BFM Business
Culture loisirs

Fun Radio accusée de gonfler ses audiences

-

- - -

Bruno Guillon, le présentateur de la matinale de la radio musicale, a incité ses auditeurs à déclarer à Médiamétrie qu'ils écoutaient Fun plus souvent et plus longtemps qu'en réalité. Une incitation qui aurait faussé les résultats, selon les radios concurrentes.

Depuis un an, l'audience de Fun Radio grimpe à chaque sondage. L'hiver dernier, elle a battu ses records historiques, avec 7,5% d'audience cumulée et 6,1% de part d'audience.

Problème: ces chiffres seraient artificiellement gonflés, à en croire ses concurrents NRJ, Skyrock, RMC (qui appartient au même groupe que ce site web), et Lagardère (qui détient Europe 1, Virgin et RFM). 

"Il faut mentir"

Selon ces concurrents, Fun aurait biaisé la mesure d'audience effectuée par Mediametrie. Cette mesure se fait au moyen de sondages téléphoniques, où l'intitut demande aux sondés quelle(s) radio(s) ils ont écouté la veille, quart d'heure par quart d'heure. 

En pratique, Bruno Guillon, l'animateur de la matinale de Fun, a incité ses auditeurs à déclarer qu'ils écoutent la station en permanence, même si cela ne reflète pas la réalité. Il aurait ainsi déclaré: "Vous pouvez dire Fun Radio même si vous ne nous écoutez pas", selon des déclarations compilées par jeanmarcmorandini.com, qui a révélé l'affaire. Ou bien: "Vous pouvez écoutez NRJ, mais si on vous demande, dites que vous écoutez Fun Radio". Mais aussi: "Il faut mentir". Ou encore: "Même si vous êtes parti écouter Skyrock pendant les pubs, dites Fun Radio".

Incertitude sur les audiences du printemps

Selon les radios concurrentes, Fun a, depuis septembre, cité à l'antenne au moins 90 fois Mediamétrie, dont plus de 70 fois afin d'augmenter le taux de répondants de Fun, et plus de 40 fois en demandant de mentir.

Jeudi, Fun Radio a admis dans un communiqué que "Bruno Guillon a, à plusieurs reprises, incité ses auditeurs à prendre le temps de répondre au sondage de Médiamétrie". Mais la filiale de RTL ajoute: "Il n’y a, à notre connaissance, que trois messages sur une période de 5 mois, de septembre à janvier dernier, qui peuvent être discutables dans leur forme, mêmes s’ils ont été prononcés de façon humoristique". Conclusion: "cette attaque est proprement calomnieuse et dénuée de fondement, [...] un amalgame inacceptable et préjudiciable. Elle est portée par une coalition de radios majoritairement en baisse sur les derniers sondages. Cette attaque est aussi la poursuite par certains acteurs d’une politique répétée de déstabilisation de la mesure d’audience du média radio".

En pratique, les concurrents de Fun ont écrit à Médiamétrie mercredi soir, et tiennent une conférence de presse ce jeudi. Ils demanderaient la non publication des audiences du printemps, prévue le 12 juillet. Ils ont fourni à l'appui un rapport commandé par NRJ au CESP (Centre d'étude des supports de publicité), qui relève les incitations de Bruno Guillon à l'antenne.

Selon les radios concurrentes, inciter les auditeurs de Fun à répondre au sondage de Médiamétrie a déjà induit en soi un biais important. En effet, le sondage durant une dizaine de minutes, seuls une dizaine de pourcents des personnes interrogées acceptent d'y répondre. Dès lors, si une radio incite ses auditeurs à accepter répondre au sondage, cela surpondère ses auditeurs au sein du panel.

Laborieuse évolution

En attendant, l'affaire relance le débat sur la mesure d'audience de la radio. Depuis une dizaine d'années, RMC, NRJ -et plus récemment Lagardère- militent pour une modernisation de cette mesure. Ils proposent d'utiliser une mesure non plus déclarative, mais automatique, basée sur des petits capteurs électroniques qui reconnaîtraient la radio écoutée. Ces capteurs pourraient être installés dans le téléphone mobile d'auditeurs, ou un petit boîtier ad hoc.

Une telle mesure serait évidemment bien plus précise. Elle permettrait notamment d'avoir des chiffres à la seconde près et sans délai. Elle est largement utilisée aux Etats-Unis, mais fait face en France à l'opposition de la majorité des radios. Notamment celles qui redoutent d'obtenir de moins bons résultats avec cette méthode. Or ce sont les radios qui décident des outils de mesure, via un vote au comité radio de Médiamétrie où siègent toutes les stations. L'institut lui-même est détenu par les principaux groupes audiovisuels hexagonaux. Pour l'instant, Médiamétrie se contente donc de mener des tests, et mène depuis le début de l'année son second test en Ile-de-France qui utilise des petits boîtiers. "De toutes façons, on ne basculera pas du jour au lendemain de la mesure déclarative à la mesure automatique. Ce sera progressif, et pourra passer par des mesures mixtes", prédit un expert.