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Hôtels en ligne: comment la loi Macron rebat toutes les cartes

Réclamée de longue date par les hôteliers, la liberté de fixer ses tarifs vis à vis des plates-formes Internet, rend au secteur sa marge de manoeuvre tarifaire et commerciale

Réclamée de longue date par les hôteliers, la liberté de fixer ses tarifs vis à vis des plates-formes Internet, rend au secteur sa marge de manoeuvre tarifaire et commerciale - Franck Fife-AFP

Désormais applicable, la loi Macron rend caducs tous les contrats existants entre hôtels et sites de réservation sur Internet. Recouvrant sa liberté tarifaire, l'hôtellerie saura-telle profiter de ce "cadeau" législatif  ?

Les hôteliers français crient victoire depuis le vendredi 7 août 2015, jour de la promulgation de la loi Macron.

"Cette victoire est le fruit d’un travail long et rigoureux mené sur tous les fronts: contentieux, parlementaire, gouvernemental afin de rééquilibrer les relations commerciales entre les plateformes de réservation en ligne et les hôteliers" clame-t-on à l'UMIH (Union des métiers et des industries de l'hôtellerie), important syndicat hôtelier français.

L'entrée en vigueur de la loi leur permet de retrouver la liberté tarifaire totale face à Booking.com et ses rivaux (hotels.com notamment ) grâce à un amendement voté début juillet 2015.

Les hôteliers avaient déjà regagné un degré de liberté tarifaire, grâce à l'Autorité de la concurrence, en avril 2015. Mais, ils ne pouvaient pas encore pratiquer, sur leur site web, des prix plus bas que ceux des plates-formes de réservation. Cette fois-ci, leur victoire est totale.

La loi introduit aussi un "contrat de mandat" dans la relation entre les sites de réservation en ligne et les hôteliers, tout en annulant les contrats existants.

Booking.com propose déjà un avenant à ses contrats existants

Autrement dit, les sites Internet de réservation doivent dès maintenant s'atteler à la rédaction de nouveaux contrats avec les hôteliers dont ils veulent vendre les nuitées. Les plates-formes en ligne contrevenantes encourent une amende atteignant 150.000 euros pour une personne morale.

Booking.com n'a pas tardé à réagir en proposant un avenant au contrat qui régissait jusqu'à présent ses relations avec les hôtels ayant choisi sa plate-forme. Reste à savoir si cela suffira pour être en conformité avec la loi ou si la rédaction complète d'un "contrat de mandat" ne sera pas nécessaire.

De son côté, l'UMIH met en ligne sur son site un mode d'emploi très clair à l'attention des professionnels. S'y ajoute un flyer à distribuer au client, censé leur vanter pourquoi ils trouveront toujours une meilleure offre en passant directement par l'hôtel.

A l'évidence, le syndicat invite ses adhérents à être plus actifs sur Internet pour regagner le contact direct avec le client, qu'ils avaient de fait perdu, en s'en remettant aux plates-formes de réservation en ligne.

Le syndicat UMIH invite ses adhérents à collecter l'email des clients

"Faites des campagnes d'emailing en proposant des prix attractifs ou des meilleurs offres à vos clients" ou "Pensez à récupérer les contacts emails des clients ayant sejourné dans votre établissement" : tels sont les conseils de bon sens que conseille le mode d'emploi de l'UMIH .

En fait, tout l'enjeu de la loi Macron, pour les professionnels de l'hôtellerie, consiste à saisir cette formidable opportunité que les parlementaires leur ont offert, de redéfinir leur positionnement marketing et commercial en ligne.

Il s'agit, ni plus ni moins, pour l'hôtellerie française, que de reprendre son destin sur Internet en main.

Aujourd'hui, la part des centrales de réservation dans le chiffre d'affaires des hôteliers ne cesse de croître. En Europe, 70% des ventes de nuitées en ligne passent par elles, le reste par les sites web des hôtels.

Les hôteliers ont tout à gagner à renouer le contact direct avec le client sur Internet, en augmentant leurs ventes en direct ou via leurs propres sites web.

L'autre enjeu consiste à inciter les hôteliers à faire jouer la concurrence entre les centrales de réservation, afin d'abaisser les taux de commissions qui pèsent sur leurs marges. Les centrales prélèvent en effet des commissions oscillant en Europe entre 15% et 20% du prix d'une chambre.

Frédéric Bergé