA et de l'Arcep - -

Dans un rapport confidentiel, Arnaud Montebourg, Fleur Pellerin et Aurélie Filippetti s'opposent à une fusion entre les gendarmes des télécoms et celui de l'audiovisuel, et plaident pour une mise en commun limitée.

Faut-il fusionner les gendarmes des télécoms et de l'audiovisuel? La question a été posée l'été dernier par Matignon, qui a commandé un rapport sur "le rapprochement" des deux régulateurs à Arnaud Montebourg, Fleur Pellerin et Aurélie Filippetti.

Les trois ministres ont rendu leur rapport en décembre, mais ce dernier est resté secret, et n'a même pas été transmis ni au CSA (Conseil supérieur de l'audiovisuel), ni à l'Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes).

Une décision sur le sujet était attendue avant la fin 2012, mais elle n'a toujours pas été prise. "Le sujet est toujours en attente d'un arbitrage de Matignon", dit-on rue de Valois. Une source gouvernementale ajoute: "une décision pourrait être annoncée avec la future loi audiovisuelle", mais le calendrier de cette loi reste aussi très flou...

Les ministres opposés à un rapprochement

Explication de cet enlisement: tout le monde n'est pas sur la même longueur d'onde. Le conseiller culturel de l'Elysée, David Kessler, qui avait voulu lancer la réflexion sur le sujet, resterait toujours favorable à un rapprochement des deux gendarmes. "Mais les parlementaires consultés n'en veulent pas", indique-t-on à Bercy.

En fait, c'est surtout les trois ministres qui sont opposés à tout rapprochement. Le rapport "ne propose pas une fusion de l'Arcep et du CSA", indique le texte, qui liste une série d'arguments pour ne pas fusionner.

Un mini-régulateur commun

Le rapport propose une solution minimaliste: mettre en place une "instance commune" entre les deux régulateurs. Cette solution "devrait être privilégiée", car elle "présente de nombreux avantages" et "paraît la plus équilibrée", écrivent les ministres.

Concrètement, cette instance serait dirigée par un collège "regroupant à parité des membres du CSA et de l'Arcep". Elle n'aura visiblement pas de services en propre, car elle "s'appuiera" sur les services existants des deux régulateurs, indique le rapport.

Le rapport propose de "dresser un bilan" de cette instance commune à une date non précisée. Cela permettrait de voir si cette solution est "suffisante", ou si une fusion est "incontournable".

Tâches secondaires

En pratique, l'instance sera un mini-régulateur: elle aura "un pouvoir de décision sur des sujets communs précisément identifiés", et "pourrait être en charge d'assurer la régulation de sujets communs, et trancher certains types de litiges".

Mais ces tâches seront assez secondaires, ce qui permettra de ne pas "affecter fondamentalement les structures existantes, ni de bouleverser les modalités de la régulation actuelle".

Précisément, cette instance commune serait par exemple chargée de "la gestion des fréquences, et notamment des fréquences partagées entre audiovisuel et télécoms". Elle s'occuperait de la régulation de TDF, aujourd'hui assurée par l'Arcep.

Elle donnerait aussi un avis unique et commun "sur les sujets de convergence" au gouvernement, aux organisations internationales, au gendarme de la concurrence... (aujourd'hui chacun des deux régulateurs donne de son côté son propre avis, en général assez divergents entre eux).

Timide régulation d'Internet

L'instance commune aurait aussi des compétences en matière de vidéo-à-la-demande (VoD) et télévision de rattrapage - les "services de médias audiovisuels à la demande", dans le jargon du secteur. Précisément, elle trancherait les litiges entre services de VoD et opérateurs télécoms, et notamment "la problématique d'accès non discriminatoire de services de VoD" (aujourd'hui, chaque opérateur choisit librement les services de VoD qu'il veut distribuer). L'instance s'occuperait aussi de "la problématique d'accès aux contenus de la part des opérateurs".

Last but not least, l'instance aurait trois compétences en matière d'Internet. D'abord, concernant la "déontologie des contenus, notamment la dignité de la personne humaine, et la protection de l'enfance". Ensuite, elle serait chargée de promouvoir l'offre légale de musique et de films. Enfin, elle traiterait de "la neutralité des réseaux, et notamment la gestion du trafic échangé entre les hébergeurs et les opérateurs télécoms lorsqu'il s'agit de contenus audiovisuels" -allusion aux sites YouTube ou DailyMotion.

A LIRE AUSSI:
>> Pourquoi le gouvernement ne veut pas fusionner CSA et Arcep

>> Bercy veut réduire les pouvoirs de l'Arcep

>> Arnaud Montebourg tire à boulets rouges sur l'Arcep

>> Les propositions du gouvernement pour réguler Internet

Jamal Henni