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Intermittents: les députés proposent de limiter les abus

En 2003, la grève des intermittents avait entraîné l'annulation du festival d'Avignon.

En 2003, la grève des intermittents avait entraîné l'annulation du festival d'Avignon. - -

Une mission bipartisane propose de maintenir le régime en place, mais aussi de "contenir" les abus, en s'attaquant aux intermittents les plus riches, ainsi qu'aux employeurs.

La mission d'information sur les intermittents du spectacle a rendu son rapport mercredi 17 avril. Un rapport qui a été adopté à l'unanimité des députés composant la mission, issus de tous bords politiques. Même si les mesures proposées sont plutôt de gauche.

En effet, la mission exclut de remettre en cause le régime des intermittents, ou de le faire financer par l'impôt (il est aujourd'hui financé par l'assurance chômage, c'est-à-dire par les cotisations des salariés et des employeurs).

Faire payer les riches...

La mission propose seulement de mettre fin à certains abus, en s'attaquant aux employeurs et aux intermittents les plus riches. En effet, actuellement, même les plus grandes stars peuvent bénéficier du régime...

La mission propose donc de plafonner à 4.188 euros par mois le revenu d'un intermittent (en additionnant cachet et indemnités chômage). Au-delà, l'artiste ne toucherait plus d'allocation chômage. Cette mesure toucherait 5.886 intermittents et rapporterait 33 millions d'euros par an.

Dans le même ordre d'idée, la mission propose aussi d'augmenter les cotisations des intermittents les plus riches. Augmenter les cotisations de 20.040 intermittents rapporterait ainsi 7 millions d'euros par an.

...et les employeurs

La mission veut aussi s'attaquer à la "permittance", c'est-à-dire aux intermittents qui travaillent pour le même employeur à temps plein ou presque.

Concrètement, elle veut "interdire" le statut d'intermittent à ceux qui déclare travailler 151 heures par mois, soit l'équivalent d'un temps plein.

Mais la mission s'attaque aussi aux employeurs. En particulier, elle propose de requalifier d'office en CDI l'emploi d'un intermittent pendant 900 heures par an, soit six mois de travail à temps plein.

Entre 600 et 900 heures par an, l'employeur se verrait obligé de proposer à l'intermittent un CDI. "Mais beaucoup d'intermittents refuseront, car ils n'y gagneront pas", a expliqué mercredi le rapporteur Jean-Patrick Gille (PS).

La Cour des comptes critiquée

Enfin, la mission a exprimé son désaccord avec les calculs de la Cour des comptes, qui chiffre à un milliard d'euros par an le déficit du régime des intermittents. "Cette analyse est à courte vue", a déploré Jean-Patrick Gille.

Selon lui, les régimes sont déficitaires "par nature et par construction" pour tous les contrats précaires. Elle rappelle qu'en 2011, le régime des CDD a été déficitaire de 5,1 milliards d'euros, et celui des intérimaires de 1,5 milliard d'euros...

Et il est donc "logique" que tous ces salariés précaires "bénéficient de l'appui de ceux qui connaîtront pas ou peu le chômage", au nom de "la solidarité interprofessionnelle". Le rapport reprend l'analyse du ministre du travail Michel Sapin: "je n'ai vu personne chercher à calculer un déficit de l'assurance maladie limité aux patients..."

La mission a préféré demander à l'Unedic de simuler le basculement de tous les intermittents dans le régime général de l'assurance chômage. Verdict: les intermittents représenteraient alors un surcoût de seulement 320 millions d'euros par an. "Ce montant correspondrait donc au coût réel des règles particulières de l'intermittence. Il n'est sans doute pas anodin, mais bien éloigné du montant d'un milliard d'euros", conclut le rapport.

Jamal Henni