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France Télévisions cherche des alliés pour concurrencer Netflix

Le service s'appuiera sur le site actuel de rattrapage www.france.tv

Le service s'appuiera sur le site actuel de rattrapage www.france.tv - -

VIDÉO - Pour leur service de vidéos à la demande, les chaînes publiques négocient avec la Caisse des dépôts et rêvent d'une alliance avec Orange.

Dimanche 11 févier, le patron de M6 Nicolas de Tavernost s'est dit dans le Journal du Dimanche prêt à saisir la main tendue par France Télévisions pour s'unir face à Netflix: créer un service commun de vidéos à la demande par abonnement (SVOD) "est une bonne idée. Que des opérateurs de télévision, notamment gratuite, se regroupent pour proposer des services, comme le fait Hulu aux États-Unis et Freeview en Grande-Bretagne, ne me paraît pas illogique. Et nous sommes prêts à discuter avec tout le monde".

Interrogé, Julien Verley, directeur du développement commercial de France Télévisions, répond ne pas discuter pour l'heure avec M6, mais "être favorable à une alliance avec un ou plusieurs autres grands diffuseurs français. Cela renforcerait et accélérerait l'ambition de notre service, qui est prêt à être lancé. Ce service sera français d'abord, mais ensuite à vocation à être européen".

En pratique, "France Télévisions souhaiterait être rejoint par un ou plusieurs partenaires, qui pourraient rentrer au capital de la filiale qui porte le projet, France Télévisions SVOD SAS, crée en juin 2017. Cette filiale ad hoc nous donne toute la flexibilité nécessaire pour nous associer avec ces partenaires, ajoute-t-il. Nous négocions déjà depuis plusieurs mois avec la Caisse des dépôts. Nous sommes aussi ouverts à des discussions avec un partenaire comme Orange".

Rêve d'alliance

Le rêve de Delphine Ernotte serait d'apporter au service de France Télévisions les films et les séries des chaînes OCS, notamment les très réputées séries de HBO: Game of thrones, Westworld, The leftovers... La patronne de France Télévisions espère que l'Etat (qui détient 23% d'Orange) soutiendra cette idée. Elle a notamment évoqué cette piste dans sa contribution au gouvernement sur l'avenir de l'audiovisuel public.

Delphine Ernotte connaît bien Orange pour y avoir fait toute sa carrière. Mais un rapprochement des deux services se heurte à plusieurs obstacles. D'abord, les relations seraient fraîches entre Delphine Ernotte et son ancien patron Stéphane Richard. Ensuite, les accords conclus entre Orange et HBO réservent aux chaînes OCS les séries de l'américain, indique l'opérateur. En revanche, une vente groupée des deux services dans un bundle est possible.

Au total, "France Télévisions investira 15 millions d'euros dans le projet. Cette somme pourra être complétée par les investissements apportés par les partenaires éventuels", précise Julien Verley.

6,99 euros par mois

Hormis la question des partenaires, tout semble être aujourd'hui calé. "Le service sera lancé avant l'été", promet Julien Verley. Avec retard donc sur le calendrier initial, qui avait fixé un lancement pour fin mars 2017, puis pour septembre 2017.

Le prix sera de 6,99 euros par mois, indique un rapport du sénateur LR Jean-Pierre Leleux. "Le service s'appuiera sur le site existant de rattrapage www.france.tv, et son nom sera une déclinaison de france.tv", ajoute Julien Verley. "J'ai été agréablement surpris par l'ergonomie, qui n'a pas à rougir par rapport à Netflix", assure un des premiers testeurs du service.

Très différent de Netflix

Au menu: des films, des documentaires et de l'animation, mais surtout de la fiction française, avec pas moins de 300 titres différents. "L'offre de programmes sera très différente de Netflix, il y a très peu de recoupements", assure Julien Verley. Certes, l'américain propose 400 séries différentes, mais seulement 30 fictions françaises.

Ces fictions seront issues du catalogue de neuf producteurs français: Lagardère, Newen, Banijay Zodiak, Tetra Media, Makever, Cyber Group, Xilam, Millimages, et Media Participations. "Nos accords avec ces neuf producteurs prévoient que tous leurs programmes pourront être apportés au service. Mais il n'y aura pas d'exclusivité: les producteurs pourront aussi apporter leurs programmes à des services concurrents", précise Julien Verley. "Chaque producteur n'est pas obligé de fournir tout son catalogue au service de France Télévisions, mais jouera probablement les bons élèves s'il souhaite continuer à vendre ses fictions au service public", explique un producteur.

Chaque producteur pourra aussi apporter au service les fictions produites pour des chaînes autres que France Télévisions, une fois libérés les droits SVOD. Pour TF1 par exemple, l'accord collectif conclu avec les producteurs libère ces droits SVOD un an après la diffusion à l'antenne.

10% du marché

France Télévisions reversera 20% des revenus aux producteurs, et prendra à sa charge la numérisation des programmes. L'offre devrait être rentable mi-2020, et dégager 18% de marge d'exploitation en 2022, selon Jean-Pierre Leleux. "Nous visons 10% du marché, soit 600 à 700.00 abonnés 4 à 5 ans après le lancement", conclut Julien Verley.

Contacté, Orange répond qu'"il n'y a pas encore eu de discussions" avec France Télévisions.

Jamal Henni